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"Taper sur l'ENA, ça ne résout rien" : les futurs candidats au concours de l'école réagissent à l'annonce de Macron

Le président de la République pourrait annoncer la suppression de l'Ecole nationale d'administration. Franceinfo a interrogé plusieurs étudiants qui préparent le concours d'entrée à cet établissement très sélectif.

Article rédigé par franceinfo - Auriane Guerithault
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des étudiants dans les locaux de l'Ecole nationale d'administration, à Strasbourg, en 2013.  (PATRICK HERTZOG / AFP)

"On a lu les articles pendant une heure puis on s’est vite remis à travailler." Pierre, 25 ans, prépare actuellement le concours de l’ENA et il l’assure, dans sa prépa à Paris Dauphine,"aucun préparant ne va se démotiver". La suppression de l’ENA qu’Emmanuel Macron pourrait annoncer n’a pas bousculé leurs plans de révisions. "C’est une annonce cosmétique", tacle Pierre.

Les prétendants au concours 2019 interrogés par franceinfo avouent ne pas se sentir menacés par cette nouvelle. Entre eux, certains s'en amusent. Car leur préoccupation pour le moment est de préparer le concours qui les attend fin août. Certains restent prudents : "On ne sait pas ce que ça veut dire, ni quand ça va tomber. Il faut prendre des précautions", estime Raphaëlle, étudiante en master 2 à Sciences Po Paris où elle suit la prép’ENA.

"C'est bien si les choses bougent"

Pour eux, la disparition de l'ENA ne changerait pas grand-chose. Le concours est tellement sélectif qu'ils ont de toute façon prévu des plans alternatifs avant de  tenter cette épreuve d'entrée que personne ne se voit réussir à coup sûr. "Je le passe cette année, mais je mise plutôt sur l’année prochaine", ajoute Raphaëlle. En cas d'échec, elle envisage de devenir contractuelle dans l’administration publique ou de passer d’autres concours, comme celui de la Banque de France, qui mène aussi à des postes dans la thématique qui l’intéresse, l’économie. Frédéric Dewitt, étudiant à Sciences Po en master 2, lui, s’orienterait plutôt vers les concours des tribunaux administratifs ou des chambres régionales des comptes.

Tous plébiscitent une réforme de fond et soutiennent l'idée de remplacer le filtre de l'ENA par un autre système de recrutement. "Dans tous les cas, il y aura toujours une voie pour accéder à la fonction publique", se rassure Julianne. "C’est bien si les choses bougent un peu", complète Raphaëlle. Un sentiment partagé par beaucoup de prétendants au concours qui entendent depuis plusieurs années les critiques visant l’établissement, symbole de l'élitisme.

"Si cela nous permet d’être mieux formés, alors je dis oui, affirme Julianne. Il faut être capable de s’adapter au changement." Parmi les pistes avancées par ces étudiants, il faudrait d’avantage diversifier les profils "notamment en ouvrant le concours aux profils universitaires", suggère Raphaëlle. Et ce tout en maintenant le niveau de l’examen qui fait "l’attractivité" de l’établissement et "permet d’attirer des profils d’excellence", estime-t-elle.

Réformer oui, supprimer non

Selon eux, c'est la "botte de l'ENA" qui pose problème aujourd'hui : les élèves les mieux classés à la fin de leur scolarité peuvent choisir leur affectation parmi les grands corps de l'Etat : Cour des comptes, Conseil d’Etat ou Inspection générale. "L’accès direct au grand corps ne devrait pas être une récompense pour les plus intelligents, considère Frédéric. Ce grand corps crée cet esprit corporatiste qui est critiqué." 

D’autres sont en revanche contre une suppression totale de l’ENA : "C’est une réponse facile à une question compliquée. Taper sur l’ENA c’est simple, mais ça ne résout rien", estime Frédéric Dewitt. "Je ne pense pas qu’il y aura une suppression brutale", se rassure Raphaëlle. Tous s'interrogent sur la forme que pourrait prendre la nouvelle formule pour accéder aux postes de hauts fonctionnaires de l'Etat. "Je me demande comment [Emmanuel Macron] pourra créer une structure qui ne sera pas un ENA bis ?" se demande Pierre.

Dans l’attente d’une annonce plus officielle, ils se posent une question : "Est-ce qu’on va être la dernière promo de l'ENA ?", s’interroge Pierre dans l’hypothèse où il réussirait le concours cette année. Même incertitude pour Julianne : "Ce n’est pas forcément bien, on pourrait être vus comme issus de la dernière promotion d’un concours périmé."

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