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Pourquoi les 318 000 assistants maternels de France sont appelés à faire grève mardi

Ces professionnels protestent contre une réforme qui les oblige à se référencer sur le site de la Caisse d'allocations familiales. Selon l'une des fondatrices du collectif des Assistants maternels en colère/"Gilets roses", ce dispositif s'apparente à du "flicage".

Article rédigé par Raphaël Godet - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un bébé au Relais assistantes maternelles de Rouffach (Haut-Rhin), le 26 mars 2019. (MAXPPP)

En cette fin d’année, la colère sociale ne retombe pas. Cette fois, c'est au tour des assistants maternels d'entrer dans la bataille. Ces quelque 318 000 professionnels, qui accueillent à leur domicile de jeunes enfants, sont appelés à cesser le travail pour protester contre un article du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui les oblige à se référencer sur le site de la Caisse d’allocations familiales (CAF). "C'est du flicage", s'agace Laurence Joly, l'une des fondatrices du collectif des Assistants maternels en colère/"Gilets roses"

Franceinfo : Pourquoi appelez-vous à faire grève ?

Laurence Joly : Pour protester contre l'article 49 du projet de loi de financement de la sécu pour 2020. Officiellement, celui-ci est censé améliorer l'accès aux places de garde disponibles pour les parents. Mais c'est un prétexte. Si cette mesure gouvernementale passe, on devra se créer un profil sur le site de la Caisse d'allocations familiales. Chaque assistant maternel devra indiquer l'ensemble de ses coordonnées. Le prénom et le nom, l'adresse mail, le téléphone, l'adresse du domicile… Ce n'est pas tout : il devra aussi régulièrement actualiser ses disponibilités, ses dates de congés, ses tarifs…

Et si vous ne le faites pas ? 

C'est simple : on perdra notre agrément, comme celui que j'ai depuis six ans.

Qu'est-ce qui vous dérange dans cette mesure ? 

Désormais, tout notre profil sera public. N'importe qui y aura accès. Cela pose quand même plusieurs questions. Déjà en termes de protection des données personnelles, c'est contraire à ce qu'on entend tous les jours. Il y a aussi la question de la sécurité : avec cette obligation de transparence, tout le monde saura quand vous êtes à la maison avec des enfants, quand vous y êtes sans… N'oubliez pas qu'on travaille chez nous, ce qui nous rend déjà plus vulnérables. Et encore, je ne parle même pas du démarchage commercial qui nous attend. Je n'ai pas envie de passer mes journées à dire "non" à une personne qui veut me vendre tout et n'importe quoi.

Le fait de devoir indiquer nos tarifs va induire une concurrence entre nous. Certains assistants auront peut-être envie de tirer les prix vers le bas pour obtenir plus d'heures.

Laurence Joly

à franceinfo

Mais ce genre de sites existe déjà…

Tout à fait. Mais les utilisateurs qui y sont inscrits fonctionnent avec des pseudonymes. Cela permet de pouvoir créer un premier filtre. On n'est pas contre ce site, mais on voudrait simplement qu'on protège nos données, on voudrait avoir le choix de renseigner ou non les informations.

Concrètement, comment va se dérouler la grève ? 

Chaque nounou fera son choix. Certains assistants ont choisi une grève totale, c'est-à-dire qu'ils ont prévenu les parents que leurs enfants ne seraient pas accueillis. D'autres, et c'est mon cas, ont opté pour le "service minimal" pour ne pas trop pénaliser les familles. En clair, je garderai les enfants comme d'habitude. En revanche, je ne fournirai pas les repas, ce sera aux parents de les prévoir. Et quand j'irai chercher les enfants à l'école, j'enfilerai mon gilet rose pour montrer mon mécontentement.

Pourrait-il y avoir d'autres actions ?

On verra. J'ai en tout cas le sentiment que le mouvement va être suivi. Notre collectif a été créé il y a tout juste un an, le 23 novembre 2018. On compte actuellement plus de 11 000 membres.

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