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Le cas Éric Dupond-Moretti commence à préoccuper la majorité... et l'exécutif

La pression continue de monter sur Éric Dupond-Moretti. Le ministre de la Justice, contesté par les magistrats, est soutenu par l'exécutif mais des interrogations commencent à se faire entendre au sein de la majorité.

Article rédigé par Yannick Falt
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti quittant le Palais de l'Elysée, à Paris, le 7 octobre 2020 (ALEXIS SCIARD  / MAXPPP)

La situation ne se calme pas vraiment pour Éric Dupond-Moretti. Le Syndicat de la magistrature vient de rendre publique, sur franceinfo, une tribune dénonçant "les 12 contre-vérités" du garde des Sceaux ; la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique lui a adressé une "demande de précisions" sur de possibles conflits d'intérêts, et une plainte vient d'être déposée contre lui pour "prise illégale d'intérêt".

Officiellement, Matignon assure, selon la formule consacrée, qu'Éric Dupond-Moretti a "toute la confiance du Premier ministre". L'Élysée se contente d'un "pas de commentaire spécifique."
L'entourage du garde des Sceaux, lui, est vent debout pour dénoncer "des boules puantes à répétition". Les précisions demandées par la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique ? "Rien de neuf sous le soleil" pour un conseiller, qui regrette un climat de "suspicion". Quant au bras-de-fer qui perdure avec les magistrats, il est balayé d'un revers de main.

Tous ses prédécesseurs ont eu droit à une fronde.

Un conseiller du ministère de la Justice

à franceinfo

C'est l'enquête administrative déclenchée sur des magistrats du Parquet national financier qui a mis le feu aux poudres. Sur ce point, l'entourage d'Éric Dupond-Moretti affirme que "le ministre a pris les dispositions nécessaires pour ne pas se placer en situation de conflit d'intérêts."

Les conseillers du ministre rappellent que "dès l’annonce de sa nomination, il a retiré la plainte qu’il avait déposé en sa qualité d’avocat", et précisent entre autres qu'il a "laissé l’inspection générale de la justice poursuivre l’inspection de fonctionnement qui avait été ordonnée avant sa nomination par l’ancienne garde des Sceaux Nicole Belloubet", que cette inspection "a conclu à de possibles manquements déontologiques  concernant trois des magistrats du PNF", et que la décision de diligenter une enquête administrative, "qui ne préjuge en rien de poursuites disciplinaires, n’a pas été signée personnellement par le garde des Sceaux mais par délégation par sa directrice de cabinet."

Enfin, souligne un conseiller d'Éric Dupond-Moretti, "lorsque le rapport d’enquête administrative lui sera remis, le ministre de la Justice continuera à veiller naturellement à éviter tout éventuel conflit d’intérêts."

"Un point de blocage avec les magistrats"

Sur le plan politique, la fronde n'atteint pas encore la majorité. Mais certains deviennent dubitatifs. "Pourquoi ne joue-t-il pas l'apaisement avec les magistrats ?" s'interroge un membre éminent de la commission des lois de l'Assemblée nationale. Un "visiteur du soir" d'Emmanuel Macron confie que l'Élysée comme Matignon ont conscience que le problème prend de l'ampleur. Notamment depuis l'intervention de François Molins, le procureur général près la cour de Cassation, pour qui "c'est l'indépendance de la justice qui est en danger". 

Pour cet interlocuteur régulier du président de la République, il y a "un point de blocage très lourd avec les magistrats. Il aurait dû se déporter plus vite de ses clients comme avocat. La liste est longue comme le bras, il y a même le roi du Maroc Mohammed VI."

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