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Trois millions d'euros d'aide aux apiculteurs : "Ça fait 20 ans qu'on nous mène en bateau"

Loïc Leray, vice-président de l'Union nationale de l'apiculture française, a réagi sur franceinfo après l'annonce par le ministre de l'Agriculture du déblocage de trois millions d'euros pour aider les apiculteurs.

Article rédigé par franceinfo
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Image illustration d'un rucher (MARTIN BUREAU / AFP)

Loïc Leray, apiculteur et vice-président de l'Union nationale de l'apiculture française (Unaf), estime que le déblocage de trois millions d'euros par le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, pour venir en aide aux apiculteurs est largement insuffisante. Pour l'apiculteur, "l'urgence est de venir en aide en priorité aux jeunes apiculteurs sinistrés, en tenant compte de l'état financier des exploitations". 

franceinfo : Ce qui vous pose problème, ce sont les démarches pour obtenir de l'argent qui risquent d'être compliquées ?

Loïc Leray : Ce n'est pas assez précis. Je faisais partie des débats au ministère de l'Agriculture, nous avons également été reçus à l'Élysée, et moi ce qui m'inquiète, ce sont les discours des jeunes apiculteurs qui sont au bord de la faillite, compte-tenu de ces difficultés engendrées depuis plusieurs années, et cette année c'est l'hécatombe. L'urgence, c'est de venir en aide en priorité aux jeunes apiculteurs qui sont sinistrés. Moi je crains que ces démarches fassent beau sur le papier mais avant d'avoir le chèque de ministère de l'Agriculture [ça prendra du temps]. Nous sommes très inquiets.

Est-ce que c'est une aide à la hauteur ?

Ce n'est pas une aide à la hauteur. Elle n'est pas adaptée à l'urgence du moment. Nous on souhaite une aide directe aux apiculteurs sinistrés en tenant compte de l'état financier des exploitations. Trois millions d'euros, ça fait un beau titre, mais je suis prêt à faire le bilan dans un an et vous verrez qu'il y aura une somme dérisoire distribuée si on ne modifie pas cette forme d'aide financière. Ça fait 20 ans qu'on nous mène en bateau. Un chiffre parle de lui-même, c'est l'augmentation des pesticides en 2018 : 12%, alors qu'on a fait de grands discours autour de la biodiversité. C'est beau ces discours, mais nous, sur le terrain, on subit. On constate la dégradation de la biodiversité, notre cheptel qui disparaît à tout-va et rien ne bouge.

Est-ce que ça veut dire qu'aujourd'hui un apiculteur en France ne peut pas vivre de son travail ?

Si, on pourrait vivre de notre travail, à condition qu'on applique vraiment les règles de respect de l'environnement, qu'on supprime définitivement toutes ces néonicotinoïdes sur le territoire. Mais il va falloir du temps pour laver les sols, il faut au moins 4 ou 5 ans.

Quand je vois autour de chez moi en Bretagne et dans le Pays de la Loire, toutes ces étendues de maïs qui ont été enrobées avec les molécules dangereuses pour la biodiversité, les sols et bien sûr nos abeilles, je suis très inquiet aussi pour le printemps 2019. On constate chaque année le massacre dans nos colonies.

Imaginez une autre filière du monde agricole qui perd chaque année 30 à 40% de sa production. Là, mes collègues ont perdu 80 à 90% de leur cheptel. Ça fait bien longtemps qu'on aurait pris des mesures plus urgentes. Donc oui, il y a une belle enveloppe qui a été promise, mais à mon avis ce n'est pas ça qui va sauver les pauvres exploitations en péril. Il y a aussi le frelon asiatique qui cause énormément de dégâts, donc c'est une accumulation qui fragilise le métier et derrière il faut bien comprendre que c'est un petit insecte qui rend énormément de services.

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