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Saint-Valentin : du Kenya à la France, en passant par les Pays-Bas, le coûteux marché de la rose

Pour pouvoir offrir une rose à la Saint-Valentin, en plein hiver, toute une filière tourne à plein régime. Reportage dans le "Wall Street des fleurs", près d'Amsterdam, et ses traders de fleurs coupées. 

Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Une serre de roses de "Meijer roses" à Pijnacker, aux Pays-Bas, en février 2019. (GRÉGOIRE LECALOT / FRANCEINFO)

Le marché aux fleurs d’Alsmeer, au plus près des pistes de l’aéroport d’Amsterdam Schipol (Pays-Bas), est un complexe de hangars grand comme la principauté de Monaco. L'organisme qui gère ce marché, Royal FloraHolland, fonctionne comme une énorme coopérative, et regroupe 4 000 producteurs de fleurs venus du monde entier.

40% des fleurs coupées dans le monde sont vendues ici

"On vend 12 milliards de produits par an en tout. Les exportations depuis les Pays-Bas représentent 6 milliards d’euros," explique Michel van Schie, porte-parole de Royal FloraHolland. Dans ces hangars immenses, des milliards de fleurs passent dans des centaines de chariots montés sur des rails automatiques qui les emmènent des chambres froides vers le secteur de distribution, une fois achetées. Des conducteurs de trolleys viennent les prendre un par un pour les livrer, dans une noria permanente.

Mais le cœur du marché d’Alsmeer, c’est la bourse : 40% des fleurs coupées dans le monde sont vendues ici. Erik Wassenaar, trader de roses, nous fait visiter la salle de vente. "On ne voit pas d'acheteurs, on ne voit pas de fleurs, tout est en ligne. Tout est là, sur cet écran, comme ça je suis sûr d’avoir toutes les informations nécessaires pour les enchères", détaille-t-il. 

Salle des ventes du marché d’Alsmeer, Pays-Bas, en février 2019. (GRÉGOIRE LECALOT / FRANCEINFO)

Les roses sont vendues à la tige, de quelques dizaines de centimes à 1 euro ou 1,50 euro selon la variété. C'est un marché sous contrôle, pour que le producteur n’y perde pas, comme l'explique Erik Wassenaar : "Mon boulot c’est d’obtenir le juste prix. Si le prix est trop bas par rapport au marché, j’arrête l’enchère, je dis : non, j’annule cette transaction parce que j’en attends 40 centimes et vous m’en donnez 20. Si la fleur part à 20 centimes, le producteur va m’appeler et dire : Eric, je crois que tu as fait une connerie."

Vendre des roses en hiver, un coût environnemental

Les roses vendues ici viennent aux trois quarts de pays de la ceinture équatoriale : Colombie, Equateur, et surtout Kenya et Ethiopie. Le quart restant est dominé par la production hollandaise. Les fleurs ont pris l’avion réfrigéré pour venir, puis repartent, essentiellement en camion, vers l'Allemagne, la France, ou encore le Royaume-Uni. En une semaine pour les plus lointaines, trois jours pour les roses européennes, elles peuvent être dans un vase, chez vous.

Dans sa serre de roses bio en région parisienne, sans lampes allumées toute la journée pour favoriser la pousse, sans contrôle de température et surtout sans pesticides ni fertilisants, François Bataillard, directeur de l’association d’insertion Fleurs de Cocagne, regarde les tiges coupées, sans fleur… Normal c’est l’hiver !

Ce commerce mondial le laisse partagé entre admiration et scepticisme : "Jamais on n'aurait imaginé le colosse qui anime tout ça et qui s’est mis en place au fil des années. C’est une horloge. Mais à quel prix ? Les fleurs coupées ont une vocation, à être trempées dans l’eau et ensuite, cette eau est jetée à l’évier et forcément réintroduite dans un cycle immuable qui est celui de la nature", soupire François Bataillard. Il propose d'ailleurs de remplacer la Saint-Valentin par la Sainte-Valentine, ce qui aurait l'avantage de tomber le 25 juillet, en pleine saison des roses. 

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