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A Caen, les agriculteurs lèvent le barrage, mais peuvent se remobiliser "dans six semaines ou dans six mois"

Après les annonces du gouvernement, les éleveurs, mi-convaincus mi-déçus, ont dû prendre une décision : poursuivre le mouvement ou reprendre le chemin de leur exploitation. 

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des agriculteurs discutent sur le barrage qu'ils ont installé à proximité de Caen, mercredi 21 juillet.  (CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
La fatigue est palpable, mercredi 22 juillet, au barrage de Mondeville (Calvados). Voilà bientôt quatre jours que les agriculteurs en colère sont installés sur la D613, au-dessus de l’échangeur entre l’autoroute A13 et le périphérique de Caen. Entre les tracteurs et les bottes de paille, les éleveurs attendent la fin du Conseil des ministres et, avec elle, l’annonce des mesures d’urgence adoptées par le gouvernement. "On reste déterminés", prévient Timothée Roset, éleveur laitier.
 
Enfin, Stéphane Le Foll prend la parole. Sans parvenir à convaincre les agriculteurs, installés dans la bétaillère pour regarder la conférence de presse sur l’écran d’un smartphone. "C’est flou", estime l’un d’entre eux. "La restructuration de la dette a déjà été annoncée, aucune contrainte n’a été imposée aux distributeurs… Il n’y a rien de concret", énumère un autre, assis dans la paille.
Et les agriculteurs du barrage de Mondeville ne sont pas les seuls à exprimer leurs doutes : les responsables nationaux refusent de prononcer ou non la suspension du mouvement tant qu’ils n’ont pas décrypté les 24 mesures du gouvernement. "Pour l’instant, on reste mobilisés comme on l’était", vient rappeler un représentant des Jeunes agriculteurs du Calvados.

"On ne va pas rester ici quinze jours"

Mondeville retombe dans l’attente. Autour d’un nouveau barbecue improvisé sur les grilles d’un Caddie, les agriculteurs discutent. Certains refusent de lever le barrage. "Pourquoi s’être embêté à venir ici pendant cinq jours pour finalement accepter de repartir sans avoir obtenu ce que l’on voulait ?" lance Kévinn Marie, salarié dans une exploitation à Lisieux (Calvados). "Il faudra bien partir à un moment, on ne va pas rester ici quinze jours !" rétorque un autre éleveur.
 
Les minutes passent et la motivation semble retomber, effacée par la fatigue. Après trois courtes nuits, une majorité des agriculteurs sont épuisés, dormant qui dans la paille, qui sur le bitume. Pour briser l’ennui, certains arrêtent un camion réfrigéré, espérant y trouver une cargaison de lait qu’ils pourront décharger pour une nouvelle action symbolique. Peine perdue : le poids lourd ne transporte que du pain pour le Royaume-Uni.

"Si on ne faisait rien, on n’obtenait rien"

 Enfin, l’information tombe : Jean-Yves Heurtin, le président de la FDSEA du Calvados, propose la suspension du mouvement. Il vient d’ailleurs l’annoncer lui-même à Mondeville, avec la promesse de relancer une action dans quelques semaines, si les mesures ne sont pas appliquées. "Vous pouvez rester, si vous le souhaitez, affirme-t-il aux éleveurs face à lui. Mais vous n’obtiendrez rien de plus. Vous êtes d’accord ?"
 
Le "oui" est faible, mais les agriculteurs acceptent de lever le camp. "On est un peu déçus, parce que l’on n’a pas obtenu tout ce que l’on voulait, avoue Alex Mérer, salarié agricole. Mais si on a réussi à se mobiliser autant, on pourra à nouveau le faire dans six semaines ou dans six mois." 
 
Outre l’obtention de quelques aides, les agriculteurs normands se félicitent en tout cas d’avoir réussi à lancer un mouvement d’une ampleur sans précédent. "C’est extraordinaire, nos parents n’ont jamais connu ça !" se réjouit Florent Verger. "Si on ne faisait rien, on n’obtenait rien, ajoute Timothée Roset. Reste à savoir si la parole du gouvernement sera confirmée par ses actions." Réponse dans quelques semaines.
 
 

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