Baisse de la production, consommation historique... Pourquoi les prix des carburants repartent (encore) à la hausse

Après une légère pause mi-août, les prix du gazole et du sans-plomb remontent à nouveau. Et cette augmentation, déjà importante en juillet, pourrait durer, après les annonces des membres de l'Opep+, l'Arabie saoudite et la Russie en tête.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Une station-service à Abbeville (Somme), le 26 février 2023. (AMAURY CORNU / HANS LUCAS / AFP)

Un répit de courte durée pour le portefeuille des automobilistes français. Après un tassement des prix des carburants courant août, les tarifs repartent à la hausse depuis la rentrée. Le litre de gazole a repris près de 3,5 centimes entre le 25 août et le 1er septembre, pour atteindre quasiment 1,86 euro par litre. Le sans-plomb 95 a de son côté augmenté de plus de 2 centimes, passant à près de 1,96 euro, et le sans-plomb 98 flirte lui avec les symboliques 2 euros par litre (voir l'évolution des prix sur le graphique ci-dessous).

Face à ce nouveau rebond, des voix s'élèvent pour réclamer le retour de l'aide de l'Etat à la pompe. Xavier Bertrand, président LR de la région Hauts-de-France, a réclamé vendredi de nouvelles "ristournes" d'"au moins 15 à 20 centimes d'euros (...) par litre". Une proposition balayée par le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, qui juge qu'une telle mesure ne serait "pas responsable", alors que le gouvernement tente par tous les moyens de serrer la vis pour réduire les dépenses et boucler le budget 2024. Les prix pourraient donc bien continuer à grimper pour les automobilistes dans les prochaines semaines, et on vous explique pourquoi.

Parce que l'Arabie saoudite produit moins

L'Arabie saoudite va continuer de réduire sa production de pétrole d'un million de barils par jour (bpj) pour "trois mois supplémentaires", d'octobre à décembre. Pour les trois derniers mois de l'année, la production du royaume "sera d'environ neuf millions de bpj", précise le ministère de l'Energie saoudien. Cette stratégie, destinée à "soutenir la stabilité et l'équilibre des marchés pétroliers", sera "réexaminée mensuellement dans l'optique de réduire davantage la production ou de l'augmenter", ajoute le ministère.

Le premier exportateur mondial de brut avait annoncé des coupes en juin à l'issue d'une réunion de l'Opep+ (qui rassemble 23 pays producteurs de pétrole). Elles ont pris effet en juillet. "Le but de ces réductions de production est de maintenir les prix du pétrole à des niveaux jugés suffisamment élevés", explique à franceinfo Francis Perrin, directeur de recherche à l'iris et spécialiste des problématiques énergétiques. "Il y a quelques mois, leur production atteignait 11 millions de barils par jour", rappelle-t-il.

Parce que Moscou s'aligne sur Riyad

La Russie suit le mouvement puisqu'elle va maintenir la réduction de ses exportations de pétrole de 300 000 barils par jour jusqu'à la fin 2023. La raison invoquée est la même : le maintien de "la stabilité et l'équilibre des marchés pétroliers", a justifié sur Telegram le vice-Premier ministre russe, Alexandre Novak. Moscou avait déjà coupé ses volumes de production de 500 000 barils par jour en août.

Conséquence directe de ces annonces : les cours du Brent, référence européenne en matière de pétrole brut, ont dépassé la barre symbolique des 90 dollars le baril pour la première fois depuis novembre 2022.

L'Opep+ (les 13 pays de l'Opep et 10 autres pays) représente 40% de la production mondiale de brut, rappelle Les Echos. Les analystes de Rystad, un cabinet de conseil indépendant en énergie et société d'analyse pour l'industrie pétrolière et gazière, tablent désormais sur un déficit de 2,7 millions de barils par jour par rapport à la demande au dernier trimestre de l'année.

Les mesures drastiques des Saoudiens et des Russes ont d'autant plus d'impact sur le marché qu'aucun producteur majeur n'apparaît en position de combler tout ou partie de ce déficit. "Le marché mondial, c'est à peu près 100 millions de barils/jour", rappelle sur franceinfo Philippe Chalmin, professeur d'histoire économique à l'université Paris-Dauphine.

Parce que la consommation est historiquement forte

Les décisions de Riyad et Moscou tombent mal, alors que la consommation mondiale n'a jamais été aussi élevée. "En 2023, le monde va consommer plus de pétrole qu'il n'en a jamais consommé dans toute l'histoire", avance ainsi Francis Perrin.

"On va battre le record [de consommation] de 2019. Cela a aussi un impact sur les prix du pétrole."

Francis Perrin, spécialiste des problématiques énergétiques

à franceinfo

L'amélioration de la situation économique explique aussi cette hausse des prix. "Quand l'économie mondiale va mieux, ça veut dire que le monde consomme plus de pétrole et cela pousse souvent les prix du pétrole à la hausse", analyse Francis Perrin. Invité de Télématin mercredi, il a estimé que "le seul moyen pour l'Etat" de faire baisser les prix était de "baisser les taxes". "Ce qu'il ne va pas faire. C'est peu probable que ça baisse tout de suite", a-t-il conclu.

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