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Quatre questions qui montrent que les illuminations de Noël ne sont pas un cadeau pour l'environnement

En pleine crise écologique, peut-on se payer le luxe d'avoir des Noël lumineux ? Alors que les technologies et les comportements évoluent vers plus d'écologie, franceinfo fait le point en quatre questions. 

Article rédigé par franceinfo - Alice Maruani
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 7min
Une maison illuminée pour Noël à Dalkey (Irlande), le 8 décembre 2015. (SIPANY / SIPA / SIPA USA)

Un coup d'œil à l'extérieur suffit pour s'en convaincre : les fêtes de fin d'année approchent. Votre voisin a sorti son père Noël en néons du meilleur goût, les centres-villes brillent déjà de mille feux et vous-même avez investi dans une nouvelle guirlande électrique pour lutter contre la déprime hivernale. Avec une pointe de scrupule néanmoins : les décorations lumineuses sont régulièrement critiquées pour leur impact environnemental. Faut-il abandonner la tradition pour sauver la planète (et votre facture d'électricité) ? Franceinfo fait le point en quatre questions.

Trois pauvres guirlandes et un père Noël, ça consomme tant que ça ?

Pensez global. Aux Etats-Unis, la consommation électrique des seules illuminations de Noël est plus importante que la consommation nationale d’électricité de l’Ethiopie ou du Salvador sur une année. C'est la conclusion, effrayante, du Center for Global Development, un think-tank dédié au développement international, tirée d'une étude (PDF en anglais) du département de l'Energie américain, publiée en 2008.

L'énergie dépensée – 6600 Gwh – pourrait faire tourner 14 millions de réfrigérateurs, précise le Center for Global Development. Pas étonnant quand on sait qu'Outre-Atlantique, les illuminations de fin d'année sont pour certains une religion, avec des particuliers qui transforment leur maison en annexe des Champs-Elysées. A Fort Lauderdale, en Floride, la famille Hyatt sort par exemple chaque année les grands moyens, avec plus de 200 000 loupiotes et une grande roue installée dans le jardin.

Mais en France aussi, la consommation électrique de ces décorations lumineuses est loin d'être anecdotique. En 2010, l'Ademe estimait la puissance nécessaire à 1 300 MW, soit environ la puissance d'une centrale nucléaire, précisait 20 minutes. Depuis, la tendance est à la baisse, souligne l'agence, notamment du côté des collectivités. Pour les particuliers, responsables de trois-quarts de cette consommation, les comportements changent aussi. Les concours d’illuminations sont la cible d'associations environnementales comme Greenpeace. Mais l'évolution est difficile à chiffrer, faute d’un rapport récent.

Tout ça, ça coûte cher ?

"Ça ne consomme pas tellement, la plupart des illuminations sont en LED car aujourd'hui, on ne trouve plus que ça", assurent à franceinfo les Baffert, une famille de Savoie, qui décorait chaque année ses 1 000 m2 de terrain de centaines de mètres de câbles et de 25 000 ampoules.

En 2013, l’Ademe a fait le calcul pour une maison "richement décorée". Quatre guirlandes à LED, une standard et quatre décors lumineux allumés quatre heures par nuit pendant un mois, c'est l’équivalent d’un mois et demi d’éclairage du logement, soit 39,7 kWh. Si vous oubliez de les éteindre et les laissez allumées dix nuits d'affilée, c'est l'équivalent de trois mois d'éclairage qui servent à illuminer l'esprit de Noël. Selon les prix moyens de l'électricité, il vous en coûtera entre 5 et 10 euros.

Ok, donc ça va, la planète va s'en remettre, non ?

Oui et non. Aux Etats-Unis, les illuminations, aussi exubérantes qu’elles soient, ne représentent "que" 0,2% de la consommation électrique totale du pays, note le Center for Global Development.

Dans l'Hexagone, ce n'est pas non plus un gouffre énergétique majeur. "Ce qui consomme le plus en hiver en France, c’est le chauffage électrique, dont on est très dépendant", explique à franceinfo Stephen Kerckhove, de l’ONG Agir pour l’environnement. Bref, on ferait mieux de changer nos radiateurs. Ou encore d’éteindre nos appareils en veille, qui mobilisent à eux seuls, toute l'année, la puissance de plus de deux réacteurs nucléaires.

Mais le problème des illuminations de Noël est qu’elles sont mises en place au pire moment. Celui où, les températures baissant, on doit surveiller de près notre dépense énergétique. "Le bilan carbone de l’énergie consommée en période de pointe est désastreux : chaque kwH équivaut à 500 g de CO2, soit quatre à cinq kilomètres parcourus en voiture, soit cinq fois plus que d'habitude", détaille Stephen Kerckhove. La France importe régulièrement, à cette période de l'année, de l’énergie venue d’Allemagne, qui est souvent de l’énergie fossile produite à partir de charbon ou de gaz. C’est d’autant plus vrai qu'"en ce moment, plus d’une dizaine de centrales nucléaires sont fermées pour maintenance", précise Stephen Kerckhove.

Le ministère de l’Environnement a d'ailleurs lancé une campagne en direction des particuliers le 18 novembre, les incitant à réduire leur consommation d’énergie. En somme, en hiver, chaque ampoule compte, ou presque.

Du coup, dois-je tout éteindre ? Noël va être un peu triste, quand même...

"On ne veut pas être des empêcheurs de faire la fête", explique Stephen Kerckhove. L’association ne préconise pas de passer Noël dans le noir, mais de limiter dans le temps l’utilisation des illuminations. "Il faudrait ne les allumer que pour Noël, pas de début novembre à début février", explique-t-il. L’Ademe, elle, recommande aux particuliers de ne pas oublier de les éteindre dans la journée, voire d’investir dans un minuteur. D’ailleurs, les collectivités aussi découplent de plus en plus les illuminations de l’éclairage public, pour ne pas les faire tourner toute la nuit. C’est le cas à Grenoble par exemple, qui allume ses guirlandes à la nuit tombée et les éteint en fin de soirée, vers minuit.

Le remplacement des anciennes guirlandes à ampoules incandescentes par de nouvelles, moins coûteuses en énergie, permet aussi de faire des économies considérables. L’Ademe conseille aux particuliers d’opter pour des guirlandes solaires. Ou, a minima, pour des ampoules basse consommation à LED. Les villes optent de plus en plus souvent pour ce genre de technologies. A Toulouse, Colmar, Nice ou Strasbourg notamment, le remplacement des ampoules standard par des LED il y a déjà plusieurs années a permis de faire baisser la facture énergétique de 50 à 80%, selon Le Monde. A Paris, la dépense énergétique sur les Champs-Elysées a diminué de 90% entre 2007 et aujourd'hui, indique la municipalité à franceinfo.

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