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Saint-Patrick : cinq choses que vous ignorez sans doute sur la bière

Pour la Saint-Patrick, fête du saint patron irlandais, la bière coulera à flots vendredi dans de nombreux bars du monde entier. Dans cette affaire, la science et l'histoire ont quelques mots à dire. Retenez-en cinq.
Article rédigé par franceinfo, Ludovic Pauchant
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Les Babyloniens, vers - 8000 avant JC, furent les premiers à brasser de la bière. (JACK ANDERSEN / DIGITAL VISION)

Les Patrick, certainement, n'en demandaient pas tant mais le 17 mars, c'est la Saint-Patrick. Et en plus des Patrick, des millions de jeunes et moins jeunes conflueront dans tout ce qui compte de pubs irlandais de Dublin et leurs inspirations plus ou moins réussies dans le monde entier. En l'honneur, donc, de Patrick, l'évangélisateur de l'Irlande, qui aurait expliqué le concept de la Sainte Trinité aux Irlandais grâce à un trèfle, devenu alors le symbole du pays. Il ne faut parfois pas grand chose.

>> Les origines de la Saint Patrick

Ce soir, la bière devrait couler à flots. Cette boisson alcoolisée à base d'eau, d'orge maltée, de levure et de houblon, victime elle aussi de l'inflation qui galope, est à consommer avec modération, mais derrière le mystère de ses bulles, se cachent quelques caractéristiques singulières à dégainer habilement avec une fausse réserve satisfaite lors d'une bruyante conversation de Saint-Patrick. Elles sont légion, mais en voici cinq, arbitrairement jugées suffisamment remarquables pour s'en souvenir.

1 Un peu de bière, c'est bon pour les reins (mais pas du tout pour le foie)

Si l’eau reste quand même la meilleure chose à absorber pour faire du bien à ses reins, quand elle est consommée avec modération (la bière, pas l'eau), la bière peut s’avérer utile pour le bon fonctionnement des reins. C’est ce qui ressort d’une étude finlandaise menée par le Dr Tero Hirvonen et publiée dans l'American Journal of Epidemiology, qui a mis en évidence le rôle des résines de houblon dans l’élimination des dépôts de calcium au niveau des reins, et donc dans la diminution des risques de calculs rénaux. La bière, diurétique bien connu, permet l’élimination des calculs plus facilement.

Attention, quand elle est consommée en excès, elle produit l’effet inverse, puisqu’elle est riche en acide urique : les calculs d’acide urique, qui représentent 5 à 10% des calculs rénaux, se forment lors d’une concentration anormalement élevée d’acide urique dans l’urine.

Et elle est, bien sûr, très mauvaise pour le foie : l'alcool qu'elle contient est absorbé quasi totalement par le tube digestif. Les reins en éliminent quelque 10%, via l'urine ou l'air expiré par les poumons. Le reste part vers le foie qui le dégradera ensuite par le biais de deux enzymes. En cas de consommation excessive, le foie est dépassé, et un dépôt de graisse se forme à l’intérieur des cellules hépatites. C'est la stéatose. Et si vous consommez encore, des cellules du foie sont détruites. L'autre conséquence d'une consommation de bière excessive est la cirrhose, provoquée par un stress inflammatoire qui empêche le bon fonctionnement du foie. La cirrhose est irréversible, chronique et mortelle.

2La bière est l’un des premiers aliments transformés par l’homme

La cervoise tiède d’Astérix peut aller se rhabiller, elle était presque ringarde, puisque l'on trouve des mentions de la bière dès le IVe millénaire avant J.-C. sur des tablettes d’argile en Mésopotamie. L’une des premières traces de son existence est ainsi retrouvée en Irak sur un sceau daté d’environ 3 800 avant J.-C., sur lequel figurent deux personnages buvant de la bière au moyen d’une paille.

Mieux encore, des traces de brassage de bière ont été mises en évidence sur le mont Carmel en Israël, il y a près de 13 000 ans. Plus loin dans le temps, le mot bière apparaît pour la première fois dans une ordonnance rendue le 1er avril 1435 par Jacques d'Estouville, alors prévôt de Paris, sous le règne de Charles VII, ordonnance qui réglemente le commerce des cervoises.

3C'est à une religieuse allemande que l'on doit l'ajout du houblon dans la bière

La bière, une affaire d'hommes ? Que nenni. C'est en grande partie grâce à une abbesse allemande du XIIe siècle que l'on doit l'ajout du houblon dans la cervoise pour en améliorer la conservation (une belle histoire teutonne à retrouver dans cet article). Parmi les plantes qui vont retenir l'attention d'Hildegarde de Bingen se trouve le houblon. Dans son encyclopédie du vivant, Physica, l'abbesse écrit que "l'amertume du houblon combat certaines fermentations nuisibles dans les boissons et permet de les conserver plus longtemps".

Hildegarde de Bingen n'est pas la première à avoir découvert les bienfaits des cônes verts du houblon. Selon plusieurs historiens, Pline l'Ancien avait déjà décrit au Ier siècle les vertus gustatives de la plante. Mais c'est bien l'abbesse allemande qui en a révélé – par écrit – les pouvoirs conservateurs et aseptisants. À cette époque, au XIIe siècle, la bière sert d'ailleurs à conserver l'eau.

4Ce n’est pas l’eau, mais surtout le houblon qui vous précipite aux toilettes

Après deux pintes, vous voilà précipités dans l’urgence aux toilettes, sourire crispé, jambes croisées, situation compliquée, côté cour au fond à droite du bar d'à côté ? C’est normal. Mais ce n’est pas à cause de l’eau. Enfin pas tout à fait. La bière donne envie d’uriner et la première raison tient à son principal composant (après l’eau), c’est-à-dire le houblon. Ce dernier, extrêmement diurétique (prosaïquement, cela donne envie d'uriner un peu plus que d'habitude), favorise l’élimination de l’eau par les reins et augmente la fréquence et la quantité des urines. Et donc vos allers et retours plus ou moins honteux aux tréfonds javelisés du bar.

Il n’est pas le seul responsable : l’alcool contenu dans la bière inhibe la production de vasopressine, l’hormone antidiurétique (celle qui vous donne la non-envie d'aller uriner, si vous avez bien suivi). Synthétisée par les neurones de l'hypothalamus, la vasopressine permet la réabsorption de l'eau par le corps : secrétée par l'hypothalamus, la vasopressine stockée dans l'hypophyse, une autre glande située dans le cerveau, est relâchée en cas de déshydratation. Pour faire simple, plus on boit d’alcool, moins on produit de vasopressine, et donc… plus on perd d’eau. C’est pour cette raison, la déshydratation, notamment, que la gueule de bois afflige le consommateur excessif de bière le lendemain.

5 Dans un demi, il y a jusqu'à deux millions de bulles

Le chiffre peut sembler hasardeux, et nous laisserons au lecteur le soin de patiemment recompter. Ou de se fier à la science : un verre de bière standard (un demi, donc, c'est-à-dire 25 cl) contient entre 200 000 et deux millions de bulles. Le nombre de bulles tient à l’interaction entre la concentration initiale de CO2 dissous dans le verre après avoir coulé, la concentration critique de CO2 dissous et le volume des bulles pendant qu’elles atteignent l’interface liquide/air.

Selon une étude publiée par la prestigieuse American Chemical Society, trois facteurs affectent principalement le nombre de bulles produites dans une bière versée dans un verre de 25 cl. On y trouve en premier plan la concentration en dioxyde de carbone dissous dans le verre, ensuite le volume des bulles et enfin le moment d’appauvrissement en CO2 de la bière, c'est-à-dire le moment où plus aucune bulle ne se forme.

Le lecteur avisé sur les boissons houblonnées tiquera, rétorquant que "ça dépend". Il a bien raison : certains paramètres favorisent l'apparition des bulles. Parmi eux, en premier lieu, les défauts microscopiques du verre qui accueille la boisson : quand les bulles s'accumulent autour de ces toutes petites crevasses, à peines plus grosses que 1,4 micromètre de large, le dioxyde de carbone dissout dans la bière forme des courants de bulles. En remontant à la surface, les bulles capturent du CO2 sur leur chemin. Et ça mousse.

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