Vrai ou faux Nucléaire, fiscalité, menus sans viande... On a vérifié les arguments de Yannick Jadot et Bruno Le Maire dans "Vous avez la parole"
L'eurodéputé écologiste et le ministre de l'Economie ont débattu, jeudi soir, sur le plateau de l'émission de France 2.
Le débat a parfois été cacophonique. Yannick Jadot, eurodéputé Europe Ecologie-Les Verts, et Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, étaient face à face, jeudi 15 avril, sur le plateau de "Vous avez la parole" sur France 2. Franceinfo a vérifié certains des arguments qu'ils ont avancés.
"Jamais les écologistes n'ont dit : 'On va interdire le Tour de France'" : à nuancer
Sur le plateau de France 2, Yannick Jadot a pris, face à Bruno Le Maire, la défense de maires écologistes en proie aux critiques. L'eurodéputé est revenu sur l'une des nombreuses polémiques ayant émaillé leurs débuts de mandat. En septembre 2020, le maire EELV de Lyon, Grégory Doucet, a été à l'origine d'une controverse sur le Tour de France. Il a qualifié la Grande Boucle de course "machiste et polluante" dans les colonnes du quotidien régional Le Progrès.
"Combien de véhicules à moteur thermique circulent pour faire courir ces coureurs à vélo ? Combien de déchets engendrés ?", avait-il demandé. Et d'ajouter qu'il n'était "plus acceptable d'avoir des grandes manifestations sportives dont la priorité n'est pas de se poser la question de leur empreinte". Mais à aucun moment, Grégory Doucet n'a appelé à interdire la course.
Quand il était maire de Lyon, Gérard Collomb avait mis en place un menu sans viande : vrai
Interpellé par Bruno Le Maire sur l'instauration, en février, de menus sans viande dans les cantines scolaires de Lyon, Yannick Jadot a défendu l'édile écologiste Grégory Doucet. "Il a mis en place le même menu qu'avait mis en place Gérard Collomb", l'ancien maire de Lyon, a affirmé l'eurodéputé. C'est exact. La mesure avait en effet été prise en mai 2020 par l'ex-maire de Lyon, soutien d'Emmanuel Macron, au sortir du premier confinement, comme le rapportait France 3 Auvergne-Rhône-Alpes en mai 2020, et comme l'avait expliqué 20 Minutes.
>> Menu sans viande dans les cantines scolaires : la polémique en cinq actes
L'objectif de ce menu unique sans viande était de fluidifier la circulation des élèves pour diminuer les risques de contamination au Covid-19, selon l'élu lyonnais. "Cette mesure de menu unique est prise pour des raisons sanitaires", s'était défendu Grégory Doucet, alors que ses opposants condamnaient une décision prise pour des raisons idéologiques.
Les menus sans viande à la cantine n'auraient pas d'impact sur les émissions de CO2 : faux
Toujours à propos des menus sans viande dans les cantines scolaires, Bruno Le Maire a déclaré : "Je ne vois pas en quoi interdire la viande dans les cantines scolaires pour faire uniquement des menus végétariens peut améliorer l'environnement et réduire les émissions de CO2."
Pourtant, l'impact des menus végétariens a été chiffré par l'organisation Greenpeace. Si 50% des élèves français choisissaient des menus sans viande à la cantine, les émissions de gaz à effet de serre liées à la restauration scolaire diminueraient de 28 à 38%, révèle une étude de Greenpeace parue en 2020 (PDF).
"Nous avons triplé les achats de véhicules électriques en France", affirme Bruno Le Maire : vrai
Pour être exact, en 2020, la part des voitures hybrides et électriques neuves vendues en France a quasiment triplé par rapport à 2019. Ces ventes ont été stimulées par des aides gouvernementales à l'achat et le développement des gammes des constructeurs français. Les consommateurs à la recherche d'un coût d'utilisation plus faible se sont en partie reportés en 2020 sur les motorisations hybrides (essence-électricité), rechargeables ou non sur secteur, et les voitures 100% électriques. En 2020, près de 111 000 nouvelles voitures "zéro émission" sont arrivées sur les routes françaises, contre environ 43 000 l'année précédente.
Le nucléaire "coûte deux fois plus cher que les énergies renouvelables", selon Yannick Jadot : à nuancer
Selon des chiffres publiés en septembre 2019 par le World Nuclear Industry Status Report (WNISR), réputé proche des antinucléaires, le nucléaire est plus onéreux que les énergies renouvelables. Le coût de production du nucléaire varie entre 112 et 189 dollars (entre 93 et 157 euros) le mégawattheure, contre 36 à 44 dollars (entre 30 et 36 euros) pour l'énergie solaire et 29 à 56 dollars (entre 24 et 46 euros) pour l'énergie éolienne, d'après les données rapportées par le quotidien économique Les Echos.
Mais ces chiffres sont à manier avec précaution. L'Agence internationale de l'énergie (AIE), organisation internationale liée à l'OCDE, a expliqué dans un rapport (en anglais), de décembre 2020, que le prix du nucléaire allait rester compétitif dans le future, malgré une baisse des prix des énergies renouvelables.
Calculer le coût des différentes énergies s'avère délicat. L'indicateur souvent utilisé est appelé en anglais LCOE, et désigne le coût moyen de l'électricité par technologie. Mais RTE et l'AIE estiment dans un rapport (PDF), publié en janvier, que cet indicateur présente des limites, car il ne tient "pas compte des coûts environnants pour assurer la sécurité d’alimentation et les autres exigences techniques". Or, préviennent-ils, "tout chiffrage économique devra ainsi prendre en compte l'ensemble des coûts associés à une part élevée d'énergies renouvelables, dont ceux liés au stockage, à la flexibilité de la demande et au développement des réseaux".
"Nous avons déjà le niveau d'imposition le plus élevé de tous les pays développés", selon Bruno Le Maire : inexact
Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la France se situe sur la deuxième marche du podium en matière de pression fiscale. En 2019, les recettes fiscales, c'est-à-dire celles provenant des impôts et taxes, représentaient 45,4% du PIB français, derrière le Danemark (46,3% du PIB danois). Des parts bien au-dessus cependant de la moyenne des pays de l'OCDE, située à 33,8% du PIB.
"90% des investissements énergétiques dans le monde sont dans les énergies renouvelables", d'après Yannick Jadot : vrai
Outre cette affirmation, l'eurodéputé a ajouté que "300 milliards de dollars d'investissements dans le monde" étaient tournés vers les énergies renouvelables. L'Agence internationale de l'énergie (en anglais) le confirme : ce sont bien 308 milliards de dollars qui ont été investis dans les énergies renouvelables au niveau mondial en 2020, d'après le dernier rapport "World Energy Investment" de l'organisation (en anglais).
Edit : La réponse sur le coût du nucléaire a été modifiée en mentionnant l'étude de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) sur les projections des coûts de production de l'électricité mais aussi le rapport que cette dernière a publié en janvier avec RTE sur les "conditions et prérequis en matière de faisabilité technique pour un système électrique avec une forte proportion d’énergies renouvelables à l’horizon 2050".
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