Cattenom, Bugey, Fessenheim : pourquoi nos voisins européens détestent ces centrales nucléaires ?
Des pays frontaliers ne voient pas d'un bon œil la volonté de la France de prolonger la durée de vie des centrales nucléaires proches des frontières de l'Allemagne, du Luxembourg et de la Suisse.
La centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin) sera-t-elle fermée dès 2016, comme l'a assuré l'écologiste et nouvelle ministre du Logement, Emmanuelle Cosse ? Pas exactement, a rétorqué Ségolène Royal, lundi 7 mars. La ministre de l'Environnement et de l'Energie a précisé que c'est la procédure de fermeture de la centrale qui est enclenchée dès 2016. La fermeture sera, elle, effective en 2018. Quelques jours avant, Ségolène Royal avait donné son feu vert pour un allongement de quarante à cinquante ans de la durée de vie des centrales, des délais qui ne satisfont pas tout le monde. Trois centrales nucléaires sont dans le collimateur de nos voisins européens. Voici pourquoi.
L'Allemagne réclame la fermeture de Fessenheim
L'Allemagne a réitéré, vendredi 4 mars, son souhait de voir fermer la centrale nucléaire française de Fessenheim, mise en service en 1977, située à proximité de la frontière avec l'Allemagne et la Suisse. Elle devrait être "débranchée", a déclaré la ministre allemande de l'Environnement Barbara Hendricks.
Ses raisons. Deux médias allemands affirment qu'un incident survenu le 9 avril 2014 dans la centrale a été plus grave qu'annoncé par les autorités françaises. D'après le quotidien Süddeutsche Zeitung (en allemand) et la chaîne locale WDR (en allemand), un des deux réacteurs serait devenu "momentanément incontrôlable". Les deux médias évoquent "une suite d'échecs techniques et de chaos".
Pour Barbara Hendricks, cet incident "montre" que la demande allemande de "débrancher Fessenheim" est "justifiée". "Pour nous, des réacteurs aussi vieux constituent un risque sécuritaire", a précisé un porte-parole de la ministre.
Genève veut obtenir la fermeture de la centrale du Bugey
La ville et le canton de Genève se sont lancés dans une "bataille juridique et politique" de grande ampleur contre la centrale nucléaire française du Bugey (Ain), construite dans les années 1970 et située à quelque 70 km de la ville suisse. Les autorités genevoises ont porté plainte contre X pour mise en danger de la vie d'autrui et pollution des eaux, lundi 7 mars.
Leurs raisons. Pour Corinne Lepage, ancienne ministre française de l'Environnement et avocate des plaignants, l'installation se trouve en zone sismique et inondable. "Il existe des dysfonctionnements croissants", a-t-elle affirmé lors d'une conférence de presse, lundi, en citant des fuites de tritium constatées en 2012, 2013 et 2015 par l'Autorité de sûreté nucléaire.
Elle a également relevé que le radier (le soubassement de la centrale qui doit protéger la nappe phréatique en cas d'accident) "souffre d'un problème d'étanchéité". Sa réparation coûterait trop cher pour EDF, l'exploitant de l'installation, en proie actuellement à des difficultés financières, a-t-elle ajouté.
Le Luxembourg demande un avis sur la centrale de Cattenom
Les Verts allemands, dans l'opposition au niveau fédéral mais au pouvoir dans deux Etats régionaux limitrophes de l'Alsace, ont rendu publiques, mercredi 2 mars, les conclusions d'un rapport qu'ils ont commandé sur la centrale de Cattenom, en Moselle. Le Luxembourg, voisin de la Moselle, va transmettre cette étude à la Commission européenne "pour avis" et étudie par ailleurs "toutes les possibilités juridiques à [sa] disposition concernant la centrale de Cattenom".
Ses raisons. Selon l'étude des Verts allemands, plusieurs équipements techniques de sécurité de Cattenom "ne fonctionnent pas indépendamment les uns des autres", contrairement à ce qui devrait se passer. "Il y a un risque qu'en cas de problèmes, non pas seulement une installation, mais plusieurs, tombent en panne en même temps", soulignent les Verts. Ils réclament "la fermeture immédiate" d'une centrale qu'ils comparent à "une voiture dont les freins ne fonctionneraient pas".
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