Levée de boucliers contre un projet de décret pour filtrer internet
Dans une interview sur France Inter cette semaine, Eric Besson a affirmé qu’il était“ très attaché à la liberté de l'Internet”.
Pourtant, selon un projet de décret gouvernemental, les autorités administratives pourront, de leur propre chef mettre en demeure l'éditeur d'un site, l'hébergeur ou le cas échéant les fournisseurs d'accès internet, de faire cesser toute “activité” comportant à leurs yeux un “risque sérieux et grave d'atteinte à l'ordre public ”.
Si ce décret était validé, le gouvernement pourrait donc faire bloquer les sites qui “dérangent” sans passer une décision de justice.
Pour les internautes, ce décret donnerait au gouvernement un pouvoir de censure arbitraire de tous les contenus et services sur le web.
Ce texte qui pose problème émane du ministère de l'Economie numérique. Il doit permettre l'application de l'article 18 de la loi sur la Confiance dans l'économie numérique (LCEN), votée en 2004.
La France sous surveillance
Saisi de ce projet le 12 juin, le Conseil national du numérique (CNN) mis en place le mois dernier par l'Elysée a publié en début de semaine un avis négatif estimant que “toute mesure de blocage ne peut intervenir qu'au terme d'un débat contradictoire sous l'appréciation et le contrôle préalable du juge”.
Les députées Corinne Erhel (PS) et l’UMP Laure de La Raudière qui ont remis en avril un rapport parlementaire sur la neutralité de l'internet et des réseaux avaient notamment demandé à ce que l’on encadre “strictement les obligations de blocage de l’Internet”.
_ “Je suis défavorable à toute mesure qui mette en place des obligations de filtrage ou de blocage sur internet sans passer par un juge”, précise Laure de La Raudière.
Selon Jérémie Zimmermann de l’association La Quadrature du net qui veille aux libertés sur le web, “le projet de décret vise à donner au gouvernement un pouvoir de censure sur tous les sites et contenus du Net qui serait totalement disproportionné”.
Déjà à plusieurs reprises, l’association Reporters sans frontières est montée au créneau pour dénoncer les projets français de blocage des contenus sur le web.
Même si la France n’est pas la Libye ou encore de la Russie,
notre pays fait une entrée remarquée dans la liste des pays placés “sous surveillance” en matière de liberté d'expression sur internet. RSF fustige notamment des“ législations inquiétantes”.
Des craintes qui avaient déjà été formulées lors d’une enquête sur le filtrage du web diffusée sur France Info en octobre dernier.
Mikaël Roparz, avec agences
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