Les politiques et la sidérurgie lorraine, des espoirs souvent déçus
"Je ne vous laisserai pas tomber" . Le 4 février 2008, Nicolas Sarkozy faisait une visite expresse à Gandrange, à l'invitation des salariés en grève. Jeune marié, depuis deux jours - "Gandrange comme voyage de noces y'a pas mieux" - il leur faisait cette promesse.
"L'Etat préfère investir pour moderniser le site plutôt que payer de l'argent pour accompagner des gens soit en préretraite, soit au chômage", ajoutait-il. "Je suis donc venu vous dire - et ce que je dis avec Xavier Bertrand ça vaut pour M. Mittal, propriétaire, ou pour quelque propriétaire alternatif que ce soit - que nous sommes prêts à mettre de l'argent pour faire les investissements qui auraient dû être faits depuis longtemps sur le site et qui n'ont pas été faits." Deux mois plus tard, Gandrange fermait. 571 emplois étaient supprimés.
"Je ne veux pas être élu sur une promesse, et ne pas revenir parce qu'elle n'aurait pas été tenue" (F. Hollande)
Depuis, le syndrome Gandrange hante les esprits des politiques. Aussi, quand ArcelorMittal ferme les deux derniers hauts-fourneaux encore en activité quelques kilomèytres plus loin, à Florange, en juin et octobre 2011, c'est le branle-bas de combat. D'autant que la campagne présidentielle bat son plein.
"Je ne veux pas que Florange meure. Bien sûr il y a la crise, moins de demande d'acier, mais on fera tout pour que Florange rouvre," promet encore Nicolas Sarkozy en février 2012. A distance : il ne met plus les pieds en Lorraine depuis Gandrange.
François Hollande, lui, multiplie les visites. "J'étais déjà venu à Gandrange pour rappeler les promesses qui n'avaient pas été honorées. Je ne veux pas me retrouver dans la même situation : être élu sur une promesse et ensuite ne pas revenir parce qu'elle n'aurait pas été tenue." Tout juste se hasarde-t-il à promettre une loi contre les fermetures d'usines rentables.
Un redémarrage... qui n'arrive pas
En mars, coup de théâtre : Nicolas Sarkozy annonce le rédémarrage du deuxième haut-fourneau de Florange au second semestre, et parle d'un investissement par ArcelorMittal de 17 millions d'euros.
Quelques heures plus tard, le groupe nuance l'annonce : oui, il investira bien cette somme, mais non, la réouverture n'est pas gagnée. Car, sur les 17 millions, 8 serviront à moderniser la ligne de finition des produits automobiles, 7 seront consacrés à la modernisation de la cokerie ; il n'en reste que 2 pour "maintenir les hauts-fourneaux en l'état" , selon la direction d'ArcelorMittal.
Les salariés se sentent à nouveau trahis. Et décident de monter à Paris, à pied. "Après la présidentielle, il sera trop tard, tout le monde nous aura oubliés" , pronostique le délégué CFDT, Edouard Martin.
Un pronostic qui ne s'est pas totalement vérifié : après les élections, le gouvernement lance une mission d'expertise sur l'avenir industriel de Florange. Le rapport est rendu fin juillet, au coeur de l'été. Et juge que le site est "viable, fiable et rentable" .
Il faut dire que l'enjeu est d'importance : Florange, c'est 2.800 salariés, plus 400 intérimaires, une filière qui fait vivre plus de 150 sous-traitants ; 5.000 emplois à la clé.
L'avenir passerait par le projet Ulcos - Ultra Low CO² Steelmaking - un plan de 650 millions d'euros. L'Etat s'est engagé à en verser 150, les collectivités locales 30, ArcelorMittal 200. Pour boucler le budget, il faudra l'aide de la Commission européenne. Verdict d'ici la fin de l'année.
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