Cet article date de plus de treize ans.

La prison de Nouméa à la limite du bagne, selon le contrôleur des prisons

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), Jean-Marie Delarue, a tiré la sonnette d'alarme sur la prison de Nouméa. Il a pour cela utilisé pour la première fois une procédure d'urgence. Le contrôleur décrit des conditions de vie "répugnantes".
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Camp Est : à lui seul, le nom de la prison de Nouméa évoque son lourd
passé pénitentiaire. Avec la Guyane, la Nouvelle-Calédonie a longtemps
été le bagne de la République. Et à la lecture des recommandations
publiées par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté
(CGLPL), il semble que les temps n'aient pas beaucoup changé, du moins
au niveau des conditions de vie des détenus.

300% de
sur-occupation

Lors de leur visite inopinée en
octobre, les quatre contrôleurs ont constaté une sur-occupation de 200%
dans le centre de détention et de 300% à la maison d'arrêt, qui héberge
les détentions provisoires et les courtes peines. Au total, 438 étaient
écrouées à Camp Est pour une capacité de 218 places.

Ecoeurés, ils
se sont retrouvés face à six détenus dans des cellules de 12 m2, avec
des matelas posés à-même le sol crasseux, où circulent des rats et des
cafards. Des wc à la turque à peine isolés par des rideaux empestent
l'atmosphère car les remontées d'égouts sont fréquentes. La chaleur dans
les cellules est étouffante. Il faut dire que les aérations ont été
bouchées pour empêcher les rongeurs de rentrer, ce qui, en plus, ne
semble pas efficace. Les ventilateurs sont hors d'état. Seule solution
pour rafraichir les cellules : les inonder, sans tenir compte du réseau
électrique défectueux, avec des fils dénudés pendant des murs.

"les
cellules dans un état répugnant
" (rapport des contrôleurs des
prisons)

La description contenue dans les
recommandations ramène plus d'un siècle en arrière. Le pire est atteint
dans le quartier disciplinaire : les cellules "sont dans un état
répugnant
", écrit le contrôleur. Un angle, occupé par un coin
toilettes, est couvert de traces d'humidité et d'excréments.

Malgré
le dévouement du personnel que note le médiateur, quasiment aucune
activité n'est proposée aux détenus, qui n'ont pas de télévision, ni
même d'accès au téléphone. Le terrain de sport est impraticable et les
promenades réduites à moins d'une heure par demi-journée. L'organisation
des parloirs est indigente et certains proches repartent sans avoir vu
le détenu, malgré les immenses distances de ce morceau de France en
plein océan Pacifique.

La réhabilitation bloquée...
pour une histoire de permis de construire

Au vu
de cette "violation grave des droits fondamentaux ", le contrôleur
des prisons a utilisé une procédure d'urgence jamais mise en oeuvre
jusqu'ici pour saisir le ministère de la Justice. Lequel répond que 10
millions d'euros de travaux ont été engagés en 10 ans sur Camp Est et
qu'un litige avec la mairie de Nouméa bloque le permis de construire du
projet de réhabilitation. D'autres sites sont envisagés, mais le
contrôleur plaide pour une reconstruction sur place, le plus rapidement
possible.

 

 

 

 


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