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Justice : et si la France permettait de rejuger un acquitté

Un projet de loi pour rendre la révision des procédures judiciaires plus faciles est discuté à l'Assemblée nationale ce jeudi. Elle pourrait permettre de saisir la cour de révision dès qu'un élément fait "naître le moindre doute" et non plus sur le fondement "d'un nouveau fait". Ce texte fait consensus, ce qui le fait moins, c'est un amendement qui propose de rejuger un acquitté.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
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  (Maxppp)

Simplifier la
procédure de révision. L'objectif du projet de loi discuté ce jeudi à l'Assemblée
nationale. Un projet qui fait consensus dans les rangs de la majorité et de
l'opposition. Il est porté par deux hommes que tout oppose : le député radical
de gauche du Calvados, Alain Tourret, avocat de profession, et Georges Fenech, député UMP du Rhône, magistrat.

L'objectif est,
disent-ils, de "lever les obstacles
à la révision
". Avec ce projet de loi, la cour de révision pourrait
être saisie dès qu'un élément fera "naitre
le moindre doute
", et non plus sur le fondement "d'un fait nouveau ". 

Acquitté mais
pas à vie

Si ce texte fait
consensus, un amendement de Georges Fenech fait lui plus débat : ouvrir la voie
à la révision, même après un acquittement. Rejuger un acquitté, c'est aujourd'hui
impossible en France. Ce qui a relancé le débat, c'est le rebondissement fin
janvier dans l'affaire Nelly Haderer. 27 ans après le meurtre de la jeune femme
à Nancy, des traces ADN ont pu être retrouvées et exploitéesà partir d'un
échantillon de sang, prélevé sur le jean de la victime. Ce sont celles
de Jacques Maire, qui a été acquitté en 2008 dans cette affaire. La loi en
l'état empêche donc de le rejuger. Il clame toujours son innocence.

L'amendement de
Georges Fenech ne va pas jusqu'à autoriser la révision d'un acquittement, mais doit permettre à la justice d'ouvrir une nouvelle enquête en cas d'élément nouveau
et saisir un juge d'instruction "indispensable ", estime le député "quand
on voit les progrès de l'ADN, mais aussi de l'analyse des odeurs, des voix, des
écritures
".

"Cette
réforme permettra de mieux reconnaître les erreurs judiciaires"(Georges
Fenech sur France Info)

L'idée ne plait
pas à tout le monde, politiques comme avocats ou magistrats, car pour beaucoup, ce
serait remettre en cause tout l'édifice juridique. Même si cette loi "part
d'un très bon sentiment
", estime l'avocat au Conseil d'Etat, Patrice Spinosi sur France Info, il pense que l'amendement sur la possibilité de remettre en
cause un acquittement doit être bien discuté. "Moi je suis fondamentalement
contre
", explique-t-il car, "le principe de la révision a toujours
été pensée comme étant une faveur faite à une personne qui avait été condamnée à
tort
".

"C'est
extrêmement dangereux" (Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'Etat sur France Info)

En Angleterre,
il est possible de rejuger une fois un acquitté, mais le système anglo-saxon
est totalement différent du nôtre, c'est un système accusatoire, où l'avocat
peut enquêter avec les mêmes moyens que la police, sans passer par le juge
d'instruction.

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