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Vidéo Naufrage du "Bugaled Breizh" : de l'hypothèse du sous-marin à celle de la "croche molle", et de l'espoir à la colère pour les familles

Publié Mis à jour
Durée de la vidéo : 4 min
Affaires sensibles. Naufrage du "Bugaled Breizh" : de l'hypothèse du sous-marin à celle de la "croche molle", et de l'espoir à la colère pour les familles (Affaires sensibles / France 2)
Article rédigé par France 2
France Télévisions

Ce drame survenu le 15 janvier 2004, emportant cinq marins de Loctudy, a ému bien au-delà de la Bretagne. Inexpliqué à ce jour, le naufrage du "Bugaled Breizh" est devenu un "cold case", une affaire non résolue sur laquelle se penche "Affaires sensibles" le 4 avril 2022. Avec des témoignages de marins pêcheurs, de proches des disparus, de connaisseurs du dossier, le magazine déroule le fil d'une enquête à rebondissements. Ou plutôt, dans cet extrait, des câbles appelés funes... 

Le 15 janvier 2004 à 12h35, un solide chalutier breton, le Bugaled Breizh, coulait brusquement au large du cap Lizard, au sud de l'Angleterre, emportant la vie de cinq marins pêcheurs expérimentés. Que s'est-il passé ? La piste d'un cargo voyou, qui aurait pris la fuite après un abordage brutal, supplante un temps l'hypothèse d'un accrochage avec un sous-marin, très vite envisagée par les familles des disparus. Cette dernière éventualité refait surface lorsque l'enquête s'oriente vers un sous-marin néerlandais présent sur la zone. Finalement, les deux suspects sont rapidement innocentés...

Des experts indépendants font renaître la thèse du sous-marin

Deux ans après le naufrage, deux experts indépendants sont missionnés par les juges d'instruction. Leurs conclusions font renaître la thèse du sous-marin – et les espoirs des familles, qui ont toujours défendu cette version. Selon les experts, en effet, seule une force exogène, c'est-à-dire extérieure au chalutier, a pu entraîner un naufrage aussi rapide (en moins d'une minute). "La seule explication du naufrage est que quelque chose a tiré sur un des câbles qui reliait le Bugaled Breizh à son chalut, résume Dominique Tricaud, l'un des avocats des familles. Evidemment, on pense à un sous-marin."

"C'est soit une très grosse baleine, soit un sous-marin. Et ceux qui veulent croire à la baleine, eh bien, ils aiment les animaux, c'est magnifique !"

Thierry Lemétayer, fils du mécanicien disparu sur le "Bugaled Breizh"

dans "Affaires sensibles"

C'est la première fois que des experts accréditent la thèse des familles : dans ce scénario, un sous-marin aurait accroché le câble bâbord du Bugaled Breizh avec son safran arrière. Il aurait ensuite entraîné ce câble en acier, appelé "fune", sur des dizaines de mètres, avant de s'en dégager et de poursuivre sa route. Des traces de frottement ont d'ailleurs été constatées sur cette fune bâbord. Autre élément très important, souligne Pascal Bodéré, journaliste du Télégramme spécialiste du dossier, cette fune bâbord a été retrouvée déroulée de 150 mètres de plus que la fune tribord. "Comme la fune ne peut pas casser, explique-t-il, c'est le bateau qui part au fond avec le sous-marin…"

Les familles retrouvent l'espoir : enfin, l'enquête semble s'orienter vers ce qu'ils soupçonnent dès le début.

"Moi, je me dis qu'il y a un travail qui est fait vers la vérité. Et je vois des gens courageux, qui démontrent techniquement que ce bateau n'a pas pu couler tout seul. Ce bateau n'a pas pu couler tout seul !"

Thierry Lemétayer

dans "Affaires sensibles"

Pourtant, un an et demi plus tard, leurs espérances sont douchées par un autre rapport : celui du Bureau d'enquêtes sur les événements de mer, le BEA mer. Cet organe administratif, rattaché au ministère des Transports, enquêtait en parallèle de la justice. Et il a une lecture radicalement différente des premiers experts.

Un rapport du BEA mer penche pour un accident de pêche

Selon le BEA mer, le chalut du Bugaled Breizh aurait accroché une dune de sable au fond de l'eau. Le non-respect des règles de sécurité et les conditions météo auraient fait le reste... et causé le naufrage. Les pêcheurs appellent ce type d'accident une "croche molle".

Sauf que dans le cas du Bugaled, "sur un sol de sable parfaitement plat (...) ? personne n'y croit", résume l'avocat de Thierry Lemétayer. Ni l'armateur du bateau, sûr de son équipage et de ses compétences – qui lui auraient permis de s'en sortir, affirme-t-il –, ni les marins pêcheurs et leurs familles, consternés par une telle conclusion.  

"Tous les bateaux du coin, là, et d'ailleurs, qui travaillent dans les dunes de sable tous les jours… eh ben, il faut qu'ils rentrent vite au port… parce qu'ils sont en danger, les mecs ! Faut arrêter les conneries ! 'Croche molle'..."

Frédéric Stéphan, second sur "L'Eridan"

dans "Affaires sensibles"

Convaincues que l'Etat français veut étouffer l'affaire, les parties civiles laissent éclater leur colère. Dans un premier temps, les juges d'instruction ne vont pas suivre les conclusions du BEA mer : ils continuent à creuser la piste du sous-marin. Mais leur enquête va se heurter à un double obstacle : elle est internationale, et elle touche au secret Défense...

Extrait de "Bugaled Breizh : un naufrage en eaux troubles", une enquête à voir le 4 avril 2022 dans "Affaires sensibles", un magazine présenté par Fabrice Drouelle et coproduit par France Télévisions, France Inter et l’INA d'après l'émission originale de France Inter.

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