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Inhumation d'un bébé rom : le maire pouvait-il refuser ?

Le refus de la municipalité fait polémique d'un point de vue éthique et humain. Mais le fait que le maire de Champlan (Essonne) n'ait pas accepté d'inhumer le nourrisson n'est pas forcément hors la loi.

Article rédigé par franceinfo
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Le cimetière de Champlan (Essonne), le 4 janvier 2015.  (KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

Devenu en deux jours un symbole des discriminations jusque dans la mort, le bébé rom décédé dans l'Essonne au lendemain de Noël a été inhumé lundi 5 janvier dans une commune voisine de Champlan, à Wissous. Le maire de Champlan, Christian Leclerc, est accusé d'avoir refusé d'accueillir, dans son cimetière, le corps de Maria Francesca, une petite fille de deux mois et demi, victime d'une mort subite du nourrisson.

Une version contestée par l'élu. Selon Le Parisien, le maire avait pourtant fait valoir le "peu de places disponibles"  pour les inhumations et il avait souhaité donner la priorité "à ceux qui paient leurs impôts locaux". Si ce refus fait polémique d'un point de vue éthique et humain, le fait que la mairie de Champlan n'ait pas accepté l'inhumation du bébé rom dans le cimetière communal n'est pas forcément hors la loi. Explications.

Que dit la loi ?

Selon le Code général des collectivités territoriales qui régit les inhumations, la famille du défunt a trois possibilités. Elle peut choisir de l'enterrer dans la commune où il réside. Elle peut aussi opter pour celle où il est mort. Enfin, elle peut inhumer son défunt dans la commune où existe déjà un caveau de famille. "Si aucun de ces trois critères n'est respecté, le maire peut refuser la demande d'inhumation", explique Victor Lima, avocat au barreau de Toulouse, au Figaro.fr.

Le maire de Champlan pouvait-il refuser ? 

Le cas de Maria Francesca est singulier. Les familles roms qui vivent dans le bidonville de Champlan sont officiellement domiciliées auprès du Secours catholique des Ulis (Essonne), selon l'association de solidarité en Essonne avec les familles roumaines et roms (ASEFRR), citée par L'Express.fr. Le décès de la petite fille a été constaté à hôpital de Corbeil-Essonnes.

La subtilité réside donc dans la différence entre la domiciliation du défunt et son lieu de vie réel. Selon Victor Lima, l'argument du lieu de domiciliation ne tient pas. "La domiciliation n'est qu'une boîte postale où l'on va chercher son courrier. Ce qui compte, c'est le lieu de vie, là où l'on vit physiquement", précise l'avocat. Pour Victor Lima, "juridiquement", le maire de Champlan "ne pouvait pas s'opposer [à l'inhumation], il a donc commis un abus".  

"Et même si la famille vit dans un bidonville et qu'elle ne paie pas d'impôts locaux, elle a le droit de faire inhumer son enfant à Champlan ! Pourquoi ? Parce qu'elle a un lien avec cette commune : leur vie privée et familiale est dans cette commune, les enfants de cette famille y sont même scolarisés", ajoute Victor Lima. Mais cet argument devrait être apprécié par la justice. "Sur le plan moral, c’est absolument contestable, mais sur le plan juridique, on ne pourra pas faire grand-chose", estime d'ailleurs Loïc Gandais, président de l’ASEFRR. 

Quid des frais à engager ? "Lorsqu'une famille est dépourvue de ressources, c'est à la commune de prendre l'enterrement en charge", indique aussi Cécile Rocca, coordinatrice du collectif Les morts de la rue, à L'Express.fr. Mais, dans le cas de Maria Francesca, l’ASEFRR prendra en charge les frais d’obsèques, la famille ayant financé l’achat du cercueil.

Quels sont les recours possibles pour la famille ?

Les parents de la petite fille peuvent "saisir le tribunal administratif en référé et faire un recours pour excès de pouvoir, afin de faire annuler la décision du maire. Ils peuvent également saisir le préfet qui vient se substituer au maire en cas de défaillance", estime l'avocat Victor Lima. Mais ils ne semblent pas en avoir l'intention. "Saisir la justice nécessiterait d'attendre de longs mois avant d'obtenir une décision", regrette le président de l'ASEFRR auprès de 20 minutes.

Reste que le Défenseur des droits, Jacques Toubon, "bouleversé", a annoncé qu'il se saisissait "d'office" et lançait dès lundi des "investigations". Il pourrait "recommander à l'administration de prendre des sanctions contre une personne physique ou morale, publique ou privée, soumise à autorisation ou agrément administratifs, qui serait à l'origine d'une discrimination", selon Metronews, qui précise que le Défenseur des droits dispose de plusieurs "solutions contraignantes".  

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