Définition pénale du viol : "On va demander à l'auteur" de s'expliquer et pas à la victime de le démontrer, souligne une professeure de droit
Le mois dernier, la France faisait partie de la douzaine d'États membres de l'Union à s'opposer pour des raisons juridiques à une définition européenne du viol fondée sur l'absence de consentement. Le 8 mars dernier, lors de la cérémonie de scellement dans la Constitution de la "liberté garantie" de recourir à l'avortement, c'est donc à la surprise générale qu'Emmanuel Macron a fait savoir à l'association féministe Choisir la cause des femmes son intention d'inscrire cette même notion dans le droit français.
C'est bien plus qu'un simple changement de vocabulaire, car le viol est à l'heure actuelle uniquement défini par le comportement de l'auteur. Selon l'article 222-23 du code pénal, le viol correspond à "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise". "La difficulté, explique Audrey Darsonville, professeure de droit pénal à Paris-Nanterre, c'est que si on ne peut pas démontrer un de ces quatre modes opératoires, le viol ne peut pas être démontré".
Une notion déjà adoptée dans plusieurs pays d'Europe
L'introduction du terme de "consentement" permettrait donc d'inverser l'approche de l'enquête à mener. "Qu'elle ne soit pas une enquête dans laquelle on va demander à la victime la démonstration que l'auteur a utilisé les quatre modèles [violence, contrainte, menace ou surprise]. On va demander à l'auteur : s'est-il intéressé au consentement du partenaire ?" précise-t-elle.
Plusieurs pays d'Europe (Espagne, Allemagne) ont déjà adopté cette définition du viol, comme un "rapport sexuel non consenti". En France, une mission parlementaire étudie justement la question ces jours-ci. Deux propositions de loi ont déjà été déposées à l'Assemblée nationale (par la députée de La France insoumise Sarah Legrain) et au Sénat (par la sénatrice écologiste Mélanie Vogel).
L'exécutif, lui, se montrait jusqu'ici très prudent. Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti pointait, lors d'une audition au Sénat le 1er février, un risque de "contractualisation des relations sexuelles".
Emmanuel Macron a donc évolué sur le sujet, mais sans fixer de calendrier. D'où la prudence de l'association Choisir la cause des femmes. Sur franceinfo le 13 mars, sa secrétaire générale Maria Cornaz Bassoli dit espérer "que ça sera plus qu'un effet d'annonce".
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