"Les agents nous ont dit qu'ils ne faisaient qu'appliquer la loi" : des femmes verbalisées après avoir collé des messages pour dénoncer les féminicides à Paris
Comme tous les soirs, ce groupe a voulu coller des messages "sur des bâtiments symboliques pour interpeller les pouvoirs publics". Elles ont récolté une amende de 68 euros.
Coller des affiches pour ne pas oublier. Depuis un peu plus d'une semaine, un groupe qui réunit près de 80 militantes dénonce les féminicides en collant sur les murs de Paris les noms des 102 femmes tuées par leur conjoint depuis le début de l'année et des messages pour alerter les pouvoirs publics. "Mettre les noms de ces femmes dans la rue, c'est leur redonner du pouvoir", assurait à franceinfo Eva-Luna Tholance, journaliste de 22 ans, membre de ce groupe.
Mais vendredi 6 septembre, leur action s'est conclue par des amendes infligées par des policiers municipaux, comme le rapporte Le Parisien samedi. Comme tous les soirs, ce groupe a voulu coller des messages "sur des bâtiments symboliques pour interpeller les pouvoirs publics", relate Marguerite Stern, une autre membre contactée par franceinfo.
Une amende de 68 euros
Lors de cette soirée, trois édifices sont visés : le Sénat, l'Assemblée nationale et Matignon, les locaux du Premier ministre, Edouard Philippe qui a ouvert le Grenelle des violences conjugales mardi 3 septembre. "Au Sénat, les affiches ont pu être collées, à l'Assemblée nationale, la police est intervenue, mais il n'y a pas eu de contravention, raconte Marguerite Stern à franceinfo. Et à Matignon, des agents de la Mairie de Paris nous ont demandé d'arrêter et nous ont collé une contravention."
Elle et ses cinq acolytes s'en sortent avec 68 euros d'amende chacune, précise Le Parisien. "Trois agents sont vite intervenus, on avait commencé à coller mais pas sur les murs de Matignon, un bâtiment à côté, je ne sais pas lequel", assure Marguerite Stern. Les deux messages : "Féminicides : la grande cause du quinquennat" et "Aux femmes assassinées, la patrie indifférente".
Des agents de la mairie de @Paris sont arrivé, ont pris nos identité et nous ont verbalisées. Une amende de 68€ chacune. C'était rageant de se dire que ces 3 agents ont passé 45 minutes de leur soirée pour verbaliser 6 filles qui ne font que coller des papiers sur des murs (...)
— Marguerite Stern (@Margueritestern) September 7, 2019
"On parle beaucoup trop, mais on n'agit pas"
"Les agents nous ont dit qu'ils ne faisaient qu'appliquer la loi, on ne leur en veut pas", assure-t-elle. "Bien sûr, la municipalité est résolument engagée dans la lutte contre le féminicide. Mais la cause défendue par les militantes n'est pas la question. Les agents n'ont pas à juger les slogans : ils font leur travail en verbalisant l'affichage sauvage", a déclaré la Mairie de Paris au Parisien.
Marguerite Stern est en revanche nettement plus remontée contre le gouvernement et ce Grenelle qui a ouvert. "Je ne vois pas pourquoi on se réunit. On parle beaucoup trop, mais on n'agit pas. On sait ce qu'il faut, il faut de l'argent pour ouvrir des centres, pour former... Quand on voit que des policiers refusent de prendre des plaintes...", s'emporte-t-elle.
Cette amende ne va pas démotiver le groupe, bien au contraire. "Si on doit faire des actions illégales pour que des femmes arrêtent de mourir sous les coups de leurs maris, on le fera. On continuera à aller dans la rue et coller des affiches." Et en cas d'amendes, le groupe peut compter sur les cagnottes en ligne. Ce groupe d'ailleurs s'élargit puisque tous les jours de nouvelles arrivantes l'intègrent. "Depuis le début de l'action, il y a une semaine, on est à 270 collages", se félicite Marguerite Stern.
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