Tirage au sort des futurs étudiants en médecine : la polémique en quatre actes
Le rectorat dément la mise en place d'un tirage au sort pour sélectionner les étudiants en première année de médecine.
Comment faire face à l'afflux d'inscriptions en première année de médecine ? Les universités franciliennes ont envisagé la mise en place d'un tirage au sort pour sélectionner les candidats. Face au tollé immédiat, le rectorat et le gouvernement ont démenti cette mesure radicale, jeudi 5 mai. Retour sur cette polémique en quatre actes.
Acte 1 : un tirage au sort pourrait être organisé pour sélectionner les étudiants, annonce "Le Monde"
Pour la première fois, les universités franciliennes pourraient mettre en place un tirage au sort pour sélectionner les étudiants à l'entrée en première année commune aux études de santé (Paces). Selon Le Monde, le rectorat de Paris a fixé pour la rentrée 2016 une capacité d'accueil limitée, en accord avec le ministère de l'Education nationale : seuls 7 500 étudiants seront admis. Ils étaient 8 143 en 2015.
Or, "plus de 14 108 futurs bacheliers ont inscrit Paces dans au moins l'un de leurs vœux et plus de 8 000 en premier vœu", selon le directeur de la faculté de médecine de Paris-Est-Créteil-Val-de-Marne. D'où l'idée, évoquée par le quotidien, d'organiser un tirage au sort. Si tel est le cas, plus de 600 étudiants ayant choisi médecine en premier vœu devront être redirigés. Pire : il leur serait difficile de retenter leur chance l'année suivante car les néo-bacheliers sont prioritaires.
Acte 2 : la décision provoque un tollé
Immédiatement, la mesure est critiquée de toutes parts. "Je crains qu'il y ait des étudiants à qui l'on dise, avant même qu'ils aient l'occasion d'essayer (...) : 'Le tirage au sort ne vous a pas retenu. Il va donc falloir aller voir ailleurs pendant un an'", s'insurge le président de l'Union nationale des étudiants en médecine, Sébastien Foucher, sur France Info.
Pour le docteur Christian Lehmann, interrogé par la radio, ce tirage au sort "est vraiment un manque de respect complet, en contradiction totale avec l'esprit des études médicales". Il trouve "aberrant d'imaginer que c'est sur le coup de bol d'un tirage au sort qu'on va éliminer des gens qui depuis des années rêvent de soigner des humains plutôt que d'être banquier de Rothschild ou milliardaire".
Même bronca du côté des politiques : pour le député centriste Jean-Christophe Lagarde, comme pour son collègue des Républicains Philippe Meunier, la mise en place d'un tirage au sort à l'entrée en fac de médecine est un non-sens.
Scandaleux!Voir @lemondefr on va tirer au sort les bacheliers 2016 qui auront droit de faire médecine.La sélection vaut mieux que le hasard!
— JC Lagarde (@jclagarde) 5 mai 2016
Nivellement par le bas : Les étudiants en médecine franciliens choisis par tirage au sort. #Hollande #Belkacem : Un désastre pour la #France
— PhilippeMeunier (@Meunier_Ph) 5 mai 2016
Acte 3 : "Il n'y a pas plus stupide", réagit le secrétaire d'Etat
Interrogé par Libération, le secrétaire d'Etat à l'Enseignement supérieur exprime sa franche opposition à la mise en œuvre d'un tel système. "Je ferai tout pour que le tirage au sort pour accéder en première année de médecine n’existe jamais : il n’y a pas plus stupide comme moyen de sélection surtout pour accéder à des filières très sélectives", lâche Thierry Mandon.
"C'est n’importe quoi", poursuit-il. Le tirage au sort "n’a jamais été utilisé en fac de médecine où la première année est commune à toutes les formations pour les professions de santé. Vu le nombre d’étudiants concernés, l’inscription en première année est libre. La sélection, très dure, a lieu à la fin de cette année-là", explique Thierry Mandon.
De son côté, le cabinet de la ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, estime que les inscriptions se dérouleront sans problème pour la rentrée 2016. "Entre les vœux des étudiants et les inscriptions réelles, il y a toujours un ajustement à la baisse. Pour nous, le problème ne se pose tout simplement pas cette année", indique-t-on.
Acte 4 : "Pas de tirage au sort", assure le rectorat
"Tous les bacheliers d'Ile-de-France pourront suivre les études de leur choix", finit par annoncer le rectorat dans un communiqué. S'il confirme que seules 7 500 places sont ouvertes en Paces, il précise aussi que "ce nombre pourra évoluer si nécessaire".
Par ailleurs, si 8 000 étudiants ont bien inscrit Paces en premier vœu, soit à peu près le même niveau que l'an dernier, les demandes effectives "seront in fine moins nombreuses", assure-t-on au rectorat. D'abord parce que "certains élèves de terminale qui ont dans un premier temps demandé à accéder à la première année de médecine vont finalement décider de changer d'orientation". Et ensuite parce que "certains élèves de terminale vont malheureusement rater le bac".
Le rectorat conclut : "Il y aura donc moins de 8 000 demandes pour la première année de médecine. La première répartition de 7 500 places devrait être suffisante, mais elle sera ajustée si nécessaire. Il n'y aura donc pas de tirage au sort."
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