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Pour remplacer les professeurs absents, des rectorats font appel à des enseignants retraités : "Je suis partagé entre le rire et la colère"

Le manque de professeurs pour assurer les remplacements est récurrent et la crise du Covid-19 n'a évidemment rien arrangé. Pour remédier aux absences, les rectorats contactent des fonctionnaires retraités. Une idée loin d'enchanter tout le monde.

Article rédigé par Noémie Bonnin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des élèves d'une classe de 6e avec leur professeur dans un collège de Meurthe-et-Moselle. Photo d'illustration. (ALEXANDRE MARCHI / MAXPPP)

Quand l'Éducation nationale manque de bras, les retraités sont appelés à la rescousse pour juguler la pénurie. Dans plusieurs départements, des enseignants à la retraite ont été sollicités pour faire des remplacements dans les écoles. C'est le cas d'Alain, enseignant retraité de 58 ans. Il a reçu un mail très officiel sur sa boite personnelle, signé par l'inspectrice d'académie de Seine-et-Marne. "Je le lis et puis, je suis partagé entre l’envie d’en rire, parce que je suis sorti de tout ça, et la colère", explique-t-il. Le phénomène n’est pas totalement inédit mais cette fois, son ampleur est particulièrement marquante.

"Il n’en est pas question"

"Il est écrit qu’il n’y a plus assez d’enseignants pour assurer la présence d’un enseignant dans chaque classe du département”, explique Alain qui est retraité depuis le mois de septembre 2021 après 40 ans passés devant une classe. On lui demande d'intégrer la brigade de remplaçants, ces enseignants qui font parfois des dizaines de kilomètres par jour, au pied levé pour pallier l'absence d'un collègue du CP au CM2. "Il n’en est pas question", répond ce jeune retraité.

Autre département, même cas de figure, ou presque. Dans l'Eure, Laurence, est retraitée depuis un an et demi. Elle a été contactée par téléphone. "La personne que j’ai eu au téléphone semblait un peu gênée, ne sachant pas trop comment raconter la chose, explique Laurence. On les sentait pas très à l’aise." Pour cette enseignante, qui a pourtant aimé son métier, l'idée de reprendre du service ne lui a pas traversé l'esprit. "Le métier a changé, explique-t-elle. Je ne me sens plus trop en adéquation avec ce qui se passe dans l’Éducation nationale aujourd’hui."

L'appel au secours est massif et assumé

Dans l'Eure, une cinquantaine de classes manquent en ce moment de remplaçants : selon un décompte syndical, on compte un millier d'élèves sans enseignants. Par le passé, ce type d'appels au secours en direction de jeunes retraités s'est déjà fait exceptionnellement. Mais Thierry Grignon, représentant Snuipp en Seine-et-Marne, est choqué aujourd'hui par le caractère massif et assumé : "C’est inédit de le faire de façon aussi transparente, aussi franche et par écrit."

Selon Thierry Grignon, le Covid-19 et ses conséquences ne sont qu'un catalyseur d'un problème plus général, lié à la crise de recrutement. "Sans la crise sanitaire, on arriverait à cette situation : la crise sanitaire fait qu’elle arrive simplement un peu plus tôt", explique le syndicaliste. À sa connaissance, en Seine-et-Marne, aucun retraité n'a accepté de reprendre le chemin de l’école. Contactés par franceinfo, les rectorats des académies concernées, de Normandie et de Créteil, n'ont pas souhaité réagir.

Des enseignants retraités pour remplacer des professeurs absents - Le reportage de Noémie Bonnin

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