"Bienvenue à ceux qui ont les moyens, les autres restez chez vous" : les étudiants africains inquiets de la hausse des frais de scolarité pour les étrangers
Les principaux syndicats étudiants appellent à se mobiliser samedi 1er décembre contre la hausse des droits d'inscription pour les étudiants étrangers. Des rassemblements sont prévus un peu partout en France, notamment à Paris, devant le Panthéon.
L'annonce a été faite il y a une dizaine de jours par le gouvernement. Dès la rentrée 2019, les étudiants originaires des pays hors Union européenne devront payer jusqu'à seize fois plus de droits d'inscriptions pour étudier dans le supérieur en France. 2 770 euros en licence, contre 170 aujourd'hui.
Au début quand j'ai appris ça, ça m'a tellement choqué que je me suis mis à rire quoi.
Étienne
un étudiant burkinabéà franceinfo
Toute la semaine, Étienne a tenté d'organiser la mobilisation sur les réseaux sociaux. Arrivé du Burkina Faso il y a un an et demi, cet étudiant en communication à Paris ne sait pas encore s'il sera concerné par la mesure. Mais pour lui, le signal envoyé est catastrophique. "Bien sûr ça m'inquiète parce que moi aujourd'hui, 3 000 euros, c'est souhaiter mon retour au pays tout simplement, détaille-t-il, amer. Parce que 3 000 euros, franchement, je ne pourrais pas l'assumer."
Au départ, l'étudiant burkinabé ne prend pas au sérieux cette annonce. "Je me disais : 'Attend, est-ce qu'ils sont sérieux ?' Parce que multiplier par 16 quand même c'est abusé quoi ! C'est une politique qui vise vraiment à dire aux étudiants africains qui n'ont pas les moyens : 'Voilà, restez chez vous. Ici en France on a besoin de ceux qui ont les moyens. Bienvenue à ceux qui ont les moyens, et ceux qui n'ont pas les moyens restez chez vous'".
"Adieu la France"
Le jeune homme espère échapper à cette hausse puisqu'il a déjà commencé ses études en France. Le gouvernement a précisé, les étudiants étrangers déjà inscrits dans une université française ne seront pas concernés, sauf en cas d'inscription dans un nouveau diplôme, comme un passage de licence en master par exemple.
Quoi qu'il en soit, selon Étienne, les conséquences se font déjà sentir pour les autres dans son pays d'origine. "J'ai des amis qui m'ont dit, franchement si c'est trois mille euros, ils préfèrent rester au pays, explique l'étudiant. "Avant-hier je lisais des messages des uns et des autres, il y a pas mal de gens qui disent 'Adieu la France'".
Les étudiants africains sont particulièrement inquiets, eux qui représentent 45% des étudiants étrangers en France. Selon le gouvernement, l'argent récolté en plus permettra justement de mieux les accompagner pour obtenir un titre de séjour et accéder au logement, par exemple.
Des ambassadeurs pour la France
L'argument ne convainc pas les syndicats, pas plus que certains responsables universitaires. "Si on commence à monnayer notre formation, clairement il y a toute une population d'étudiants qui ne viendra plus", regrette Christine Fernandez, la vice-présidente de l'université de Poitiers, en charge des relations internationales. "On met de la concurrence entre les étudiants, on oppose les étudiants nationaux et internationaux. Pour moi il y a un risque pour l'attractivité. Ces étudiants internationaux ils nous rapportent plus qu'ils ne nous coûtent, aussi bien en termes économiques que par le rayonnement qu'ils vont donner à la France en étant nos meilleurs ambassadeurs."
Pour rassurer, le gouvernement rappelle que le nombre de bourses sera triplé pour aider ceux qui ne pourront pas payer et que les frais demandés resteront dans tous les cas bien inférieurs à ce qui se pratique ailleurs.
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