Conduites addictives : certains jeunes ont "des pratiques de poly-consommation (...) qui mériteraient une attention particulière"
Une étude publiée ce jeudi révèle qu'environ 40% des jeunes avouent avoir fumé du cannabis au moins une fois, soit le niveau le plus bas jamais enregistré depuis la création de cette enquête en 1994. Amine Benyamina, psychiatre spécialiste des addictions, tempère sur franceinfo ce chiffre encourageant.
"On a affaire à des profils nouveaux où la mono-consommation n'est que le fantasme théorique", alerte sur franceinfo jeudi 27 septembre Amine Benyamina, psychiatre spécialiste des addictions et président de la Fédération française d'addictologie. Une étude menée par l'Observatoire français des drogues et toxicomanie et publiée jeudi révèle qu'environ 40% des jeunes avouent avoir fumé du cannabis au moins une fois. C'est le niveau le plus bas jamais enregistré depuis la création de cette enquête en 1994. Malgré ce chiffre encourageant, le médecin estime que "ce qui est important (...) c'est la globalité de la consommation".
franceinfo : Selon l'étude de l'OFDT, un quart des jeunes de 17 ans fume au moins une cigarette par jour. C'est moins qu'en 2015, date à laquelle un jeune sur trois fumait tous les jours. Peut-on attribuer cette bonne nouvelle à la hausse du prix du tabac ?
Amine Benyamina : Pour ce qui est de la politique du tabac, les efforts menés depuis quelques années sont en train de porter leurs fruits. C'est une réalité. Les mesures prises récemment par la ministre et par les tutelles donneront probablement des fruits de qualité, notamment avec une possibilité de "génération zéro tabac". On peut s'en réjouir même s'il y a encore des efforts à faire. Malgré un effet national, il reste des disparités régionales mais on peut penser que la société s'est mobilisée. Je suis plus inquiet pour les autres produits.
Justement, la consommation de cannabis baisse, elle aussi. Pourquoi êtes-vous inquiet ?
Il y a globalement un effet de baisse mais, ce qu'il est important de voir, c'est qu'on a des pratiques de poly-consommation et des profils de consommateurs (...) qui mériteraient une attention particulière. Il y a des phénomènes nouveaux, des drogues nouvelles, notamment des opiacés. On a eu des alertes récemment sur des consommations de produits détournés. Tous ces phénomènes nécessitent des politiques de prévention, de communication et d'information adaptées à la réalité au quotidien. Cela peut être mettre en place, par exemple, une prévention ciblée. Pour ce qui est de l'alcool, on est en-deça, pour ne pas dire loin du compte. On sait bien qu'on a affaire à des pratiques de publicité d'alcool agressives et qui touchent les jeunes. On sait pertinemment qu'il n'y a pas encore une vision claire de la politique de prévention et des messages de santé publique sur la question.
Est-ce que cela veut dire qu'il y a un effet de vases communicants, avec une consommation de cannabis en baisse mais remplacée par autre chose ?
Ce n'est même pas un effet de vase communicant. On a affaire à des profils nouveaux où la mono-consommation n'est qu'un fantasme théorique. On a affaire à des jeunes qui consomment des psycho-stimulants, de l'extasy, du cannabis et de l'alcool. Quand on les interroge, ils rapportent des niveaux de consommation par produit. Ce qui est important et qui doit amener à changer nos standards de mesures d'appréciation, c'est la globalité de la consommation, les pratiques de consommation et les profils des jeunes, couplés à leur santé mentale et à leur environnement économique et social. C'est ce que devrait faire le contenu d'une politique jeune qui serait plus pertinente et plus adéquate à l'enjeu que constitue cette jeunesse.
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