Don du sang : les homosexuels restent victimes d'une "discrimination devenue insupportable et qui n'est plus justifiée"
L'Assemblée nationale a maintenu le statu quo concernant une différence de traitement dans le don du sang touchant les homosexuels. Une position incompréhensible selon la députée PS Gisèle Biémouret.
La députée socialiste du Gers Gisèle Biémouret s'est dite vendredi 12 octobre sur franceinfo très "surprise" et déçue du rejet, la veille par l'Assemblée nationale, d'un amendement visant à aligner les conditions s'appliquant aux donneurs de sang homosexuels sur celles s'appliquant aux hétérosexuels. Il s'agit là d'une "discrimination qui est devenue insupportable et qui n'est plus justifiée", estime la députée socialiste, qui reproche à la ministre de la Santé Agnès Buzyn de s'être "abritée derrière des arguments très techniques".
Les hommes homosexuels qui veulent donner leur sang doivent aujourd'hui n'avoir eu aucune relation sexuelle dans les 12 mois précédents. Les hétérosexuels, eux, doivent ne pas avoir eu plusieurs partenaires sexuels lors des quatre mois précédents. Une règle qui va donc continuer à s'appliquer.
franceinfo : Pourquoi vouliez-vous en finir avec cette différence de traitement entre donneurs de sang hétérosexuels et homosexuels ?
Gisèle Biémouret : C'est une discrimination qui est devenue insupportable. Cette différence n'est plus justifiée, car les conduites à risques peuvent être pratiquées aussi bien par les hétérosexuels que par les homosexuels. D'autant que les dispositifs de sécurité ont été renforcés depuis de nombreuses années, depuis 1983 et l'affaire du sang contaminé.
Pourquoi cet amendement n'a pas été adopté par l'Assemblée nationale jeudi soir ?
Je suis très surprise, car j'étais en commission la semaine dernière lors de l'étude de ce texte, et en fin de matinée il y a eu un flottement chez les députés en Marche, et le président de la commission a interrompu la séance. On ne l'a repris qu'après les questions au gouvernement la semaine dernière. Cet amendement avait été adopté par des députés LR, par des députés de la France insoumise et de la gauche communiste, par des députés socialistes et même par des députés de La République en marche. Nous étions contents avec Hervé Saulignac [député PS de l'Ardèche] d'avoir fait passer cet amendement, d'où notre surprise d'hier. Du coup, nous nous disons que les députés En Marche ont été caporalisés, et c'est bien dommage que certains n'aient pas voté en accord avec leur conscience.
La ministre de la Santé Agnès Buzyn dit qu'il ne faut pas inscrire dans la loi des critères de sélection pour les donneurs de sang, qui nous feraient prendre un risque, un jour, par rapport à un éventuel nouvel agent pathogène. Est-ce un argument valable selon vous ?
Ce que je remarque, c'est qu'en disant cela, elle discrimine quand même une partie des Français, et en particulier les homosexuels. Ça reste de la discrimination. Elle s'est abritée derrière des arguments très techniques, elle s'est abritée derrière ce qu'elle est, un médecin connu et reconnu, je ne le mets pas en doute. Mais elle n'a pas voulu, elle n'a pas osé, ou bien elle avait des ordres, je n'en sais rien, aller, jusqu'au bout de cette proposition. Ça reste une minorité de députés qui s'arc-boutent, et ce sont des députés En Marche dont on pouvait penser qu'ils étaient peut-être beaucoup plus progressistes que cela.
Ces critères "relèvent davantage du règlement que de la loi", a également expliqué Agnès Buzyn. Ça peut donc encore évoluer ?
Comme l'a dit mon collègue Hervé Saulignac hier soir, nous pensons que la prochaine fois, ce sera la bonne, puisque des députés de droite et de gauche se sont unis pour essayer de faire passer cet amendement. C'était une proposition de loi qui pouvait faire consensus, parce que le don du sang, nous en avons besoin, nous le savons très bien. Il y avait des avancées dans cette proposition de loi, et il est regrettable qu'elle n'ait pas pu faire consensus, nous en sommes attristés.
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