Reportage "Vous voyez le petit grain-là ?" : ce laboratoire français analyse des poussières d'astéroïdes remontant à l'origine du système solaire

Le Centre de recherches pétrographiques et géochimiques de Nancy est l'un des laboratoires à travers le monde chargé par la Nasa d'analyser ces particules de roche, prélevées en 2020 à des dizaines de millions de kilomètres de la Terre par la sonde Osiris Rex.
Article rédigé par Olivier Emond - édité par France Info
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Temps de lecture : 2 min
C'est dans ce laboratoire du CNRS et de l'université de Lorraine, spécialisés dans l'étude des gaz rares, que les chercheurs étudient ces poussières extraterrestres, remontant à l'origine de notre système solaire. (OLIVIER EMOND / FRANCEINFO)

Derrière la porte vitrée, une vaste pièce occupée par des ordinateurs et divers instruments de pointe, des enchevêtrements de câbles, de capteurs et de tuyaux entourés d'aluminium. C'est là que les chercheurs de ce laboratoire du CNRS et de l'université de Lorraine, spécialisés dans l'étude des gaz rares, s'affairent sur ces poussières extraterrestres, remontant à l'origine de notre système solaire. Elles sont arrivées des Etats-Unis en fin d'année 2023. Le Centre de recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG), situé en périphérie de Nancy, est l'un des laboratoires qui a été chargé par la Nasa d'analyser ces particules. 

L'annonce a été faite en début de semaine : la Nasa a enfin réussi à ouvrir complètement le container rempli d'échantillons de l'astéroïde Bénou. Depuis des mois, les experts de l'agence spatiale américaine se battaient avec le couvercle récalcitrant de cette capsule contenant ces particules de roche prélevées en 2020 à des dizaines de millions de kilomètres de la Terre par la sonde Osiris Rex. Seule une partie de cette précieuse cargaison avait jusqu'ici été récupérée et envoyée pour analyse dans divers laboratoires à travers le monde, dont le CRPG.

Ces fragments d'astéroïdes, très rares, ne pèsent que quelques microgrammes. (OLIVIER EMOND / FRANCEINFO)

"La première étape a été de les prendre en photo et de les regarder sous microscope pour pouvoir choisir ceux qui nous intéressaient, détaille l'ingénieur de recherche Laurent Zimmerman. Ensuite, ça a été de les manipuler avec précaution parce que ce sont des échantillons extrêmement fragiles à manipuler et on les a pesés. On a réussi à peser un maximum de centaines de microgrammes.

Du "gaz rare pur"

Enfermés dans un cylindre hermétique, ces fragments d'astéroïdes sont alors prêts à livrer leurs secrets, sous la chaleur d'un faisceau laser. Une opération suivie sur son écran par Evelyn Füri, chargée de recherche au CNRS : "Vous voyez le petit grain-là ? On va augmenter la puissance du laser pour chauffer à différentes températures notre petit grain jusqu'à ce qu'il fonde. Et, comme ça, à chaque palier de température, on va extraire les gaz. Une fois les gaz extraits par chauffe ou par fusion, il y a toute cette partie de purification de gaz, afin d'enlever toutes les phases gazeuses qu'on ne veut pas analyser. Et à la fin, on espère avoir un gaz propre, c’est-à-dire uniquement composé de gaz rare pur ou d'azote pur, afin de l'analyser".

Enfermés dans un cylindre hermétique, les fragments d'astéroïdes sont chauffés à différentes températures avec un faisceau laser afin de libérer des gaz rares. (OLIVIER EMOND / FRANCEINFO)

Une analyse qui permet d'établir une cartographie de ces gaz rares, tels que le radon ou l'hélium. Ils sont six en tout, en fonction de la structure atomique retrouvée. "En fonction du rapport isotopique de ces gaz, qui sont un peu leurs ADN, on essaie de retracer des sources ou des processus physiques", décrypte Evelyn Füri. 

Autant d'indices qui permettront de mieux tracer l'histoire de ces roches de cet astéroïde, et de nos origines, quand ce gros caillou s'est formé, il y a environ 4 milliards et demi d'années. Des premiers résultats devraient être dévoilés au printemps, lors d'une conférence à Huston, aux Etats-Unis.

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