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Atterrissage de Perseverance sur Mars : l'astrophysicien François Forget attend les images "sans précédent" de la descente

"C'est magnifique", François Forget, astrophysicien, planétologue et directeur de recherche au CNRS a commenté sur franceinfo le succès de la périlleuse manœuvre d'atterrissage sur Mars du dernier rover de la Nasa.

Article rédigé par franceinfo
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 Des membres de l'équipe Perseverance de la Nasa observent l'arrivée des premières images quelques instants après l'atterrissage réussi du vaisseau spatial sur Mars, le 18 février 2021, au Jet Propulsion Laboratory de la Nasa à Pasadena, en Californie.  (BILL INGALLS / NASA)

"On va télécharger, dans les jours à venir, des images en couleur et en particulier, quelque chose sans précédent, des vidéos qui ont été prises pendant la descente", s'est réjoui vendredi 19 février sur franceinfo François Forget, astrophysicien, planétologue et directeur de recherche au CNRS alors que le robot Persévérance de la Nasa a réussi jeudi soir sa périlleuse manœuvre d'atterrissage sur Mars. Des images qui devraient être présentées lundi par la Nasa.

franceinfo : Vous êtes-vous remis de vos émotions ?

François Forget : C'était un grand stress, un grand suspense, parce qu'il faut savoir que c'est très difficile d'atterrir sur Mars, tout simplement. Les Américains y arrivent de manière assez systématique. C'est magnifique. Et en Europe, pour vous dire, j’ai travaillé sur deux missions qui ont échoué. Elles ont tenté d’atterrir et elles n'ont pas réussi. Donc je suis bien placé pour savoir que c'est très difficile et en plus, je suis enchantée pour la mission scientifique. Et puis, humainement, pour toutes nos équipes en France, à Toulouse, à Meudon, à Guyancourt, dans les Yvelines, c'est un grand soulagement. L’objectif est de trouver d’éventuelles traces de vie sur Mars.

Quand les premières indications seront-elles transmises ?

C'est en cours. On sait déjà où on a atterri. On est vraiment très bien placés, à  deux kilomètres à peu près du bord d’un delta. On voit un delta avec des sédiments, une mini Camargue. Cette nuit des données ont été transmises. Elles ne sont pas encore visibles, notamment via le Trace gas orbiter, c'est-à-dire le satellite de l'Agence spatiale européenne dont on s'occupe. On va télécharger dans les jours à venir, des images en couleur et en particulier, quelque chose sans précédent qui va nous tous nous impressionner, des vidéos qui ont été prises pendant la descente. Il y avait des caméras dans tous les sens. Il y avait aussi un micro en fonctionnement, donc on a enregistré le son. La Nasa prévoit une conférence de presse lundi soir, où ils présenteront cette espèce de show hollywoodien avec le montage de toutes ces images. Ce sera vraiment sans précédent. Je crois que ce sera vraiment impressionnant. On en parle souvent, on voit souvent des images de synthèse et là, on verra vraiment le film de l’atterrissage.

Quelle sera la mission de l'outil français Supercam, qui équipe le rover ?

Je crois qu'il y a des tests qui sont faits aujourd'hui, mais il ne se mettra pas en fonctionnement tout de suite. Le prochain mois va être dédié à de nombreux tests. Il y a un petit hélicoptère, une espèce de drones qui est actuellement coincé sous le ventre et qui va être déposé. Il y aura encore un mois où l'on testera cet hélicoptère et ensuite, Supercam sera vraiment utilisé. On commencera les études scientifiques. Supercam est un ensemble d'instruments, ce n'est pas qu'un seul instrument, qui permet de caractériser les roches à distance. On tire au laser. On analyse la lumière réfléchie et l'étincelle. On regarde aussi avec un spectromètre la nature des roches. C'est très complet et c'est effectivement un instrument presque plus qu’à moitié français.

Est-on certain de découvrir des traces de vie ?

La grande enquête, c'est d'essayer de voir si on peut détecter des traces non ambiguës, des traces fossiles qui nous diraient que oui, il y a une forme de vie qui a démarré. Ce qui serait extraordinaire, c'est de trouver une forme de vie qui ne ressemble pas à celle de la Terre. Là, ce serait la preuve que dès qu'il y a de l'eau liquide, la vie démarre, que partout ailleurs autour des autres étoiles, il doit avoir beaucoup de planètes avec de l'eau liquide et donc où la vie démarre. Par contre, si on ne trouve rien du tout, alors on aura du mal à le prouver quand même parce qu'il faudra une longue enquête, cela prouvera qu'au contraire, il faut quelque chose de particulier pour que la vie démarre.

Sur Mars, il y avait des lacs et des rivières pendant des millions d'années, et s’il ne s’est rien passé, ce sera très intéressant. Il est aussi probable qu'on trouve des étapes intermédiaires entre le non-vivant, le minéral, et puis la vie. Sur Terre, on n'a pas du tout la moindre trace de ces étapes-là parce que la vie domine tout. L’être vivant le plus simple qu'on puisse trouver, la bactérie la plus simple, est déjà extrêmement évoluée. Peut-être que sur Mars, on va trouver des étapes intermédiaires, ce qui serait aussi très intéressant, même s'il la vie n’a pas complètement démarré au sens où on l'entend.

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