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Pourquoi le nouveau cas de vache folle en France ne doit pas vous inquiéter

L'infection a été détectée mi-mars dans un élevage des Ardennes. Une centaine de bêtes vont être abattues par mesure de précaution.

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5 min
Les animaux de l'élevage de Salers, où un cas de vache folle a été confirmé le 24 mars 2016, à Givron (Ardennes). (MAXPPP)

La maladie de la vache folle est de retour en France. Un cas d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), détecté dans un élevage de Salers des Ardennes, a été confirmé jeudi 24 mars. Une découverte qui réveille la crainte d'une nouvelle crise sanitaire et économique, comme celle qui a touché l'Europe il y a très exactement vingt ans. Francetv info vous dit pourquoi il n'y a pas de quoi s'affoler.

Parce que les farines animales ont été interdites

La crise de la vache folle débute le 20 mars 1996. Le Royaume-Uni annonce alors que l'ESB se transmet à l'homme sous la forme d'une nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Cette dégénérescence du système nerveux a provoqué la mort de 224 personnes dans le monde, dont 25 en France, rappelle L'Express.

L'origine de l'ESB est pourtant connue depuis une dizaine d'années. Elle provient de farines animales données aux bovins pour leur apporter des protéines. En théorie les os, les carcasses et les abats qui constituent ces farines sont cuits à très haute température puis réduits en poudre. Mais certains industriels ont abaissé la température de cuisson pour faire des économies. Conséquence : le prion, la protéine anormale responsable de la maladie, n'est pas détruite et se retrouve dans l'alimentation des bovins.

Des dizaines de milliers d'animaux contractent donc l'ESB. A l'époque, la Commission européenne impose un embargo sur tous les produits de la filière bovine britannique — finalement levé en 1999. Des troupeaux entiers sont abattus et brûlés au Royaume-Uni, pour mettre un terme à l'épidémie.

De nombreux pays, dont la France, décident en outre d'interdire les farines animales et durcir la législation sur la traçabilité de la viande bovine. Autant de décisions qui rendent très peu probable une nouvelle épidémie d'ESB en France.

Parce qu'il n'y a pas de risque pour l'homme

Peu de chance que la maladie se propage à partir de ce cas isolé dans les Ardennes. La centaine de bêtes qui pourraient avoir été contaminées par cette vache malade seront abattues dans un délai d'un mois. Il s'agit d'autres bovins de cette exploitation de Givron (Ardennes), âgés d'un an de plus ou de moins que la vache porteuse d'ESB. Ils risquent en effet d'avoir été "exposés à la même source alimentaire". Les veaux de moins de 2 ans de la vache malade seront eux aussi abattus, même s'ils se trouvent désormais sur une autre exploitation.

Autre mesure sanitaire prévue par le ministère de l'Agriculture : la liste des parties des animaux systématiquement détruites à l'abattoir, comme la cervelle ou encore la moelle épinière, va être étendue pour éviter tout risque de contamination. Les autorités maintiennent par ailleurs "un niveau de surveillance empêchant que des animaux malades passent à travers les mailles du filet", indique la Direction générale de l'alimentation.

En effet, depuis 2014, les bêtes de moins de 12 ans ne sont plus soumises aux tests de dépistage obligatoires, car les cas d'ESB chez les vaches jeunes sont "extrêmement rares". Mais les bovins plus âgés, susceptibles d'avoir ingéré des farines animales, sont toujours testés, rappelle Europe 1. Tout comme ceux de plus de 4 ans envoyés à l'équarissage, ce qui a permis de détecter ce cas dans les Ardennes.

Il n'y a donc aucun risque de transmission à l'homme. "La détection de ce cas n'a aucune conséquence pour le consommateur, assure le ministère de l'Agriculture. [Elle] atteste de l’efficacité de notre système de surveillance mis en place en France tout au long de la chaîne alimentaire."

"On n'est pas du tout dans la même situation qu'il y a quelques années", insiste  Philippe Clausse, directeur de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles des Ardennes. "On n'est pas confrontés aujourd'hui à un problème d'épidémie comme c'était le cas il y a quelques années. Mais on n'est jamais à l'abri d'un cas qui fasse une réapparition isolée."

Parce que c'est un cas isolé

On ignore pour l'instant comment cette vache des Ardennes a pu contracter l'infection. Et répondre à cette question va prendre un certain temps. "Il faut vérifier tout l'historique de cet animal : ce qu'il a mangé, sa filiation, etc.", précise Stéphane Le Foll, contacté par francetv info. Le ministère de l'Agriculture compte en outre "solliciter la Commission européenne, afin qu'elle saisisse l'Autorité européenne de sécurité des aliments en lien avec l'Agence nationale de sécurité sanitaire".

Depuis l'interdiction des farines animales, seuls deux moyens de transmission de l'ESB ont été identifiés : la filiation et le contact avec un bovin contaminé. Mais les autorités sanitaires n'ont jamais réussi à déterminer la source de certains cas isolés de vache folle détectés en France (2011), au Royaume-Uni (2013) et en Irlande (2015). Dans ce dernier cas, le bovin malade faisait partie d'un troupeau touché par l'ESB au début des années 2000, mais toutes les bêtes exposées avaient été abattues, selon le journal Irish Times (article en anglais). La maladie n'a en outre été détectée chez aucun autre bovin de cette lignée.

"L'identification de cas classiques d'ESB après la mise en place de l'interdiction de nourriture à base de viande et os n'est pas nouvelle, avait alors rassuré le ministère irlandais de l'Agriculture. Un nombre en diminution de ces cas a été recensé en Irlande et dans d'autres pays au fil des ans."

Parce que les conséquences économiques sont limitées

En 1996, l'épidémie d'ESB avait fait chuter la vente de viande bovine en France de 35% en deux semaines, selon des statistiques de l'Institut national de la recherche agronomique citées par La TribuneIl est toutefois peu probable que ce nouveau cas isolé ait des conséquences aussi graves en 2016.

A l'échelle internationale, en revanche, la situation est différente. En mai 2015, l'Organisation mondiale de la santé animale avait requalifié la France comme pays à "risque négligeable" pour l'ESB. Cette décision avait permis de rouvrir les exportations hexagonales vers l'Arabie saoudite, le Canada, Singapour, le Vietnam ou encore l'Afrique du Sud. La France va toutefois repasser dans la catégorie "pays à risque maîtrisé" pour une durée de 11 ans à partir de la date de naissance de l'animal malade. Elle ne pourra donc retrouver le statut de "pays à risque négligeable" qu'en avril 2022.

Il est donc "probable" que la France perde ces nouveaux marchés, selon le ministère de l'Agriculture. Une perspective inquiétante pour les producteurs de viande bovine, déjà confrontés à la crise agricole et à une importante baisse des prix depuis un an.

Les exportations vers les autres pays de l'Union européenne, principaux consommateurs de bœuf français, seront en revanche maintenues. Le ministère de l'Agriculture estime donc que la découverte de ce nouveau cas d'ESB est "une mauvaise nouvelle, mais les conséquences économiques directes et réelles seront limitées".

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