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Pourquoi la tuberculose persiste en France

Lors d'un dépistage, sept cas ont été détectés dans et près du lycée du Val-de-Marne mercredi. Si la maladie régresse, elle est loin d'avoir disparu dans le pays. FTVi vous explique pourquoi.

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le bacille de Koch, la bactérie responsable de la tuberculose. (MEHAU KULYK / MKU / AFP)

L'inquiétude a gagné parents et élèves, mercredi 23 mai. Lors d'un dépistage, sept cas de tuberculose ont été détectés dans et près d'un lycée à Maisons-Alfort (Val-de-Marne). Un enseignant et quatre élèves de l'établissement sont atteints, ainsi qu'un membre de la famille d'un lycéen et l'agent du personnel soignant qui a pris l'élève en charge. Le même jour, un cas a été diagnostiqué chez un professeur de musique d'une association à Perpignan (Pyrénées-Orientales).

Ce n'est pas la première fois que des cas de tuberculose sont détectés dans des établissements scolaires. En Seine-Saint-Denis, 23 cas avaient été repérés dans un quartier de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) à l'été 2011. Et deux nouveaux avaient été découverts dans une école du secteur, lors d'un second dépistage fin septembre.

Globalement, le nombre de cas de tuberculose déclarés chaque année est en baisse en France (8,1 nouveaux cas pour 100 000 habitants en 2010). Mais la maladie infectieuse persiste. D'une région à l'autre, les indicateurs se révèlent très différents. Par exemple, en Ile-de-France, le nombre de personnes atteintes reste élevé, avec 16,3 cas pour 100 000 habitants en 2010, selon l'Institut de veille sanitaire (InVS). FTVi vous explique pourquoi.

• Promiscuité et précarité, des facteurs de développement du bacille 

"La détection simultanée de cas, comme dans ce lycée du Val-de-Marne, fait partie d'épisodes normaux. On ne peut pas pour autant parler de reprise de la tuberculose", rappelle Delphine Antoine, épidémiologiste à l'InVS. Qui poursuit : "Les cas de tuberculose restent concentrés dans les endroits où il y a plus de pauvreté, de migrants et de promiscuité."

De fait, avec 972 habitants au km2, l'Ile-de-France est de loin la région la plus densément peuplée. Certains revenus y sont également très bas, selon l'Insee. Et le département de la Seine-Saint-Denis, qui affiche un des taux de pauvreté les plus élevés de France, enregistre un nombre important de cas de tuberculose.

France 2 - Jennifer Knock et Antoine Morel

"Nos centres d'accueil à Paris et en Seine-Saint-Denis confirment ces tendances, affirme Jean-François Corty, médecin et directeur de mission France à Médecins du monde. Selon lui, le nombre de cas est de 120 pour 100 000 habitants pour les personnes en grande précarité en France. "Il faut donc informer et améliorer l'accès aux soins pour ces personnes, notamment les SDF et les migrants. Mais il est difficile de les suivre régulièrement et de les sensibiliser : la plupart d'entre eux fuient les centres. Certains n'ont pas d'autre choix que de vivre dans des logements insalubres, où la tuberculose trouve un terreau pour se développer." D'après lui, il faudrait des équipes mobiles pour mener une campagne efficace de vaccination.

• Une maladie qui peut se déclencher des années après avoir été contractée

"Le bacille de Koch [responsable de la tuberculose] se transmet par voie aérienne, mais entre l'infection et le déclenchement de la maladie, il faut attendre plusieurs semaines, voire des années, explique Delphine Antoine. Ainsi, les enfants entrés en contact avec le bacille peuvent tomber malade âgés. Si un individu a en plus vécu dans des pays d'Afrique subsaharienne dans son enfance, le risque est encore plus grand de voir un jour la tuberculose se développer chez lui."

Ainsi, en 2010, 11% des cas étaient relevés chez les 80 ans et plus par l'InVS, le taux le plus important par groupe d'âge.

• La fin du vaccin du BCG obligatoire en cause ?

Depuis 2007, le vaccin du BCG (Bacille de Calmette et Guérin), destiné à protéger contre la tuberculose, n'est plus obligatoire. Il est seulement recommandé par le ministère de la Santé pour "les enfants les plus exposés". Pour certains médecins, cela explique la persistance de la maladie, voire sa recrudescence à certains endroits.

Claude Dilain (PS), maire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) et pédiatre, a confié au Monde (article réservé aux abonnés) qu'il regrettait que la levée de l'obligation du vaccin n'ait pas été accompagnée d'une politique de dépistage systématique. Selon lui, celle-ci permettrait "de détecter la présence du bacille de Koch avant même que la maladie se déclare".

De son côté, le docteur Ludovic Toro estimait devant les caméras de France 2 en mars 2010, alors qu'il était conseiller général UMP de Seine-Saint-Denis, que la vaccination devrait rester obligatoire pour les nourrissons. 

France 2 - Perrine Bonnet et David da Meda

• D'autres "maladies du passé" traversent le temps

La rougeole. Selon les chiffres publiés par l'Organisation mondiale de la santé, sur les neuf premiers mois de 2011, il y a eu 14 000 cas de rougeole en France. Ces cas déclarés sont à l'origine de six décès. Pour les autorités sanitaires, ce retour de la rougeole est lié à un problème de vaccination, la double injection n'étant la règle que depuis la fin des années 1990. 

La gale. Pour savoir si la gale est en augmentation en France, l'InVS a croisé les résultats de plusieurs études nationales et régionales. L'ensemble des résultats indique une augmentation de l'incidence de la gale dans le pays. L'InVS note surtout un retard au diagnostic et au traitement, qui profite à la diffusion de l'infection.

La scarlatine. Un cas a été signalé fin janvier dans une école d’Agen (Lot-et-Garonne). "La scarlatine a été peu présente depuis les années 1980, qui étaient placées sous le règne des antibiotiques. Le problème, c'est qu'à donner des antibiotiques systématiquement, on provoque la résistance des bactéries", a réagi le président de l'Ordre des médecins du Lot-et-Garonne, interrogé par La Dépêche. Mais la maladie ne fait pas l'objet d'une surveillance particulière de la part des autorités sanitaires. En fait, il est courant que quelques cas réapparaissent pendant l'hiver. 

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