Pénuries de médecins dans le public : de meilleurs salaires à l'embauche ?
Chargé d'une mission sur "l'attractivité de l'exercice médical à l'hôpital public", l'ancien sénateur socialiste Jacky Le Menn a remis au début de l'été ses préconisations pour pallier, dit-il, "le choc démographique". Les journalistes de plusieurs agences de presse et quotidiens ont eu accès ce week-end au rapport.
Axe prioritaire : revaloriser les salaires
Soulignant que c'est "l'une des priorités [des syndicats de médecins]", M. Le Menn suggère d'augmenter les rémunérations des praticiens sur les cinq premiers échelons. Au premier échelon, le médecin verrait son salaire annuel brut, aujourd'hui fixé à 48.978 euros, augmenter de 1.000 euros par an. Pour un médecin au 4e échelon, cette revalorisation pourrait grimper jusqu'à 2.552 euros, pour atteindre 54.856 euros, détaille le rapport.
Cette revalorisation des débuts de carrière serait "[la réponse] la plus pertinente" pour rendre "plus attractives les carrières hospitalières". Un avis partagé par Arnaud Patenotte, secrétaire général du Syndicat des praticiens des hôpitaux publics (SPHP) interrogé par l’AFP : "on ne fera pas venir les jeunes à l'hôpital si on ne leur garantit pas un temps de travail, des revenus corrects, une reconnaissance. A la première contrariété ils s'en vont, ils sont beaucoup plus mobiles que nous". Lui-même "travaille au minimum 48 heures par semaine" et consulte en libéral deux demi-journées par semaine "pour avoir une source de revenus complémentaires".
Prime de solidarité territoriale
Par ailleurs, le rapport propose la mise en place d'une "prime de solidarité territoriale", jugeant que "la pratique médicale sur plusieurs sites (hospitaliers), aujourd'hui exceptionnelle, est amenée à devenir beaucoup plus fréquente" notamment avec la création de Groupements hospitaliers de territoire (GHT) prévue dans le projet de loi santé.
Elle s'articulerait autour d'une "part fixe d'équipe", de 100 euros net mensuel minimum par praticien, qui pourrait être doublée pour les équipes "en tension". S'ajouterait une part individuelle, modulable en fonction par exemple du nombre de sites dans lequel le médecin travaille ou de la fréquence de ses déplacements, explique le rapport.
Des praticiens remplaçants plutôt que des intérimaires
Compte tenu des contraintes budgétaires, M. Le Menn propose d'assumer "une montée en charge sur cinq exercices budgétaires" et notamment de réorienter les économies réalisées grâce à la maîtrise de l'intérim.
En effet, pour limiter le recours à l'intérim médical, particulièrement coûteux[1], les experts proposent de créer dans chaque région des pools de praticiens hospitaliers remplaçants qui percevraient une sur-rémunération de 1.000 euros net par mois.
Ils proposent, en outre, d'autoriser les établissements à rémunérer les praticiens contractuels qui s'engagent à servir dans celui-ci pour une durée de cinq ans à un niveau supérieur au maximum fixé par la réglementation.
Inciter au cumul emploi-retraite
Estimant que les années 2015-2022 constituent "une période sensible" pour l'hôpital, les auteurs du rapports suggèrent des incitations au cumul emploi-retraite pour encourager les médecins à exercer jusqu'à 72 ans, après avis de la médecine du travail.
Pour finir, ils estiment qu'il faudrait élargir la possibilité de recrutement des médecins hors Union européenne aux Antilles, où les difficultés d'attractivité sont encore plus grandes. Cela permettrait d'embaucher des médecins du bassin caribéen (Haïti, Cuba, Brésil..) comme c'est déjà le cas en Guyane, écrivent-ils.
[1] En décembre 2013, le député Olivier Veran avait évalué le coût total de l'intérim et des recrutements de contractuels à environ 500 millions d'euros par an, rappelle M. Le Menn.
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