Polio, pestes, tuberculoses… Pourquoi attrape-t-on encore ces maladies d'un autre âge ?
Ces infections qu'on pensait vaincues en Occident font leur retour dans les salles d'attente.
Votre enfant a attrapé la rougeole, votre voisin la gale et l'école du plus grand à organisé un dépistage systématique de la tuberculose ? Non, nous ne sommes pas en 1953. Depuis plusieurs années déjà, des maladies anciennes sont de retour.
Francetv info explique pourquoi ces menaces que l'on croit d'un autre temps sont toujours d'actualité dans l'Hexagone.
Parce que les maladies se déplacent avec l'homme
Le cas de la tuberculose. Selon une étude publiée dimanche 1er septembre dans la revue Nature Genetics, cette infection, qui coûte la vie à près de 1,5 million de personnes chaque année, suit les migrations de l'homme depuis 70 000 ans. Les causes de sa persistance ? Le délai, très long, entre l'infection et le déclenchement de la maladie ; la fin de la vaccination obligatoire ; la promiscuité, la précarité… La maladie décroît, mais reste implantée dans certaines régions comme l'Ile-de-France, où l'on comptait en 2010 16,3 cas pour 100 000 habitants (contre 8,1 à l'échelle nationale).
Des formes résistantes ont par ailleurs été observées dans l'Hexagone, sur des personnes pour la plupart originaires d'ex-URSS : 92 cas de tuberculose insensible aux traitements classiques ont été signalés en 2012, contre 40 en 2010. Une hausse "inquiétante sur le plan de la santé publique", estime aujourd'hui la Direction générale de la santé. "Si on ne s'en préoccupe pas, il y aura une progression de la maladie au sein de leur communauté, puis de la population générale", prévient Cédric Arvieux, médecin au CHU de Rennes, cité par Le Monde. "C'est ce qui s'est passé avec le VIH, ne l'oublions pas."
Parce que nos carnets de vaccination ne sont pas à jour
Le cas de la rougeole. Parmi les 24 000 malades de la rougeole recensés en France entre 2008 et 2011, 1 000 ont développé des pneumopathies graves et 30 des complications neurologiques à type d'encéphalite ou myélite. Le bilan est lourd : 10 morts. Selon l'Assurance maladie, "les foyers épidémiques étaient la conséquence d'un niveau insuffisant et hétérogène de la couverture vaccinale en France". Les victimes ? Essentiellement des adultes, nés après 1980 et qui n'ont pas eu la deuxième dose de vaccin, indispensable pour une bonne immunité.
Selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, la vaccination a permis de passer de 331 000 cas de rougeole en 1986 à 4 448 cas en 2004, note l'institut de veille sanitaire (INVS). Chez certains parents, "la crainte de l'autisme, du Crohn, de la rectocolite hémorragique [des maladies présentées par certains scientifiques comme des effets secondaires de la vaccination] impacte la politique d’utilisation du vaccin Rougeole-Oreillons-Rubéole, notamment au Royaume-Uni, au nord de l’Europe et, à un degré moindre, aux USA et au sud de l'Europe", relève Jean Beytout (PDF), spécialiste des maladies infectieuses au CHU de Clermont-Ferrand. Une étude frauduleuse de 1998 rapprochant autisme et vaccination est ainsi pointée comme responsable de l'épidémie de rougeole survenue fin 2012 au pays de Galles.
Des défauts de vaccination sont également à l'origine du retour de la coqueluche, de la diphtérie ou encore du tétanos.
Parce qu'on se croit à l'abri de certaines maladies
Le cas de la gale. Associée à tort au manque d'hygiène, elle s'invite partout : dans les écoles, les maisons de retraite ou dans votre lit (parce qu'elle se transmet à l'occasion de contacts prolongés, elle est associée à une maladie sexuellement transmissible). En 2011, l'INVS (PDF) a confirmé son retour. Pour éviter la diffusion de l'infection, il préconise notamment un "renforcement de la sensibilisation du public et des cliniciens pour le diagnostic précoce".
Parce qu'éradication ne signifie pas disparition
Le cas de la variole. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a décrété l'éradication de la variole en 1980. Il a fallu plus de vingt ans d'un programme mondial de vaccination sans précédent pour venir à bout de ce virus extrêmement résistant, accusé d'avoir emporté 300 000 personnes pour le seul XXe siècle. Mais si plus personne ne souffre aujourd'hui de la variole, le virus, lui, est toujours parmi nous. Dans des cadavres prisonniers du permafrost, le sol glacé de Sibérie, relate Le Figaro, mais aussi dans deux laboratoires, l'un russe, l'autre américain.
Outre la menace d'un accident digne d'un film-catastrophe, la variole a refait parler d'elle au lendemain du 11-Septembre, citée comme potentielle menace bioterroriste. Un risque "sans doute extrêmement faible" et "difficile à apprécier", a conclu le Haut conseil de la Santé publique en 2012 (PDF), dans sa révision du dernier "Plan variole" publié six ans plus tôt. En 2013, les scientifiques travaillent toujours à des vaccins efficaces – au cas où.
Parce qu'une maladie en voie de disparition peut ressurgir
Le cas de la poliomyélite. Protéger la population mondiale d'une maladie est un travail long et coûteux. L'OMS, qui pensait venir à bout de la poliomyélite en 2000, a publié en 2013 un plan sur six ans en vue de son éradication totale. Les derniers pays d'endémie sont l'Afghanistan, la Pakistan et le Nigeria. Mais même les pays "libérés" de la polio peuvent connaître des résurgences de la maladie. Ce fut le cas en Somalie cet été, rapporte la Fondation Bill et Melinda Gates (en anglais). Au mois d'août, le virus a également été détecté dans des canalisations en Israël, selon Euronews. Les Etats doivent donc pouvoir être en mesure de répondre à l'émergence de maladies anciennes, voire oubliées.
Fin août, 160 personnes ont été hospitalisées au Kirghizistan après la mort d'un garçon atteint de peste bubonique. Cette maladie extrêmement contagieuse n'avait pas été observée dans le pays depuis trente ans.
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