Santé : la résistance aux antibiotiques pourrait causer plus de 39 millions de morts d'ici 2050

Selon une étude de modélisation parue dans "The Lancet", l'antibiorésistance fait craindre une augmentation de 70% des décès liés à des bactéries résistantes aux antibiotiques.
Article rédigé par Anne Le Gall
Radio France
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Les Français sont parmi les cinq plus gros consommateurs d'antibiotiques en Europe (photo d'illustration). (FRÉDÉRIC DOUCHET / MAXPPP)

Si le phénomène était connu, ses conséquences n'étaient encore chiffrées. Pour la première fois, une étude évalue l'impact de l'antiobiorésistance à travers le temps et tente d'en estimer l'évolution. Selon les résultats qui concernent plus de 200 pays, dévoilé lundi 16 septembre dans la revue médicale The Lancet, les scientifiques sont formels : dans les 25 ans à venir, 39 millions de personnes risquent de mourir dans le monde du fait de bactéries résistantes aux antibiotiques. C'est presque autant que la population du Canada.

Déjà reconnu comme un défi sanitaire majeur, il est attendu que la résistance aux antibiotiques - lorsque des bactéries ou d'autres agents pathogènes subissent des modifications les empêchant de réagir aux traitements antimicrobiens - va s'aggraver. 

Face à ces médicaments de plus en plus utilisés, les bactéries développent en effet des mécanismes génétiques de défense et il s'agit là d'un problème de santé aussi grave que le VIH ou le paludisme, écrivent ces chercheurs. Ils ont étudié les données de 520 millions de personnes et ont constaté que, de 1990 à 2021, plus d'un million de personnes par an dans le monde ont succombé directement par antibiorésistance.

Les seniors plus touchés que jamais

Dans le détail, les chercheurs se sont penchés sur 22 agents pathogènes, 84 combinaisons entre pathogènes et traitements, 11 syndromes infectieux chez des personnes, de tous âges, de 204 pays et territoires.

Sur ces trois décennies, les décès d'enfants de moins de cinq ans directement causés par une résistance aux antibiotiques ont chuté de plus de 50%, la prévention et le contrôle des infections s'étant améliorés chez les nourrissons et les jeunes enfants. Moins fréquentes chez ces enfants, les infections sont cependant devenues plus difficiles à traiter lorsqu'elles surviennent. Parallèlement, les décès d'adultes de 70 ans ou plus ont bondi de plus de 80% sur la période, avec le vieillissement rapide des populations et la plus grande vulnérabilité des personnes âgées aux infections.

Le nombre de victimes directes pourrait atteindre 1,91 million par an dans le monde d'ici 2050, un bond de plus de 67% comparé à 2021, selon les modélisations faites par les chercheurs. D'ici la moitié de ce siècle, l'antibiorésistance jouerait plus largement un rôle dans 8,22 millions de décès chaque année, soit une hausse de 74,5% comparé à 2021. Au total, entre 2025 et 2050, l'antibiorésistance pourrait causer directement plus de 39 millions de morts dans le monde et serait associée à 169 millions de décès, estiment les scientifiques. 

Aujourd'hui, l'antibiorésistance entraîne déjà 5 500 décès par an en France. Cette étude du Lancet rappelle donc qu’à défaut de découvrir de nouvelles générations d'antibiotiques, la seule parade, c'est éviter la surconsommation de ces médicaments, aussi bien chez l'homme que chez l'animal. 

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