Déremboursement de l'homéopathie : une organisation d'homéopathes critique une "évaluation biaisée"
Daniel Scimeca, président de la Fédération française des sociétés d’homéopathie regrette de ne pas pouvoir débattre avec la Haute Autorité de santé qui a rendu un avis défavorable au remboursement des médicaments homéopathiques.
La Haute Autorité de santé (HAS) s'est prononcée vendredi 28 juin pour un déremboursement des produits homéopathiques. Le médecin généraliste et homéopathe Daniel Scimeca, président de la Fédération française des sociétés d’homéopathie (FFSH) a regretté sur franceinfo que la HAS ait "refusé de prendre en compte la spécificité du médicament homéopathique" et réclame que la ministre de la Santé Agnès Buzyn "prenne son temps pour qu'on puisse avoir une vraie évaluation".
franceinfo : Comment avez-vous accueilli cette recommandation de la HAS ?
Daniel Scimeca : Nous sommes à la fois déçus et en colère. D'abord, cette information a fuité deux fois. Cela pose des questions sur le sérieux de l'institution. Et surtout, nous ressentons une grande déception parce que malgré nos mises en garde et nos interventions, la HAS a refusé de prendre en compte la spécificité du médicament homéopathique. Pour nous, chaque patient a un médicament différent qui lui correspond. Si on regarde les études comme pour les médicaments classiques, en réclamant des grands nombres et le même traitement pour tout le monde, c'est sûr que l'affaire est pliée d'avance. C'est ce qui s'est passé. Nous estimons que cette évaluation est biaisée. On réclame du temps et on demande à Madame Buzyn qu'elle prenne son temps, pour qu'on puisse avoir une vraie évaluation non biaisée qui prenne compte de notre spécificité.
Pourquoi dites-vous que c'est biaisé quand on sait que la HAS dit avoir analysé 300 études et examiné une trentaine de contributions, dont celles d'homéopathes ?
Moi-même j'ai été reçu par la HAS. Mais nos arguments ne sont pas retenus : à partir du moment où une étude ne comporte pas un nombre suffisamment important de patients, ils retoquent systématiquement. C'est ce que j'appelle ne pas tenir compte de la spécificité. D'autre part, je signale qu'il n'y a pas un seul expert homéopathe à la Haute Autorité de santé. On réclame aussi de pouvoir faire partie des discussions, de pouvoir défendre nos points de vue et nos études, qui existent. Passer son temps à dire que l'homéopathie n'a pas fait la preuve de son efficacité, c'est un mensonge.
Pourquoi est-ce un mensonge ?
Je citerai seulement une étude : l'étude EPI 3 [commandée par Boiron]. Elle a été effectuée par la société Laser qui est totalement indépendante, et elle montre que dans trois grands domaines des pathologies qui impactent le plus la vie des Français, les douleurs, les angoisses, la dépression, les insomnies et les infections des voies aériennes, l'homéopathie marche aussi bien que les médicaments traditionnels. Avec deux fois moins d'antibiotiques, deux fois moins d'antalgiques et d'anti-inflammatoires et trois fois moins de psychotropes. Mais on ne peut pas débattre avec la HAS. Donc maintenant, notre regard se tourne vers le gouvernement. Lorsqu'une pétition rassemble 1 100 000 signatures contre le déremboursement, on ne règle pas le problème dans un cabinet ministériel. Il faut un débat beaucoup plus large : un débat parlementaire et même un débat public parce que le patient a son intelligence. Trois Français sur quatre sont satisfaits, si ce n'est pas un service médical suffisant, je ne comprends pas.
Comment expliquez-vous alors que les laboratoires n'ont pas pu apporter d'arguments scientifiques convaincants ?
Ils ont apporté des arguments scientifiques qui n'ont pas convaincu, c'est différent. Ils n'ont pas convaincu parce qu'on regarde les choses avec des critères qui ne nous correspondent pas. Si vous dormez mal, si je dors mal et si une troisième personne dort mal, on n'aura pas le même médicament, parce qu'on n'a pas la même façon de réagir. On a des médicaments essentiels qui évitent les somnifères et l'abus de psychotropes, et on sait que c'est un vrai problème de santé publique en France. Ce n'est pas un placebo, on a des études qui montrent le contraire. On ne demande que ça, d'avoir des plateaux télé et radio où on puisse détailler études par études et on puisse se défendre.
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