Anti-inflammatoires : "Automédication ne veut pas dire autodestruction", prévient le président de l'ordre des pharmaciens d'Ile-de-France
Martial Fraysse, président de l’ordre des pharmaciens d’Ile-de-France, membre de l’Académie de pharmacie, alerte vendredi sur franceinfo sur les risques que présente l'utilisation inappropriée du kétoprofène et l'ibuprofène en automédication.
Le président de l'Ordre des pharmaciens d'Ile-de-France alerte sur l'usage des anti-inflammatoires. Les deux médicaments les plus vendus, le kétoprofène et l'ibuprofène pourraient favoriser des complications infectieuses graves, selon l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). L'enquête se fonde sur les années 2000 à 2018. 386 cas d'infections graves et de complications infectieuses graves pourraient être liés à la prise de ces médicaments. "Le pharmacien c'est le gardien des 'poisons'", explique Martial Fraysse, pharmacien à Fontenay-sous-Bois et président de l’ordre des pharmaciens d’Ile-de-France, membre de l’Académie de pharmacie.
franceinfo : Pourquoi avoir attendu dix-huit ans pour alerter sur ce sujet ?
Martial Fraysse : Cela fait plus de vingt ans que l'on déconseille l'utilisation de certains anti-inflammatoires comme l'ibuprofène ou le kétoprofène chez les enfants et les jeunes adultes suite aux effets secondaires graves qui ont été observés dans la population. On observe depuis une vingtaine d'années deux décès par an, plus des complications infectieuses graves qui sont décrites, qui peuvent toucher soit des infections cutanées, des infections ORL ou pulmonaires. On se retrouve face à deux bactéries, des pneumocoques ou des streptocoques qui ont brutalement leurs effets amplifiés par l'utilisation de ces anti-inflammatoires. On ne doit pas les utiliser comme ça au coup par coup, même sur des courtes durées du fait du danger qu'ils entraînent.
Faut-il vendre désormais ces médicaments sur ordonnance uniquement ?
C'est un débat qu'il faut avoir avec l'Agence du médicament. L'ibuprofène est un médicament très utilisé mais on sait bien qu'il a des effets délétères notamment pour les reins. Ces dangers infectieux nécessitent d'avoir, au moins à chaque prise, l'avis d'un professionnel de santé, un pharmacien ou un médecin. Aujourd'hui on va vers le développement de l'automédication mais automédication ne veut pas dire autodestruction. Il faudrait surtout que les patients qui ont de plus en plus de mal à voir des médecins du fait de la difficulté d'accès liée à la diminution des médecins généralistes, aient un conseil de leurs pharmaciens facilement accessibles. Il ne faut pas hésiter pour connaître la meilleure solution par rapport à des symptômes qui peuvent paraître anodins mais qui peuvent dégénérer très vite vers quelque chose de dramatique.
Faut-il lancer une campagne d'information sur le sujet ?
Je pense que c'est nécessaire. Le pharmacien c'est le gardien des "poisons" ! Même dans la pharmacie familiale, ce qu'on a dans son armoire présente des dangers. Donc plus on est informés, plus on est en sécurité. Actuellement, on a encore des jeunes patients qui ont des varicelles et qui prennent de l'ibuprofène. Ils sont mis en danger parce que les parents sont mal informés. Informer c'est sauvegarder. Je conseille donc d'utiliser en priorité du paracétamol. C'est un médicament assez sécurisant mais il faut aussi se rappeler de cette jeune femme qui s'était détruit le foie en prenant trop de paracétamol. Un médicament n'est pas un produit comme un autre, il faut faire attention. Les abus de prise de médicaments peuvent entraîner des conséquences désastreuses.
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