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Covid-19 : aujourd'hui, le pass sanitaire aux frontières "n'a pas un grand intérêt" pour "bloquer le virus", affirme un épidémiologiste

Le Professeur Flahault, épidémiologiste, directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de l'université de Genève, appelle à sortir du "tout vaccinal" et mettre en place "d'autres dispositifs", comme "un plan ventilation au niveau national", notamment.

Article rédigé par franceinfo
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Antoine Flahault, le 10 mars 2006, à Saint-Denis de La Réunion. (RICHARD BOUHET / AFP)

Le Pr Antoine Flahault, épidémiologiste, directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de l'université de Genève, a estimé mercredi 13 juillet sur franceinfo que le pass sanitaire "n'avait pas un grand intérêt sur le plan épidémiologique" aujourd'hui. La Première ministre, Elisabeth Borne, a pourtant estimé que "l'heure" était "grave" après le rejet par l'opposition (Nupes-LR-RN) du pass sanitaire aux frontières.

franceinfo : Comment réagissez-vous au rejet du pass sanitaire aux frontières par les oppositions à l'Assemblée nationale ?

Pr Flahault : Le pass sanitaire a été instauré en France il y a exactement un an. Mais à l'époque, il a été mis en place essentiellement pour stimuler la couverture vaccinale des Français. Et ça a très bien fonctionné puisque la France s'est pratiquement située dans le peloton de tête des pays européens les mieux vaccinés. Aujourd'hui, la situation est très différente. On n'a pas un vaccin qui est très efficace sur la transmission du virus.

Le vaccin est très efficace pour éviter les formes graves de la maladie, celles qui nous conduisent à l'hôpital et parfois même au décès. Mais la couverture vaccinale est très élevée et donc, on n'a pas tellement aujourd'hui besoin de ce pass vaccinal. Il n'a pas cette vertu de bloquer le virus. Le pass sanitaire aux frontières, très clairement, n'a pas un grand intérêt sur le plan épidémiologique. Ce n'est pas celui qui va être la mesure qui va permettre de freiner la diffusion des nouveaux variants ou l'entrée du virus sur le territoire.

Ce n'est pas juste un coup politique, selon vous ?

Ce n'est pas ma compétence le côté politique. Le seul message qui a peut-être été envoyé aux autorités et au gouvernement et qui peut être intéressant, c'est de sortir du tout vaccinal. On voit bien aujourd'hui les limites d'une politique complètement centrée sur le vaccin. Le vaccin est extrêmement important, il ne faut pas le remettre en question parce que c'est grâce aux vaccins qu'on a plus de confinement. C'est grâce aux vaccins qu'on n'a plus ces couvre-feux et ces quarantaines.

Le vaccin a permis de désaturer la tension hospitalière clairement et, bien sûr, d'éviter un grand nombre de décès. Mais on voit les limites du vaccin. On a toujours ces vagues aujourd'hui. Il faut sortir d'une politique entièrement vaccinale. Il faut qu'il y ait d'autres dispositifs. J'appelle à un plan ventilation au niveau national, qui permettrait d'améliorer la qualité de l'air intérieur. C'est là où se passent toutes les transmissions aujourd'hui. Il faut vraiment que l'air intérieur soit de bien meilleure qualité aujourd'hui.

Faut-il rendre obligatoire le masque ?

C'est pareil, c'est très politique. Ce que disent les scientifiques, c'est que le masque et surtout le masque FFP2, le plus filtrant, c'est un masque qui permet de réduire la charge de virus qui va vous infecter si jamais vous êtes quand même infecté, même en portant le masque, parce que ça peut arriver. Ce n'est pas du 100%, mais ça réduit le risque. Et si jamais vous êtes infecté et que vous avez beaucoup moins de virus, vous ferez une forme beaucoup moins grave et vous ferez beaucoup moins souvent de Covid long. Donc oui, le masque, il faut le conseiller. Après, c'est aux politiques de décider si c'est par l'obligation, par la recommandation. Ce n’est pas tellement scientifique.

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