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Coronavirus : stocks exsangues, importance minimisée... Mediapart révèle les ratés du gouvernement sur la question des masques

Selon une enquête du site d'investigation, l'exécutif actuel porte une grande responsabilité dans le manque de masques en France, alors que ces protections sont une denrée précieuse au moment où le monde est frappé par l'épidémie.

Article rédigé par franceinfo
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Des pompiers équipés de masques lors de la prise en charge d'un patient atteint du Covid-19, le 24 mars 2020 à Paris. (FRANCK FIFE / AFP)

Les tensions et les pénuries autour des protections respiratoires suscitent la colère des personnels de santé depuis plusieurs semaines, alors que la France fait face à une grave crise sanitaire en raison de l'épidémie de coronavirus.

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Comment expliquer ces difficultés à trouver des masques chirurgicaux et FFP2 ? Le site Mediapart a consacré une enquête à la question, jeudi 2 avril, dans laquelle est révélée une série de dysfonctionnements et de lenteurs au plus haut sommet de l'Etat.

Des stocks exsangues et des débuts poussifs

Face à l'épidémie de Covid-19, la France est entrée dans la bataille avec un lourd handicap. Fin janvier, en effet, le pays ne compte aucun masque FFP2 et dispose simplement d'un stock de 80 millions de masques chirurgicaux – une autre commande de 80 millions est toutefois en cours, révèle Mediapart. Cette absence de réserves nationales est due à un changement de doctrine adopté en 2013, quand le gouvernement a choisi de déléguer les commandes de masques aux établissements de santé.

Alors que la situation devient inquiétante, fin janvier, l'agence Santé publique France est chargée par la direction générale de la santé d'acquérir 1,1 million de masques FFP2, selon un document consulté par le site d'investigation. Ce nombre est sous-évalué au regard des besoins et, début février, l'agence est cette fois chargée d'en trouver 28,4 millions. Mais elle échoue.

Deux semaines plus tard, l'agence reçoit simplement 500 000 masques et en commande 250 000 autres, bien loin des objectifs fixés. Pour expliquer cet échec, le site Mediapart évoque notamment la forte concurrence internationale et des procédures de marchés publics inadaptés à l'urgence.

Une cellule dédiée pour trouver des masques aux résultats décevants

Le ministère de la Santé estime pourtant qu'il est nécessaire d'obtenir 175 millions de masques FFP2 sur la base d'une épidémie de trois mois. Début mars, une cellule est donc créée pour tenter de rattraper le temps perdu. Cette "cellule de coordination interministérielle de logistique" est chargée de livrer bataille pour obtenir les précieuses protections respiratoires. Mais le monde entier est alors en compétition.

En trois semaines, et dans un marché extrêmement tendu, les agents ne parviennent à mettre la main que sur 40 millions de masques, selon le ministère de la Santé. Ils sont à moitié issus de la production française, des réquisitions et des dons et à moitié importés de l'étranger. Plusieurs occasions ont été manquées, pointe Mediapart, auprès de fournisseurs chinois notamment. L'Etat n'a pas donné suite à certaines propositions détaillées, rédigées par des fournisseurs, estimant qu'elles manquaient de fiabilité. Dans ce contexte exceptionnel, certaines offres sont en effet formulées par de fausses sociétés ou à des prix déraisonnables.

Mais d'autres auraient sans doute mérité l'attention. L'entreprise Prolaser avait annoncé être en mesure d'importer 500 000 masques par jour grâce à ses agents en Chine. Elle n'a jamais reçu de réponse des services de l'Etat et ce sont finalement les conseils départementaux de Vendée et du Maine-et-Loire qui lui ont passé commande. Une première livraison a atterri le 30 mars et sera destinée aux Ehpad et aux aides aux personnes âgées.

Le site Mediapart cite également l'exemple d'une société d'importation d'objets publicitaires qui avait repéré un stock de 500 000 masques chirurgicaux sans norme européenne. Faute de retour des douanes, il a dû laisser filer la commande.

L'importance des masques minimisée

Fin janvier, le gouvernement minimise l'importance du port du masque, voire même le déconseille, sauf chez les personnes infectées. Ces consignes sont maintenues les semaines suivantes. "Les masques chirurgicaux sont utiles en cas d'épidémie et ils sont distribués aux personnes de retour de Chine et aux personnes au contact de malades", répond le directeur général de la santé, Jérôme Salomon, à une médecin de la Sarthe qui l'alerte sur ce point. "Il faut en priorité équiper les soignants, les stocks sont limités", écrit le numéro deux du ministère à un tiers qui offre son aide pour obtenir des masques. Ce qui suggère que les consignes sanitaires sont surtout liées à la pénurie.

Il n'y a pas besoin d'un masque quand on respecte la distance de protection vis-à-vis des autres.

Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement

le 19 mars

Mais le ton est bien différent en coulisses. Il faut "augmenter massivement, massivement, notre autonomie en matière de masques", déclare ainsi la secrétaire d'Etat au ministère de l'Economie Agnès Pannier-Runacher lors d'une conférence avec des professionnels du textile, selon un enregistrement consulté par Mediapart. "L'enjeu pour nous, c'est finalement de préparer la sortie de confinement, où on sait qu'il faudra massivement équiper."

Récemment, George Gao, directeur général du Centre chinois de contrôle et de préventions des maladies, a expliqué à la revue Science (en anglais) que "la grande erreur aux Etats-Unis et en Europe [était], à [s]on avis, que la population ne porte pas de masque". Une étude parue dans la revue The Lancet (en anglais) estimait également qu'une généralisation du masque pouvait réduire les risques de transmission. 

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