Coronavirus : à la criée de Lorient, "peu de poisson, peu de clients" et une "vraie crise"
Avec le confinement, l'activité du port est divisée par deux. Toute la filière poissonnerie s'accroche à la grande distribution, la seule qui a pu conserver une clientèle.
Des bateaux qui ne quittent plus les ports, des poissons qui ne trouvent plus de clients ou de filières de vente, l’économie de la pêche tangue sérieusement depuis la mise en place du confinement. Au port de Lorient, coûte que coûte, les marins s’accrochent avec un mot d’ordre à destination des Français : "Continuez à manger du poisson !"
Une pêche réduite de moitié
Il est 4h30 du matin, c’est l’heure de la criée, de la vente des poissons arrivés dans la nuit. Les marins s’activent pour présenter la pêche du jour, mais ce n'est pas vraiment l’effervescence habituelle. "On est à 50 % de nos capacités. C'est tendu et tout le monde s'interroge sur la capacité du marché à absorber les quantités", déplore Lyonel Madec, le directeur de la criée.
D’ailleurs, dans la salle des ventes qu'il faut observer à travers les vitres pour respecter au mieux le confinement, ils ne sont pas plus d’une vingtaine d’acheteurs contre 90 à taux plein avec là, en plus, distanciation oblige, un siège sur deux retiré. "Devant eux le poisson défile sur le tapis et il y a deux grands écrans où les enchères s'affichent", décrit Lyonnel Madec.
Pour nous c'est une vraie crise. Il y a déjà une personne qui a perdu son boulot.
Eric, ostréiculteur-poissonnier à Badenà franceinfo
À la sortie, Éric, ostréiculteur-poissonnier à Baden, est désemparé. Sans marché depuis 15 jours, les conséquences du coronavirus sont déjà très concrètes : sur six salariés, deux sont en chômage partiel, un autre n’a pu signer le CDI promis. "Je n'ai pas pu renouveler son CDD parce que ça fait déjà quinze jours qu'on ne travaille pas."
Mais avec le peu de bateaux en mer et la fermeture de la restauration collective, c’est toute la filière qui souffre, pas seulement les petits, nous explique le mareyeur Jean Besnard, gérant de Moulin Marée. "On essaie d'adapter la production en fonction du peu de bateaux qui sont en mer, du peu de poisson qu'on arrive à trouver et du peu de clients qui sont encore demandeurs. La grande distribution, c'est la seule porte de sortie qu'on ait et les seuls à pouvoir encore ne serait-ce qu'attirer du monde."
C'est vrai que tous les soirs on se demande de quoi sera fait le lendemain parce qu'on ne sait pas du tout comment les gens consomment en confinement.
Jean Besnard, mareyeurà franceinfo
Plusieurs grandes surfaces se sont engagées à soutenir l’activité. Marcel Evenas, ancien marin-pêcheur, est ainsi présent tous les jours pour alimenter, vaille que vaille, la poissonnerie d’une enseigne de Riantec, en périphérie de Lorient. "Là ce matin j'ai acheté de la langoustine, un peu de sole un peu de maquereau mais je vend beaucoup moins que ce que je vends d'habitude, 30 à 40 % de moins. La culture du poisson tend à se perdre avec les jeunes générations, les anciens sont un peu plus prudents quant à leur sortie dans les magasins et pour le coup ça a un impact sur nos ventes de poissons entiers." Les prix, repartis à la hausse cette semaine, risquent encore de compliquer la tâche.
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