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Chauffeurs routiers bloqués à Douvres : "C'est honteux. On est devenus les bagnards de la surconsommation", déplore la représentante des transporteurs routiers

Depuis dimanche soir, des centaines de chauffeurs poids lourds sont bloqués côté britannique. Et même si depuis peu la ciruclation reprend, rares sont ceux qui sont parvenus à débarquer en France. Certains risquent même de passer Noël dans leur camion.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des files de poids lourd sur l'A16 vers Calais (Pas-de-Calais). Photo d'illustration. (EMMANUEL BOUIN / FRANCE-BLEU NORD)

Depuis plusieurs jours, des centaines de chauffeurs routiers sont bloqués dans le port de Douvres en Angleterre. Ils attendent l’autorisation pour retourner en France, dans leur camion, en file indienne et dans des conditions déplorables, dénonce Aline Mesples, la présidente de l’Organisation des Transporteurs Routiers Européens : "Jamais, je n'ai vu ça. C'est honteux. On est devenus les bagnards de la surconsommation. C'est insupportable".

franceinfo : Le système se débloque au fil de l'eau d’après le ministre en charge des Transports, est-ce que vous avez le même retour de la part des chauffeurs qui sont coincés sur place ?

Aline Mesples : Ça veut dire quoi le fil de l'eau ? A raison de 1 500 tests par jour, ça veut dire qu'il faut dix jours pour décoincer la file existante, sans compter ce qui peut rentrer dans la file encore. Moi, je suis ulcérée et très en colère. On a vécu une année 2020 épouvantable. Les conducteurs routiers ont déjà à deux reprises été les oubliés de cette crise et là, on continue. C'est impardonnable, impardonnable !

Pourquoi à deux reprises ?

Parce qu'on a vécu un premier confinement où on avait oublié - en fermant les restaurants routiers - que les salariés du transport devaient aller aux toilettes, se laver et manger. Donc, on a mis un certain temps à retrouver des conditions quasi-supportables. Je n'ai pas d'idée sur le nombre de camions encore bloqués, mais je réagis comme une citoyenne qui est vraiment triste et malheureuse, pour notre profession et pour ses représentants. Chacun est là à attendre son sapin de Noël, ses cadeaux et son repas. Personne n’imagine qu’il y a des bagnards, parce que c’est ce qu’ils sont devenus : des bagnards de notre économie. Moi, j'ai des témoignages où on a fait passer des sandwichs dans des files, mais qu'une file sur deux, ça veut dire qu'il y en a un qui mange et l'autre ne mange pas ? Dans quel monde vit-on ?

Est-ce que vous savez ce qui se passerait pour des routiers qui seraient testés positifs au Covid-19 ?

Pour l'instant, on en est aux hésitations, éventuellement des hôtels, réquisitionnés, mais qui paierait, on ne sait pas ? Où seront ces hôtels, à quelle distance des véhicules ? On ne sait pas. Il faut se dire quand même que les conducteurs ne sont pas tous partis pour trois mois de campagne. Il y en a certains, en particulier les Français, qui font l'aller-retour dans la journée. L'Angleterre, c'est à 140 km de la France. Ces gens-là qui n'ont pas de vêtements, qui n'ont pas ce qu'il faut pour rester plusieurs jours bloqués, on fait comment ? Ça fait 20 ans que je travaille et que je suis syndicaliste dans le transport routier. Jamais je n'ai vu ça. C'est honteux. Je parle au nom de mes collègues transporteurs et je parle au nom des conducteurs. On est tous dans la même galère. On est devenus les bagnards de la surconsommation.

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