"C'est explosif" : un éducateur de l'Aide Sociale à l'Enfance alerte sur la tension due au confinement dans les foyers d'hébergement
En raison du confinement décrété pour lutter contre le Covid-19, plusieurs foyers d'hébergement de l'Aide sociale à l'enfance ont dû fermer leurs portes par manque de personnel. Dans les autres foyers, la situation est de plus en plus tendue.
C’est un huis-clos explosif qui se joue en ce moment à l’Aide sociale à l’enfance : des mineurs enfermés 24 h sur 24 ensemble, sans école, sans visite ni activités... Cette situation concerne plus de 90 000 mineurs et se tend de jour en jour : "Ce sont des enfants qui sont déjà fragiles, qui ont tendance à être instables ou violents. Donc, sans aucune activité et avec moins d'éducateurs que d'habitude, c'est explosif, reconnaît un éducateur référent de l'ASE dans le sud-ouest de la France. Il y a des éducateurs qui sont au moins autant sous pression que des soignants dans les hôpitaux".
Selon le cabinet du secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance, entre 20 et 40% du personnel qui travaille avec les enfants de l’ASE sont absents en ce moment. Certains sont malades, d’autres doivent garder leurs enfants. Pour ceux qui restent, c’est plus de travail et un gros risque d’attraper le virus : "Quand il faut séparer deux gamins en train de se battre ou quand il faut faire un câlin à un enfant angoissé parce qu'il ne voit pas ses parents, on ne peut pas être à un mètre de distance", explique l'éducateur que nous avons joint.
Avec ces publics-là, c'est impossible d'appliquer les gestes barrières.
Un éducateur de l'ASEà franceinfo
Si un cas de Covid-19 est avéré dans l’un des foyers d’hébergement, on ne sait pas comment gérer, avoue cet éducateur. Certains professionnels ont même décidé de dormir au travail pour éviter de contaminer leurs proches.
Aucun chiffre national n’existe pour l’instant concernant le nombre de mineurs de l’ASE touchés par le Covid-19. Mais certains départements, comme ceux de l’Île-de-France font état de plus d’une vingtaine d’enfants diagnostiqués ou suspectés d’avoir le coronavirus.
Huis-clos familial
L’autre problème pour l’ASE, ce sont les visites à domicile dans les familles potentiellement violentes. D'habitude les éducateurs vont régulièrement sur place pour vérifier que tout va bien, mais avec le confinement le lien est totalement rompu. "Il n'y a plus l'école, qui pouvait faire remonter [des cas de violence familiale] et nous ne pouvons plus aller sur place pour sonder la situation. Dans les huis-clos familiaux, quand on va sortir du confinement, on va se rendre compte que des horreurs se sont passées."
Des enfants qui, même si ils sont victimes de violences et repérés, auront du mal à trouver une place d’hébergement d’urgence : la plupart les foyers sont complets et les familles d’accueil acceptent de moins en moins de nouveaux arrivants, de peur d’être contaminées.
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