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Confinement, mode d'emploi 5. Le couple au risque du confinement

Le confinement peut être trompeur dans une relation de couple. Certains couples peuvent croire qu'ils ne sont plus faits pour s'entendre. La psychanalyste Claude Halmos nous explique qu'il faut se méfier de cet "intrus" : le confinement.  

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un couple déambule dans les allées d'un marché à Montmartre (Paris), le 22 mars 2020. (EDOUARD RICHARD / HANS LUCAS)

C’est dans ma tête est devenu, durant le confinement, Confinement, mode d’emploi, pour répondre aux questions de nos auditeurs.

Cette semaine, Serge nous dit : "Nathalie et moi vivions ensemble depuis deux ans ; tout allait bien, et nous avions des projets. Mais au bout de cinq semaines de confinement, dans notre deux-pièces, nous ne pouvons plus nous supporter, et j’en viens à penser que nous ne sommes vraiment pas faits l’un pour l’autre."

franceinfo : qu’en pensez-vous, Claude Halmos?      

Claude Halmos, psychanalyste : Les difficultés de la vie confinée ont conduit beaucoup d’hommes et de femmes à penser qu’ils n’étaient pas faits pour vivre ensemble. Et c’est un piège. Parce que ces couples s’interrogent sur ce qu’ils vivent, comme ils l’auraient fait avant le confinement, c’est-à-dire en partant du principe qu’ils sont deux.

Or, dans le confinement - il est essentiel de le comprendre - on n’est pas deux, on est trois. Parce qu’il n’y a pas seulement soi, et l’autre. Il y a soi, l’autre, et le confinement qui, comme le ferait la présence d’un intrus, change sinon tout, du moins beaucoup de choses.          

Vous pouvez nous en dire plus ?      

Le confinement, qui nous prive d’espace, de motricité, de solitude, de relations, et nous contraint à la promiscuité, pèse très lourdement sur nous. Nous faisons en sorte, pour pouvoir tenir, de ne pas trop le sentir, mais il nous fait violence, et nous fragilise ; comme le ferait une douleur permanente - migraine, ou rage de dents - qui nous rendrait tout, insupportable. Et il pèse aussi, bien sûr, sur les couples.  

De quelle façon ?      

Les êtres humains ne sont pas faits pour vivre ensemble 24h sur 24, dans un espace limité (les détenus ne le savent que trop). Et de plus, le rapport à l’autre a besoin, pour fonctionner, de manque. Il faut que l’autre nous manque, pour que nous puissions lui parler : les enfants, par exemple, n’accèdent au langage qu’au moment où, devenus autonomes, ils sortent du corps à corps avec les adultes. Une trop grande proximité peut nuire à la communication (que raconter à un autre, qui est toujours là ?), mais aussi à la sexualité.

Le manque est nécessaire à la relance du désir, et une vie (trop) quotidienne peut le tuer, tous les couples le savent. Donc concernant le couple, le confinement a, si l’on peut dire, "tout faux".     

Que conseilleriez-vous à nos auditeurs ?      

Il faudrait, je crois, que chacun essaye de prendre conscience de la façon dont le confinement a pesé, et pèse sur lui ; puis, si c’est possible, de comprendre avec l’autre comment il a pesé sur leur couple. En se donnant la possibilité, si la situation est trop conflictuelle, de "faire un break" (court), pour que chacun puisse, de son coté, se retrouver.

Mais je pense qu’il serait vraiment dommage de prendre des décisions définitives sans s’être donné, au préalable, la possibilité de revivre à deux, c’est-à-dire sans ce "troisième", indésirable et perturbant, qu’est le confinement.                                              

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