Alzheimer : "La musique peut être utilisée comme un soin au même titre que d'autres soins"
"Quand on écoute de la musique, on crée littéralement une symphonie cérébrale, c'est-à-dire qu'on stimule de nombreuses zones du cerveau", explique le docteur Gérard Mick.
"La musique peut être utilisée comme un soin, au même titre que d'autres soins", a déclaré samedi 15 septembre sur franceinfo le docteur Gérard Mick, neurologue au centre hospitalier de Voiron (Isère) et spécialiste des effets de l'écoute musicale chez les malades, notamment d'Alzheimer. Il réagissait à l'ouverture - dans quatre ans - du centre européen de la musique à la villa Viardot à Bougival (Yvelines), où s'est rendu Emmanuel Macron pour les Journées européennes du patrimoine. Le centre devrait être doté d'un laboratoire de recherches sur les liens entre la musique et le cerveau.
franceinfo : La musique a-t-elle un réel effet sur les personnes qui souffrent de maladies neurodégénératives ?
Gérard Mick : Bien sûr. La musique peut être utilisée comme un soin, au même titre que d'autres soins. Elle apparaît aujourd'hui comme un outil extrêmement important pour réduire l'anxiété, les troubles comportementaux et on sait aujourd'hui - en particulier chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer - qu'elle peut stimuler certaines récupérations. Par exemple, certains patients qui ne peuvent plus parler correctement et qui ont des grosses difficultés de mémoire qu'on appelle autobiographique, c'est-à-dire sur leur vie passée il y a quelques minutes, ces patients sont capables d'apprendre des mélodies, des paroles sur les mélodies et également de revivre une cohésion sociale lorsqu'ils travaillent la musique en groupe. L'écoute musicale est véritablement devenue un outil thérapeutique important dans cette maladie.
Est-ce qu'on arrive à comprendre ce qu'il se passe chez ces personnes malades, dans leur cerveau ?
Quand on écoute de la musique, on crée littéralement une symphonie cérébrale, c'est-à-dire qu'on stimule de nombreuses zones du cerveau. La première, celle qui intègre la perception sonore, mais aussi une autre qui va préparer le mouvement, ce qui explique bien évidemment les liens entre la musique et la danse, une autre encore qui va être liée à la sensation de plaisir et enfin, une chose importante et qui a été récemment mise en avant, une zone du cerveau qui permet de mieux ressentir la perception intime de son corps. En fait, cette symphonie cérébrale, c'est une multitude d'éléments qui peuvent servir à être stimulés à des moments précis du soin et peuvent avoir des effets dans différentes maladies. Dans la maladie d'Alzheimer, il y a des patients qui ne bougent plus, qui ne parlent plus et qui, à l'écoute d'une musique, se mettent à marcher, à rire et à chanter la musique comme s'ils n'avaient jamais oublié. Imaginons quelqu'un qui, à la suite d'un AVC, est en service de rééducation. On sait aujourd'hui qu'on va stimuler la repousse de certains réseaux, de certains liens altérés entre différentes zones du cerveau grâce à la musique jugée plaisante. Ça veut dire que c'est un soin rééducatif. L'écoute musicale est littéralement un soin physiologique.
Est-ce que la musique peut apaiser la douleur physique ?
Bien sûr. La douleur physique, c'est une construction cérébrale. On ne ressent pas une douleur si on n'a pas de cerveau. C'est lui qui va construire la perception douloureuse consciente. La musique a plusieurs rôles dans la douleur : lorsque vous avez mal, écouter de la musique plaisante réduit le niveau de douleur perçu et réduit aussi l'anxiété qui va avec la douleur, les tensions musculaire et corporelle. La musique est une approche non médicamenteuse complémentaire, voire alternative. Comme les cardiologues demandent de faire 30 à 45 minutes de marche par jour, il faut écouter 30 à 45 minutes de musique plaisante par jour parce que ça a un rôle fondamental sur le bien-être.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.