Humiliations, remarques racistes, violences sexuelles... L'AP-HP veut chasser les comportements inadéquats de ses blocs opératoires
Depuis de nombreuses années, les blocs opératoires sont les lieux de tous les dérapages entre collègues : il peut s'agir de harcèlement, de réflexions humiliantes, d'engueulades, ou encore de violences sexuelles. Les mentalités ont certes évolué depuis le mouvement Metoo, mais il reste encore du travail. La présidente du syndicat des internes des Hôpitaux de Paris, Marine Loty, évoque une ambiance parfois malsaine entre collègues alors que patient est endormi : "On a des remarques comme 'Je te pince le téton avec la Kocher' [une pince de chirurgien], des remarques qui sont presque banalisées dans certains blocs."
Le syndicat a recueilli le témoignage d'étudiants en médecine. Outre des remarques ou des comportements à caractère sexuel ressortent aussi beaucoup de scènes d'humiliation. "Beaucoup d'humiliations, beaucoup de faits qui s'apparentent à du harcèlement moral, du type : 'Tu n'y arrives pas, tu fais toujours mal, tu es nul, je ne vois même pas pourquoi tu essayes'... C'est répété et quotidien", détaille Marine Loty.
Le bloc opératoire est un lieu fermé, à l'espace contraint, où travaillent plusieurs métiers de santé, dans le stress, durant de longues heures : un cocktail explosif, explique le Pr Hawa Keita-Meyer. C'est elle, professeur d'anesthésie à l'hôpital Necker à Paris, qui a imaginé une charte de bonne conduite, dans laquelle les professionnels du bloc s'engagent à être "calmes, professionnels, bienveillants et respectueux".
"On peut passer 8 heures, 10 heures, 12 heures ou 24 heures parfois dans ces locaux. Il y a des médecins, des infirmiers, des aides-soignants, des cadres... Et cela peut être dans des situations de tension, parce que le patient est compliqué à prendre en charge ou parce que c'est une urgence, parfois vitale", explique-t-elle.
"Il peut y avoir du stress, ça peut arriver de 'péter un plomb'... Mais il y a un travail à faire, chacun d'entre nous, pour rester dans un cadre de communication bienveillante les uns avec les autres. Il y a des choses qu'on ne laisse plus passer."
Pr Hawa Keita-Meyer, initiatrice de la charteà franceinfo
La charte prévoit aussi que les soignants ne tolèrent plus les mauvais comportements des collègues, et alertent si c'est le cas. Le Pr Keita-Meyer elle-même concède que devoir en passer par une charte de bonne conduite est étonnant, car cela relève finalement du savoir-vivre essentiel.
L'idée de ce texte a été approuvée à l'unanimité en Commission médicale d'établissement. La charte entrera en vigueur dans les prochaines semaines. Est-ce qu'il sera simplement conseillé de la signer ? Le Pr Keita-Meyer souhaiterait que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris oblige tous les professionnels de santé qui travaillent au bloc à la signer.
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