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IVG : "J'ai honte que certains de mes collègues puissent dire des choses pareilles"

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Article rédigé par La rédaction d'Allodocteurs.fr
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Le Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (Syngof) a brandi la menace d'une grève des IVG. Après Agnès Buzyn, de nombreux gynécologues condamnent fermement cette manoeuvre.

Dans un mail envoyé mardi à ses adhérents, le Syngof a invité ses adhérents à "être prêts à arrêter la pratique des IVG". L’objectif était de faire pression sur le ministère de la Santé afin de régler le cas de quinze médecins condamnés à de lourds dommages pour erreur médicale. La ministre de la Santé Agnès Buzyn a condamné une « prise en otage des femmes ».

Le Dr Amina Yamgnane, gynécologue-obstétricienne et membre du Collège national des gynécologues-obstétriciens français (CNGOF) a répondu aux questions du Magazine de la santé.

  • Que pensez-vous de cette menace du Syngof de cesser les IVG ?

Dr Amina Yamgnane : "Pour faire scandale, c’est réussi… On est abasourdis, les bras nous en tombent. Prendre les femmes en otage en espérant négocier avec les autorités sur d’autres problématiques qui ne concernent pas les usagères, c’est extrêmement grave. Ce qui est très gênant de la part de ce syndicat, c’est qu’ils n’en sont pas à leur première polémique. On voit bien comment leur choix d’attaquer l’IVG est leur volonté politique et stratégique."

  • En septembre dernier, le Dr de Rochambeau, l’actuel président du Syngof, avait crée la polémique en assimilant l’IVG à un « homicide »…

Dr Amina Yamgnane : "Il s’agit ni plus ni moins que du révisionnisme. Si la loi française  permet aux femmes de bénéficier des IVG, c’est au nom du fait que le fœtus n’est pas une personne. Donc faire une telle affirmation, c’est affirmer qu’il y faudrait revoir la loi. Le Syngof en est à son troisième coup d’essai contre l’IVG. La première charge avait été donnée par le Dr Paganelli qui avait affirmé que les IVG devaient être pratiquées pendant les week-ends parce que la Sécurité sociale n’avait pas à prendre en charge les arrêts de travail occasionnés… Autrement dit, dans un pays qui décide de rembourser les soins autour de l’IVG, ce syndicat appelle à ce que les femmes qui souhaitent avoir recours à l’IVG soient relégués au « Débrouillez-vous seules, la solidarité nationale n’a pas à vous fournir une quelconque aide ! » Ce sont des propos qui chacun pris isolément sont extrêmement graves et leur réitération fait que ce syndicat s’est mis hors jeu tout seul."

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  • Est-ce que cela contribue à fragiliser encore un peu plus l’accès à l’IVG en France ?

Dr Amina Yamgnane : "Ça légitime tous ceux qui continuent de penser que l’IVG ne devrait pas avoir droit de cité en France. Or l’IVG c’est une garantie pour la santé mentale des femmes, de leurs enfants, de leurs maris et il s’agit de ne pas revenir sur ces acquis que bien des pays et bien des femmes nous envient."

  • Vous êtes gynécologue-obstétricienne, ces propos vous font mal ?

Dr Amina Yamgnane : "Bien sûr. J’ai honte que certains de mes collègues puissent dire des choses pareilles au sujet de notre engagement vis-à-vis des femmes. Ils nous mettent au banc de toutes les négociations en cours. Ils ne rendent pas service aux gynécologues et ils ne rendent pas service aux femmes."

  • En France il existe une clause de conscience que les médecins peuvent invoquer pour refuser de pratiquer des IVG. Plusieurs voix se sont élevées ces derniers mois pour demander sa suppression. Est-ce que selon vous c’est une bonne solution ?

Dr Amina Yamgnane : "Non. Effectivement la question de l’accès à l’IVG, qu’il y ait suffisamment de médecins pour les faire, est une vraie question, qu’il faut sans cesse se poser. Mais à mon avis, ça n’est pas pertinent de lever la clause de conscience. Aujourd’hui, qui souhaiterait subir une IVG de la part du Dr Marty (NDLR : l’auteur de ce mail) ? Il s’agit d’être bien traité quand on subit une IVG, c’est un moment de grande vulnérabilité. Les professionnels qui le font doivent être en accord avec leur éthique personnelle. Sinon, cela peut générer de la violence de la part des professionnels en charge de ces soins à l’égard des patientes."

 

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