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L'invasion de rats dans les rues de Paris passionne les médias étrangers

Du "New York Times" au "Telegraph", les journalistes étrangers ont longuement écrit sur la prolifération de rats qui touche la capitale. Avec quelques références littéraires, un peu de clichés et une pointe d'exagération.

Article rédigé par franceinfo - Alice Maruani
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Un agent employé par la ville de Paris montre un rat mort dans le parc de la Tour Saint-Jacques, le vendredi 9 décembre 2016, pendant la dernière campagne de dératisation.  (FRANCOIS MORI/AP/SIPA / AP)

Une vaste campagne de dératisation a été lancée à Paris fin octobre, pour lutter contre la prolifération des rongeurs, notamment dans les espaces verts. Plusieurs parcs ont même été fermés pendant l'opération.

Cette "épidémie de rats" intéresse même les médias internationaux, qui rivalisent de références et d'emphase pour décrire, comme le site de la chaîne allemande ZDF, l'"invasion de rats dans la ville de l'amour".

"Baguette jambon-beurre à moitié mangée"

Le New York Times consacre un long article au sujet, titré "Les rats ont libre cours à Paris. La faute à l'Union européenne". L'auteur pointe du doigt la réglementation sur les poisons antirats, défendue par la Commission européenne, surnommée "le bouc-émissaire favori de tous, avec ses bureaucrates innombrables et anonymes". Mais ironise également sur la responsabilité de "la baguette jambon-beurre à moitié mangée" négligemment abandonnée dans un parc. 

Le journal britannique The Guardian titre sur un contraste : "Marais : le quartier chic de Paris où les rats sont plus nombreux que les résidents". En général, c'est ce qui choque le plus les journalistes et éditorialistes étrangers : Paris, ville-lumière, capitale du romantisme et de l'élégance, envahie par de vilains rongeurs, susceptibles de porter des maladies. Même les Champs-Elysées, "le boulevard le plus célèbre", sont touchés par la vermine, relève le Guardian.

La fermeture des sites touristiques est, assez logiquement, ce qui préoccupe le plus les médias étrangers. Le New York Times, qui explique que "Paris fait face à sa pire crise de rats depuis plusieurs décennies", évoque la fermeture partielle du Champs de Mars, où se trouve la tour Eiffel. Rappelons que si le monument a été fermé pendant plusieurs jours la semaine dernière, c'est parce qu'un mouvement de grève touchait son personnel. Rien à voir avec l'invasion des rongeurs. 

"Cela ne pouvait pas venir à un pire moment"

Pour lire le tableau le plus alarmiste, il faut lire le New York Post. En parlant d'une "proportion alarmante" de rats, le tabloïd raconte que les bestioles "courant à travers la ville ont forcé plusieurs attractions touristiques à fermer". Sans expliquer que la fermeture de certains parcs, celui de la tour Saint-Jacques ou le Champ-de-Mars entre autres, a été décidée pour mener à bien les campagnes de dératisation, et non pour protéger les touristes des rats.

"[L'invasion] ne pouvait pas venir à un pire moment" pour le journaliste. "Paris fait face à des attaques terroristes mortelles et à son pire épisode de pollution en dix ans", rappelle-t-il, avant d'ajouter que "des vols à main armée médiatiques, comme celui dont a été victime Kim Kardashian, ont terni l'image de la ville"

"La Ville-lumière devenue la Ville aux rats"

L'image des rats dans Paris semble titiller la fibre littéraire des journalistes étrangers. Le journaliste du New York Times évoque ainsi Les Misérables de Victor Hugo et les caricatures de cadavres entourés de rats d'Honoré Daumier. Mais aussi le film d'animation de Disney Ratatouille, qui met en scène un rat adepte de gastronomie française. Même référence pour Il Giornale, quotidien italien qui titre "la ville déclare la guerre à Ratatouille" et conclut : "Paris vaut bien une messe. En dératisation."

"Les rats dévorant les habits d'un prisonnier enfermé dans le cachot de la prison de la Conciergerie à Paris". Gravure tirée de "Les prisons de l''Europe" d'Alboize et Maquet, 1845.  (COLLECTION PRIVEE / ISADORA / LEEMAGE /AFP)

Le journal britannique The Telegraph attaque son article en citant Robert Browning, poète du XIXe siècle, qui a écrit sur l'invasion de rats d'Hamelin et son joueur de flûte. "Les rats ! Ils se battirent avec les chiens, tuèrent les chats, et mordirent les bébés dans leur berceau (...)". "De l'autre côté de la Manche, la vision poétique de Robert Browning (...) a éclos dans la vraie vie. Paris, la Ville lumière, est devenue la Ville aux rats", écrit Jane Shilling.

L'auteure de l'article, qui est aussi romancière, en profite pour s'attaquer à notre amour très "français", selon elle, des réunions aux dépens de l'action : "En Grande-Bretagne, notre réaction au problème des rats est plutôt robuste. On envoie (...) un agent de dératisation. En France, à la manière française, ils en parlent", écrit-elle. La preuve, "il y a six mois, Paris a organisé un séminaire international portant le titre optimiste de "Stratégies pour une gestion des rats en milieu urbain"". A la fin du papier, l'auteure, qui se demande si, au fond, on ne déteste pas les rats parce qu'ils nous ressemblent, conclut en paraphrasant Baudelaire : "Hypocrite rat, – mon semblable, – mon frère !"

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