Baisse de prix des médicaments, des tarifs des radiologues et biologistes, recul de certains remboursements...
Voilà quelques pistes évoquées par le gouvernement - et dévoilées dans Les Echos du 16 septembre - pour soulager le déficit de l'Assurance maladie.
Et aussi réaliser quelque 2,5 milliards d'euros d'économies en 2011 pour respecter le cap fixé par Nicolas Sarkozy: limiter à +2,9% la hausse des dépenses de l'assurance maladie l'an prochain.
Ces pistes ont commencé à filtrer dans la presse, suscitant la polémique sur des mesures touchant aux remboursements des assurés. Ce sont "des pistes de travail qui ne sont absolument pas arbitrées et que le gouvernement présentera dans les prochains jours", a dit la ministre de la Santé Roselyne Bachelot. Le gouvernement doit présenter le 28 septembre son Projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
L'ampleur du plan et des mesures envisagées a été dévoilée le 16 septembre par Les Echos. Le quotidien économique y indique que les médicaments remboursés à 35% par la Sécurité sociale, les "vignettes bleues", ne le seraient plus qu'à 30%. Le remboursement pour les consultations de ville (chez un généraliste notamment), passerait de 70% à 69,5%.
A l'hôpital, la franchise de 20% acquittée par les patients sur les actes ne porterait plus sur 91 euros mais sur 120. Des mesures limiteraient par ailleurs les cas de transports sanitaires pris en charge à 100% pour les patients en Affection longue durée (cancer, diabète...).
Mais ces mesures touchant les patients ne constitueraient pas l'essentiel des économies (autour de 500 millions d'euros, contre plus de 600 millions sur les dépenses de médicaments ou encore 550 millions pour la maîtrise des prescriptions médicales, selon Les Echos), mais ce sont les plus sensibles.
Cet effort de 2,5 milliards ne ferait que stabiliser en 2011 le déficit de la branche maladie du régime général, qui devrait atteindre cette année 13 milliards, contre un peu plus de 9 milliards pour la branche vieillesse, selon les derniers chiffres officiels.
Moindre hausse des remboursements de médicaments en 2009
Les remboursements de médicaments par la Sécurité sociale en 2009 ont représenté 22,6 milliards d'euros, une progression de 503 millions (+2,3%) parmi les plus faibles de ces dix dernières années, selon les derniers chiffres de la Caisse nationale d'assurance maladie. Les montants remboursés pour les médicaments avaient progressé de 3,7% en 2008. Les remboursements ont totalisé 16,3 milliards pour le seul régime général (+360 millions) en 2009.
Plusieurs facteurs ont favorisé cette maîtrise des dépenses: la baisse des prix (près de 470 millions d'économies), le développement des génériques (160 millions) et le fait que peu de nouveaux produits chers ont été mis sur le marché l'an dernier. L'assurance maladie a pu totaliser 935 millions d'euros d'économies en 2009. L'arrivée de nouveaux génériques permettra une économie supplémentaire, en 2010, de 350 millions.
Les prescriptions de médicaments par les hôpitaux "sont à l'origine des trois quarts de la croissance des médicaments" délivrés par les pharmacies, note la Cnam. Elles ont progressé de 7% en 2009 alors que celles des médecins de ville (généralistes et spécialistes en cabinet) n'ont augmenté que de 0,8%. Ces prescriptions hospitalières concernent principalement les "médicaments de spécialités", utilisés pour traiter des maladies lourdes comme le cancer, dont la croissance a représenté 386 millions d'euros en 2009, soit 75% de la croissance globale des dépenses de médicaments.
En montants remboursés, les médicaments pour les maladies chroniques (diabète, asthme, hypertension artérielle...) totalisent 8,6 milliards d'euros mais leur croissance a été modérée (+1,2%) en raison de la montée en puissance des génériques. En volumes de boîtes de médicaments remboursés, l'augmentation a été de 3,1%, beaucoup plus forte qu'en 2008. L'accélération est due surtout aux épidémies de grippe saisonnière et de grippe A H1 N1 qui ont marqué l'année 2009.
Dépenses de santé: la part des ménages stabilisée
La part des dépenses de santé qui reste à la charge des ménages français, après remboursements par la Sécurité sociale et les complémentaires santé, s'est stabilisée à 9,4% en 2009, selon les comptes de la santé publiés le 17 septembre par la Drees (statistiques des ministères sociaux). En 2008, ce taux s'était élevé à 9,5%. "La hausse enregistrée entre 2005 et 2008 est ainsi interrompue", relève la Drees, dans cette étude annuelle. La consommation de soins et de biens médicaux (CSBM), principale composante des dépenses effectuées dans le secteur de la santé, a atteint 175,7 milliards d'euros. Cela correspond à une consommation par habitant de 2.724 euros, en augmentation de 2,8% par rapport à 2008. La CSMB a ainsi représenté 9,2% du Produit intérieur brut en 2009, contre 8,7% en 2008, sachant que le PIB a sensiblement reculé du fait de la crise économique. En 1960, sa part était de 3,4% du PIB.
L'étude de la Drees se penche également sur le mode de financement de ces dépenses: la Sécurité sociale en a pris en charge 75,5% en 2009, comme en 2008, tandis que les complémentaires santé (mutuelles, assurances privées) en ont financé 13,8% (contre 13,7% en 2008, cette part était de 12,2% en 1995). En considérant le total des dépenses effectuées dans le secteur de la santé en France, au-delà des soins et des biens médicaux, les dépenses de santé ont été de 223,1 milliards d'euros, soit 11,7% du PIB.
Détail des dépenses
Les Français ont dépensé 223 milliards d'euros pour leur santé en 2009, un chiffre en augmentation de 4% par rapport à 2008, selon le rapport annuel de la Commission des comptes de la santé.
La consommation de soins et de biens médicaux représente les trois quarts de cette dépense, mais d'autres postes sont en forte augmentation, comme les soins aux personnes âgées placées dans des maisons de retraite (+15%) et les dépenses de prévention (+12,9%). Cette dernière augmentation est à rattacher à la campagne de vaccination contre le virus de la grippe H1N1.
Les soins et biens médicaux sont pris en charge à 75% par la Sécurité sociale, les assurances complémentaires prenant en charge 13,8%. Le reste des dépenses est à charge des ménages.
Les soins hospitaliers poursuivent leur croissance régulière avec +3,8%, même si cette augmentation est moins forte qu'au début des années 2000, remarque l'organisme. Les Français restent par ailleurs de grands amateurs de médicaments, puisqu'ils en ont consommé pour 35,4 milliards d'euros en 2009, un chiffre en augmentation de 2,5%.
Les mesures envisagées déjà critiquées
Le directeur général de l'assurance maladie, Frédéric van Roekeghem, a déclaré qu'il faudrait "des efforts de tous" et "vraisemblablement des assurés" pour faire face au déficit de la branche maladie du régime général.
La Mutualité française, qui fédère la quasi-totalité des mutuelles de santé, a critiqué les mesures qui "représenteraient une dépense supplémentaire de 500 millions d'euros pour les ménages". Les complémentaires santé, déjà touchées par une hausse de leur fiscalité, estiment qu'elles vont devoir augmenter leurs tarifs en 2011 parce qu'elles sont amenées à compléter les remboursements en baisse de la Sécu.
Le Ciss, collectif d'associations d'usagers de la santé, a dénoncé "un recul de l'assurance maladie solidaire et universelle", jugeant que le gouvernement serait plus inspiré de raboter davantage les niches sociales, comme l'a préconisé la semaine dernière la Cour des comptes. "Cette nouvelle augmentation du reste à charge des dépenses de santé est grave car elle est continue depuis 2004", a dit la Fnath (accidentés du travail, handicapés).
L'Association française des diabétiques a critiqué le moindre remboursement qui serait envisagé des bandelettes de test de glycémie, "jugeant ces bandelettes indispensables pour le suivi du diabète".
"Le gouvernement entend faire payer le prix de l'inorganisation de notre système de soins aux malades, les assurés sociaux n'en peuvent plus", a réagi la CFDT. "Ces mesures vont entraîner une augmentation du coût pour les malades et une nouvelle hausse des prix de leurs mutuelles santé, au risque de provoquer des renoncements de soins", a-t-elle poursuivi.
L'Union syndicale Solidaires a déploré des mesures visant "à réduire la protection sociale solidaire et à offrir une partie du gâteau aux assurances privées". "Ce sont une fois de plus les assurés sociaux qui paieront", a-t-elle ajouté. FO a estimé ne pas pouvoir "accepter que la note de la crise, dont les coupables ont été largement soutenus, soit présentée aux assurés sociaux".
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