Un régime personnalisé pour chaque diabétique ?
Sur un peu plus de huit jours, 800 personnes (non-diabétiques) ont scrupuleusement respecté le menu établi par l’équipe d’Eran Segal, du Weizmann Institute of Science en Israël. Au total, ce sont pas moins de 46.898 repas - et autant de mesure de l’indice glycémique - que les chercheurs ont pu comparer, à l’aide d’un crible informatique. Dernier élément pris en compte : des analyses de selles de chacun des participants, révélant la composition de leur microbiome intestinal (c'est à dire l'écosystème bactérien, la "flore intestinale" et son environnement).
"Il y a des différences profondes entre les individus - dans certains cas, ils avaient des réactions contraires les uns par rapport aux autres - et nous manquons véritablement d'informations [scientifiques à ce sujet]", a souligné M. Segal,
Le co-auteur de l'étude, Eran Elinav, estime lui avoir appris sur "notre niveau d'imprécision collective concernant l'un des concepts les plus basiques de notre existence, à savoir ce que nous mangeons et comment nous intégrons la nutrition dans notre vie quotidienne". Selon lui, au lieu de suivre des régimes alimentaires standard, il faut adopter une approche beaucoup plus personnalisée, mettant les personnes au centre du régime et non l'inverse, ce qui permet non seulement de les aider à contrôler leur taux de sucre, mais aussi à améliorer leur santé.
A l’aide des données recueillies, les chercheurs affirment avoir identifié "des microbes spécifiques corrélés aux niveaux de sucres dans le sang après les repas". Selon eux, l’analyse d’échantillons de selles permettrait d’adapter les recommandations nutritionnelles pour les malades.
Tout sur le microbiome ?
Pour Minisha Sood, directrice du service diabétologie de l'hôpital Lenox Hill de New York, "cette étude met en évidence l'importance d'une nutrition individualisée, les conseils en nutrition devraient varier d'une personne à l'autre et être ajustés pour répondre aux besoins de chaque individu sur la base de leurs réactions aux différents aliments". "Ce qui reste à déchiffrer, c'est la manière exacte d'ajuster la nutrition personnalisée", poursuit-elle, émettant des doutes quant à la centralité du microbiome dans cette équation.
De l’avis de Rebecca Blake, spécialiste en nutrition du réseau médical Mount Sinai Beth Israel, l'influence de la flore intestinale sur le métabolisme et l'obésité "est une discipline en pleine évolution dans le domaine des sciences nutritives". "Il faut se demander s'il s'agit de l'œuf ou de la poule : est-ce que notre régime alimentaire affecte le microbiome intestinal ou l'obésité, ou alors est-ce c'est le microbiome qui à des conséquences sur notre poids", s'interroge-t-elle. "Il faut encore poursuivre les recherches pour élucider la nature de ces connections".
Des scientifiques d'une cinquantaine d'institutions américaines ont appelé le mois dernier à lancer un projet ambitieux pour percer les secrets de ces écosystèmes extrêmement complexes.
Les membres du "Unified Microbiome Initiative Consortium" (UMIC) avaient alors souligné que les 100.000 milliards de microbes habitant l'organisme humain surpassent largement le nombre de nos propres cellules et sont essentiels à leur développement et à notre santé.
Source : Personalized Nutrition by Prediction of Glycemic Responses. David Zeev et al. Cell, 19 nov. 2015. doi:10.1016/j.cell.2015.11.001
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