Royaume-Uni : la police suggère d'imputer les frais de sécurité aux manifestants

Face aux successions de rassemblements, la police de Londres, qui déplore un manque de moyens, propose de faire payer les frais de sécurité des manifestations aux organisateurs.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Des policier bloque l'entrée de Waterloo Station, pendant une manifestation pro-palestinienne, à Londres, le 18 novembre 2023. (TOLGA AKMEN / EPA / MAXPPP)

C'est une idée qui devrait faire bondir tous ceux qui défendent le droit à manifester. La Metropolitan Police de Londres suggère que les frais de sécurité liés aux rassemblements pro-palestiniens soient désormais à la charge des manifestants. Une solution également préconisée dans un rapport adressé au cabinet du Premier ministre, Rishi Sunak.

La raison pour laquelle les hauts fonctionnaires de la police britannique en arrivent à une telle conclusion est qu'ils n’en peuvent plus, les policiers sont au bout du rouleau : pas assez d’effectifs, pas assez de moyens, trop de lieux et d’évènements à sécuriser. Depuis fin octobre, le Royaume-Uni est un des principaux théâtres des manifestations pro-palestiniennes. La mobilisation ne faiblit pas, des dizaines de milliers de personnes se réunissent à chaque fois, avec encore un nouveau rassemblement cette semaine. Les forces de l’ordre affirment qu’elles n’ont pas été autant sollicitées que depuis les Jeux olympiques de 2012.

Et tout cela a évidemment un coût : plus de 30 millions d’euros de frais supplémentaires, d'après l’évaluation du numéro deux de la police. Celui-ci évoque aussi la hausse de 700% des appels nécessitant l’intervention d’unités anti-terroristes et, par conséquent, l’annulation de milliers de jours de congé pour s’assurer qu’il y ait suffisamment d’agents sur le terrain.

20 000 postes supprimés en 2010

La police londonienne rappelle aussi qu’elle ne dispose plus des mêmes moyens que par le passé. Le gouvernement est en train d’y remédier, mais, en 2010, les conservateurs ont supprimé 20 000 postes sur tout le territoire britannique. Ils ont également diminué drastiquement le budget consacré au maintien de l’ordre.

Les méthodes des contestations ont aussi évolué. C’est ce que raconte l’adjoint à la police de Londres Mark Twist. Le ras-le-bol des policiers a commencé l’an dernier, face aux militants écologistes de Just Stop Oil. "Le plus difficile pour nous c’est qu’ils ne nous disent pas où ils vont manifester, ni quand ils vont le faire. Ce qui veut dire qu’on est obligé de mobiliser plus d’agents que d’habitude. Les gens sont frustrés quand on n’intervient pas rapidement, donc on doit s’assurer de pouvoir le faire", explique-t-il.

Un ex-député travailliste évoque le mouvement pro-palestinien

Un maintien de l’ordre qui nécessite plus d’agents et plus de moyens. Et au lieu de se tourner vers les pouvoirs publics, l’ancien député travailliste Lord Walney a préféré souffler à l’oreille du Premier ministre l’idée que le maintien de l’ordre soit financé directement par les manifestants. Il considère "que le désordre observé lors des marches anti-israéliennes" justifie que ces groupes couvrent "certains frais de police".

Lord Walney, aujourd’hui conseiller à la sécurité intérieure, évoque uniquement le mouvement pro-palestinien et rappelle qu’après tout, les clubs de foot en Angleterre prennent déjà en charge une partie des dépenses de sécurité. Lord Walney assure ne pas vouloir entraver la liberté d’expression. Mais il vient discrètement de planter une petite graine : conditionner les manifestations à la taille du portefeuille des organisateurs.

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