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Le Salvador élit un président en jean et blouson de cuir

Tous les jours, dans "Un monde d’avance", un coup de projecteur sur une actualité à l’étranger restée sous les radars. Aujourd’hui, le Salvador, petit pays d'Amérique centrale vient d'élire un président jeune et anti-système.

Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le nouveau président salvadorien Nayib Bukele, ici le 3 février 2019. (MARVIN RECINOS / AFP)

Nayib Bukele, c’est son nom, n’est pas du genre "tiré à quatre épingles". Dimanche 3 février au soir, pour son discours de victoire, au milieu des pétards et des confettis, il s’est présenté sur l’estrade, comme d’habitude : en jean, baskets, tee-shirt et blouson de cuir. Il avait juste enlevé la casquette de base-ball qu’il a généralement vissée sur la tête. Dans ce tout petit pays d’Amérique centrale (six millions d’habitants sur un territoire grand comme deux départements français), le succès de Nayib Bukele est une petite révolution, et pas uniquement pour son look. Ça va plus loin : Bukele bouleverse tous les codes politiques du pays. Il est jeune, 37 ans, arbore toujours la barbe et la moustache.

Il est un peu inclassable politiquement : il a démarré à gauche pour se situer désormais au centre droit. Et il est d’origine palestinienne ! Ça paraît improbable en Amérique centrale : son père a émigré de Bethléem en Cisjordanie pour venir s’installer au Salvador. Autant dire que Bukele est très loin du profil moyen des habitants du pays, le plus souvent issus du métissage entre les anciens colons espagnols et les populations indiennes. Bref, Bukele est un Ovni !

La lutte contre la corruption

Son succès, c’est aussi la déroute des partis traditionnels, parce qu’en plus Bukele l’a emporté dès le 1er tour, avec 53% des voix. Il met donc un terme à trois décennies de monopole du pouvoir par les deux principaux partis, l’Arena de droite, et le FMLN de gauche.

Sa campagne, très active sur les réseaux sociaux, a séduit en particulier les jeunes : les moins de 30 ans ont voté ultra-majoritairement pour lui. Le tout avec un slogan, omniprésent dans tous ses meetings : "Que devuelvan lo robado". Ça veut dire : "qu’ils rendent l’argent volé" ! Ça a le mérite de la clarté. Bukele a fait l’essentiel de sa campagne sur la dénonciation de la corruption des deux partis dominants. Et ça a marché. Aux yeux des électeurs, c’est visiblement la priorité. Et on retrouve là un phénomène en cours dans de nombreux pays dans le monde. À l’inverse, et un peu contre toute attente dans ce pays chrétien très pratiquant, le facteur religieux a été sans influence : les origines musulmanes de Bukele n’ont pas handicapé sa candidature.  

Le règne des gangs

Son programme est un peu flou. Il promet de nouvelles infrastructures, un nouveau port, une nouvelle ligne de chemin de fer. Mais il va surtout devoir s’attaquer aux deux maux qui détruisent le pays : la misère (un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté) et la violence des gangs, les maras, maîtres du trafic de drogue (4 000 homicides par an).

Comme dans le Honduras voisin, c’est cette violence qui pousse les Salvadoriens vers l’exil. Plusieurs milliers d’entre eux ont rejoint, ces dernières semaines, les caravanes de migrants qui cherchent à partir vers les États-Unis. Voilà le premier sujet sur le bureau de l’homme au perfecto et à la casquette de base-ball.      

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