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La mort du Sinatra russe

Tous les jours, dans "Un monde d’avance", un coup de projecteur sur une actualité à l’étranger restée sous les radars. Aujourd’hui, direction la Russie qui pleure l'une de ses stars, le jour même où les Américains célèbrent les obsèques d'Aretha Franklin.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Iosif Kobzon, le Sinatra russe, est décédé jeudi 30 août 2018. (MAXIM SHIPENKOV / EPA)

La Russie, elle aussi, pleure un chanteur vendredi 31 août. Mais à Moscou, ce n’est pas Aretha Franklin qui fait la Une des médias, c’est Iosif Kobzon. Vous n’en avez jamais entendu parler ? Eh bien tous les Russes le connaissent.

Iosif Kobzon chante ici le classique juif Hava Nagila. Il était considéré comme le Franck Sinatra russe. Il est mort hier à l’âge de 80 ans, victime d’un cancer. Et depuis, ses chansons passent en boucle à la radio.

Vladimir Poutine s’est dit "en deuil". La Douma, le parlement russe, s’est fendu d’un communiqué officiel. Kobzon c’était pour les Russes une figure familière.

Il était d’origine juive, né dans le Donbass, cette région contestée entre Ukrainiens et Russes à l’est de l’Ukraine. Et il était devenu, en particulier sous Brejnev, et même sous Gorbatchev à la fin de la période soviétique, LA grande star officielle. Avec 3 000 chansons à son actif ! Il allait chanter auprès des troupes russes en Afghanistan, il avait été le premier à se produire à Tchernobyl, deux mois après l’accident nucléaire. Avec un certain courage d’ailleurs puisqu’il avait chanté sans masque de protection malgré la contamination.

Il était aussi célèbre pour la bande son d’une série d’espionnage très connue en Russie 17 moments de printemps, une sorte de Mission impossible russe. Toujours tiré à quatre épingles, les sourcils finement taillés, les cheveux soigneusement teints en noir, c’était le crooner par excellence ! Et on le voyait quasiment tous les ans à la télévision russe au moment des fêtes encore ces dernières années.

Iosif Kobzon était aussi un personnage politique engagé

En Russie, ça aide, forcément, si vous êtes du côté du pouvoir. Il était devenu député, évidemment au sein du parti de Poutine, Russie Unie. Puis il avait soutenu l’offensive russe dans l’est de l’Ukraine et l’annexion de la Crimée, ce qui lui avait valu d’être interdit de séjour en Europe. Et il était aussi soupçonné de liens avec la Mafia. Bref, ce n’était pas vraiment un enfant de chœur.

Une anecdote avec le vrai Franck Sinatra

Kobzon raconte dans ses Mémoires, qu’il avait failli convaincre Sinatra de venir chanter sur la Place Rouge. Ça se passe sous Gorbatchev, à la fin des années 1980. L’affaire est quasiment signée. Vous imaginez : Sinatra, le symbole américain en Russie. Et puis Sinatra se met à poser des conditions : un tapis rouge à la descente de l’avion, une invitation manuscrite de Gorbatchev, etc. C’en est trop. L’affaire tombe à l’eau. Sinatra n’est jamais venu en Russie.

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