L'Allemagne veut mettre en place des quotas de femmes à la direction des entreprises
C’est le premier pays en Europe, avec la Suisse, à chercher à imposer ce type de mesure.
L’annonce a été faite mercredi 25 novembre : toutes les entreprises allemandes de plus de 2 000 salariés devront dorénavant compter au moins une femme dans leur comité de direction, dès l’instant où ce comité comporte trois membres ou plus. C’est en tout cas le projet défendu par la coalition au pouvoir. Il s’agit donc bien d’imposer un quota de femmes dans les instances de direction des entreprises privées.
Comme toujours en Allemagne, cette proposition est le fruit d’une négociation et d’un compromis entre la CDU de centre droit et le SPD de centre gauche, qui partagent le pouvoir. C’est aussi le résultat d’une discussion qui a duré plusieurs mois. Le texte est évidemment soutenu par la chancelière Angela Merkel, mais aussi, de façon plus étonnante, par l’un des candidats à sa succession : le conservateur Markus Söder, patron de la CSU, l’allié de la CDU en Bavière. Précisons que l’an dernier, un projet assez similaire a été évoqué en France par Bruno Le Maire, suite à une préconisation du Haut Conseil à l’égalité, mais ce projet est pour l’instant resté lettre morte.
Un aveu d'échec
En même temps, si l’Allemagne décide ça de façon autoritaire, c’est aussi parce qu’elle est en retard sur la parité et de ce point de vue, cette proposition est un aveu d’échec. En Allemagne, les femmes ne représentent que 12,8% des membres des comités de direction des plus grandes entreprises, celles côtés à l’indice boursier Dax. En France, à titre de comparaison, c’est 21% dans les entreprises du CAC 40. Le constat fait par l’Allemagne, c’est que rien n’avance sur le sujet sans contrainte. Le pays en a fait l’expérience. Il y a 5 ans, il a imposé 30% de femmes dans les conseils de surveillance, une instance plus large que les comités de direction. Le taux est aujourd’hui de 35%, les entreprises ne s’en portent pas plus mal.
Une campagne spectaculaire sur les réseaux sociaux
Mais ça n’a eu aucun effet en chaîne sur la présence des femmes dans les directoires, qui sont restés la chasse gardée des hommes. Donc aujourd’hui, l'Allemagne veut mettre en place une nouvelle mesure coercitive. C’est d’ailleurs ce que préconise aussi une campagne spectaculaire lancée ce 25 novembre sur les réseaux sociaux en Allemagne. On y voit 40 personnalités féminines allemandes de premier plan plaider pour cette mesure sous le titre "Ich bin eine Quotenfrau". En français : "Je suis une femme quota ". Parmi les signataires figure la présidente de la Commission européenne Ursula Von Der Leyen. Toutes ces femmes soulignent qu’elles ne seraient jamais arrivées à de telles responsabilités si à un moment donné, la mesure d’il y a 5 ans, celle sur les conseils de surveillance, n’avait pas été imposée.
L'opposition du patronat
Ce projet de loi va toutefois rencontrer une forte opposition. Le patronat allemand y est défavorable. Il y voit une ingérence excessive des pouvoirs publics dans les affaires intérieures des entreprises privées et affirme que les candidates sont peu nombreuses pour les postes de direction, ce qui reste à démontrer. Plusieurs députés de la CDU-CSU sont également circonspects. Le débat parlementaire pourrait donc être animé dans les semaines qui viennent. Mais Angela Merkel, à l’aube de sa dernière année au pouvoir, mettra probablement tout son poids dans la balance.
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