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Taxe Tobin à la française : plus politique qu'économique

La taxe sur les transactions financières à la française revient sur le devant de la scène. Nicolas Sarkozy en parle aujourd’hui lors d’un déjeuner de travail à Berlin avec la Chancelière allemande Angela Merkel. Le projet soulève bien des polémiques.
Article rédigé par Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Le Président de la République veut faire cavalier seul. L’idée n’est pas nouvelle. Bruxelles y réfléchit depuis quelques temps : elle envisage de ponctionner 0,1% sur les transactions d’actions et d’obligations, plus 0,01% sur les opérations plus compliquées, ce que l’on appelle les produits dérivés. Ce projet – bruxellois – est censé rapporter 55 milliards d’euros sur les seules transactions financières réalisées en Europe. L’idée d’une telle taxe remonte aux années 70 : l’économiste James Tobin l’avait alors imaginé pour financer le développement des pays pauvres et freiner la spéculation en mettant (pour reprendre ses propres termes) : ‘’du sable dans les rouages des marchés financiers’’ . L’objectif est tout autre aujourd’hui puisqu’il s’agit, certes de moraliser le secteur, mais d’alimenter les budgets européens.

Que sait-on de l'armature du projet français à ce jour ?

Rien. C'est le problème. Quels seraient les entreprises et les capitaux taxés ? Quel serait le montant de cette taxe et à quoi servirait l'argent ? En voulant imposer, dans son coin, une telle taxe avant l’élection présidentielle, Paris joue la carte de l’action face à des partenaires européens qui traînent les pieds. On veut bien réfléchir à la mise en place de cette taxe mais ensemble. Trop lourd aux yeux d’un Elysée impatient qui veut passer en force pour envoyer un message politique mais en négligeant la faisabilité et les conséquences économiques d’un tel geste. En voulant imposer cette taxe, Paris prend un gros risque. Objectivement, ses banques, déjà contraintes de renforcer leurs fonds propres pour faire face à la crise, supporteraient mal de verser une obole supplémentaire. Ce n’est pas faire le jeu des lobbies bancaires que de souligner de telles incohérences. Dans tous les cas, la taxe en question est vouée à l’échec.

Ce n’est pas ce que disent, notamment les associations qui militent pour cette mise à contribution des financiers !

De deux choses l’une : si la France l’applique en solo, elle poussera les établissements concernés à délocaliser leur patrimoine et les emplois correspondants vers des centres plus accueillants tels que Londres. Si la mesure est décidée au niveau européen, les capitaux taxables se déplaceront de toute façon vers les Bahamas ou tout autre paradis incontrôlables du même genre. La Suède fait figure d'exemple : elle a mis en place cette taxe avant de faire marche arrière deux ans plus tard : tous ses opérateurs financiers avaient pris la poudre d'escampette.

Peut-on imaginer une alternative ?

Je vais être provocateur : quitte à  jouer la carte de la moralisation, autant taxer les ventes d’armes. Sérieusement :  imposer la partie non délocalisable du secteur financier serait plus logique, et certainement plus efficace. Un impôt, à l’étude au printemps, envisageait d'imposer les bénéfices des institutions financières. Le projet a été abandonné... il mériterait peut-être d'être remis sur la table.

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